Combat du FNDC, élections législatives, position de l’UPG : Jacques Gbonimy dit tout à Guineematin

Jacques Gbonimy, président du parti UPG
Jacques Gbonimy, président du parti UPG

L’Union pour le Progrès de la Guinée (UPG), formation politique fondée par feu Jean Marie Doré, se cherche après la guerre de leadership qui l’a minée à un moment donné. Le parti, aujourd’hui dirigé par Jacques Gbonimy, est membre du Front National pour la Défense de la Constitution (FNDC) et se réclame de l’opposition.

Dans une interview accordée à deux reporters de Guineematin.com hier, vendredi 22 novembre 2019, monsieur Gbonimy, ancien directeur du département formation et accréditation à la Commission Electorale Nationale Indépendante (CENI), est revenu sur divers sujets d’actualité nationale : manifestations contre le 3ème mandat, répression meurtrières des opposants au 3ème mandat, élections législatives de février 2020…

Décryptage !

Guineematin.com : quel regard portez-vous sur les manifestations du FNDC contre le projet de nouvelle constitution qui ouvrirait le boulevard à un troisième mandat pour le président Alpha Condé ?

Jacques Gbonimy : les marches, c’est d’abord constitutionnel, et nous avons adhéré au FNDC et aux idéaux de ce mouvement. Nous avons fait partie des deux dernières marches et nous pensons que c’est une obligation parce que nous voyons que les choses ne sont pas bien gérées dans notre pays ; et que cette affaire de constitution n’est pas aujourd’hui à l’ordre du jour malgré que le pouvoir est en train de faire la campagne pour mettre tout le monde dans ce mouvement. Mais, on voit que la population ne croit pas du tout à cette affaire de troisième mandat et de révision constitutionnelle qu’on appelle aujourd’hui changement de la constitution. Nous connaissons quelles sont les conditions qui peuvent amener à un changement de constitution et nous connaissons aussi ce que la loi elle-même recommande, à savoir la révision constitutionnelle. On pouvait comprendre que le président nous demande d’aller à une révision constitutionnelle, s’il n’y avait pas des suspicions de candidature après, pour dire d’aller à changement de constitution et mettre en place une nouvelle constitution pour favoriser un troisième mandat. Nous sommes pour les marches parce que c’est constitutionnel.

Guineematin.com : depuis le début de ces marches anti-3ème mandat en Guinée, plusieurs citoyens ont été tués par balles. Quelle lecture faites-vous de ces tueries dont la paternité est toujours renvoyée aux forces de l’ordre ?

Jacques Gbonimy : c’est regrettable. On a constaté qu’à chaque fois que les marches sont laissées libres, encadrées ou pas même encadrées, quand elles se déroulement librement jusqu’à destination, il n’y a pas de dégâts ; c’est l’exemple du 07 novembre. Les gens ont marché jusqu’au stade malgré le monde qui était dans la rue, malgré la grande mobilisation, il n’y a pas eu de dégâts matériels, ni humains. Et, vous avez constaté que la dernière marche a eu des dégâts humains parce que la marche a été bloquée quelque part et finalement il y a eu des manifestations hors de la marche et toutes les victimes de cette journée ont été touchées en dehors de l’espace de la marche. Je pense que le gouvernement doit constitutionnellement accepter que les gens marchent pour exprimer leur mécontentement ou leur adhésion à leur projet. C’est reconnu par la loi, le gouvernement doit encadrer pour ne pas qu’il y ait des dégâts comme on l’a toujours constaté. La réalité, c’est ça ! Vous avez vu hier (jeudi 21 novembre) à N’Zérékoré combien de milliers de personnes étaient dans la rue ; et, il n’y a pas eu de dégâts humains, ni de dégâts matériels. Si on tente d’empêcher la marche, c’est ce qui amène des problèmes. Donc moi, mon appréciation par rapport à ces marches, c’est de les permettre comme indiqué par la loi et de laisser librement les gens marcher parce que c’est reconnu par la loi et c’est une démarche constitutionnelle.

Guineematin.com : la CENI a annoncé la date du 16 février 2020 pour la tenue des élections législatives. Vous, en tant qu’ancien commissaire de cette institution, pensez-vous que cette date est techniquement tenable ?

