Analyse du corps électoral guinéen

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Nadia Nahman
Bachir Diallo

L’analyse du fichier électoral guinéen révèle des anomalies statistiques injustifiables qui mettent en évidence, si besoin en était, le travail bâclé effectué par la CENI pour le compte du pouvoir afin de se tailler un fichier sur mesure.

Ces anomalies peuvent-être résumées en 3 parties :

  • Un ratio population électorale/population globale largement au-dessus de la moyenne régionale ;
  • Une CENI prise en flagrant délit de fraude électorale en Haute Guinée ;
  • Une incohérence notoire entre les données de la CENI et celles de l’INS.

En effet, le fichier électoral Guinéen issu du recensement de 2019 comporte 7 764 130 électeurs, dont

  • 7 552 747 électeurs pour l’intérieur du pays
  • 211 381 électeurs pour l’étranger
  • Un ratio population électorale/population globale largement au-dessus de la moyenne régionale :

Le nombre d’électeurs représente 62% de la population globale de la Guinée alors que ce taux tourne autour de 40% dans la sous-région. Il est de 41.23% au Sénégal, 31% en Côte d’ivoire, 41.58% au Togo, 40.88% au Benin, 38.33% au Burkina Faso, 39.50% au Mali et 38.58% au Niger.

En se référant au Fichier de l’élection présidentielle de 2015, on constate aussi que ce taux a connu un accroissement moyen de près de 30% entre 2015 et 2019 (en 4 ans) avec de grosses disparités entre les régions du pays.

  • Une CENI prise en flagrant délit de fraude électorale en Haute Guinée

Les concepteurs de ce Fichier ont permis à la seule population électorale de Kankan de connaitre un accroissement de plus de 54% entre 2015 et 2019. Cette même progression est de 30% en moyenne pour l’ensemble du territoire.

Pire, certaines communes du pays ont vu leur population électorale doubler en quatre (4) ans :

Kintinian (Siguiri) : 118.34%, Doko (Siguiri) : 112.30%, Dialakoro (Mandiana) : 100.20%, Kondianakoro (Mandiana) : 97, 68%, Madina Wora (Mali) : 97.37% et Mandiana Centre : 94.81%.

Pire encore, certaines communes ont un corps électoral supérieur à leur population : Mandiana Centre (Corps électoral = 133.75% de la population), Doko (Siguiri) : 104.78%, Kouriah (Coyah : 102.07%).

L’électorat de la région de Kankan est presqu’égal à la somme de l’électorat des régions de Boké, Mamou et Labé. Alors qu’elle ne représentait que 17% du corps électoral en 2015, elle passe ainsi à 20% en 2019.

La préfecture de Mandiana fait un bon de 10 places dans la répartition par préfecture de la population électorale, passant de la 18ème en 2015 à la 8ème place en 2019. Les préfectures de Siguiri et de Mandiana ont un accroissement de leur électorat de près de 80%, soit près de 3 fois la moyenne nationale. Sur les 6 préfectures qui font environ 40% d’accroissement, 5 proviennent de la Haute Guinée (Mandiana, Siguiri, Kankan, Dinguiraye, Kouroussa).

Le boum démographique de cette région comparativement aux autres est statistiquement inexplicable d’autant plus que les 2 régions qui constituent les poumons économiques du pays sont Conakry et Boké.

  • L’incohérence entre les données de la CENI et celles de l’INS

L’INS estime le groupe d’âge de la population de 0 – 19 ans vivant à Conakry à 947 298 en 2019, soit 49.06%, alors que d’après la CENI, plus de 80% de la population de la région de Conakry est « électeur » (1 550 014 électeurs pour 1 930 838 habitants). Ce qui signifie que les moins de 18 ans et les majeurs non-inscrits ne représentent que 20%.

Mise à part la région de Mamou, plus de la moitié de la population des autres régions est « électeur » dans un pays où plus de 50% de la population est jeune.

Conclusion

Ce fichier, totalement tronqué en faveur du parti au pouvoir, décrédibilise complètement le processus électoral en cours.Le retrait de l’OIF dudit processus, en raison des nombreuses irrégularités et incohérences constatées, met en évidence sa volonté de se dissocier de la mascarade électorale en cours qui s’apparente plus à une sélection qu’à une élection.

Par Nadia Nahman et Bachir Diallo

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