Jacques Gbonimy : l’un des avantages de ce chronogramme, c’est le consensus obtenu au sein même de la CENI, c’est-à-dire que 16 commissaires sur 17 ont accepté le projet de chronogramme. Mais, il y a des couacs dans ce chronogramme parce que le nombre de jours accordés à la révision de la liste électorale est insuffisant et tous les délais qu’on accorde aux différentes opérations risquent d’être insuffisants. Une révision qui était prévue pour trois mois, ça devait se faire du 1er octobre au 31 décembre, on a mis ça sur 25 jours. Je crois que ça va être compliqué parce qu’aujourd’hui s’il faut faire passer tout le monde devant la machine et reprendre les nouveaux qui n’étaient pas inscrits, on risque d’être au-delà de ce délai et ça va nous poser des torts ou même un glissement du chronogramme. La date du 16 février 2020 risque de ne pas être tenue et si encore on veut forcer pour aller, ça va être des élections bâclées. C’est pourquoi, il faut, maintenant là, que le dialogue s’instaure entre la mouvance, l’opposition et le gouvernement pour que les choses soient vues et retenues pour ne pas qu’il y ait des quiproquos sur les différents délais, sur les différentes opérations et sur le déroulement même de ce chronogramme. On a besoin de se parler, d’échanger et de retenir l’essentiel pour que tout ce qu’on fait soit plus ou moins consensuel pour qu’il y ait des élections qui seront acceptées au finish par tout le monde qui va participer à ces élections.

Guineematin.com : comment votre parti prépare ces élections législatives sur le terrain ?

Jacques Gbonimy : nous sommes déjà en préparation depuis que nous avons pris le parti. On a essayé de revoir les structures du parti à l’intérieur et même à l’étranger parce que j’ai fait une tournée en Europe. Nous sommes sur pied pour les préparatifs de ces élections législatives bien qu’on ne croit pas à la date du 16 février. Mais, nous sommes en train de nous préparer, une lettre est déjà partie pour demander aux différentes structures de désigner leurs représentants pour la candidature de l’UPG sur la liste nationale et les uninominaux.

Guineematin.com : quelle est la position de l’UPG sur l’échiquier politique ?

Jacques Gbonimy : notre position est claire, anciennement nous étions du centre, au vivant de l’honorable Jean Marie Doré. Mais depuis son décès, le congrès de 2016 à l’unanimité a retenu d’aller à l’opposition à partir des représentants même de l’UPG venus de l’intérieur. Donc, nous sommes de l’opposition ; et, depuis que nous avons pris la tête de ce parti, nous avons repris nos activités au sein de la Convergence de l’Opposition Démocratique (COD). Nous avons adhéré au FNDC pour mener le combat pour la démocratie en République de Guinée. Donc, notre position est sans faille, c’est clair nous sommes de l’opposition et nous sommes membres du FNDC.

Guineematin.com : nous sommes au terme de cet entretien, quel est le dernier mot ?

Jacques Gbonimy : c’est d’inviter et les gouvernants et tout le monde à un dialogue sincère. Parce que ce qui pose problème en Guinée, c’est qu’on a souvent tenu des dialogues, mais l’application des résolutions de ces dialogues-là a posé problème. C’est ce qui fait qu’aujourd’hui on n’a pas pu achever les élections locales. Parce qu’il était question que cela se poursuit jusqu’au niveau des quartiers et jusqu’au niveau régional. On a fait le niveau communal, on s’est arrêté là, on n’a pu mettre en place les chefs de quartiers et les présidents de districts. On n’a pas pu non plus mettre en place les conseillers régionaux. Donc c’est une élection inachevée et aujourd’hui on tend vers les élections législatives avec encore beaucoup de discussions et de suspicions. Ça risque de poser encore des problèmes à l’arrivée. Par rapport à cette question qui préoccupe tout le monde aujourd’hui, je crois que la réponse est avec le chef de l’Etat qui est le président de toutes les institutions, qui est le président du peuple de Guinée, qui est le président de la Guinée elle-même. Cette question de troisième mandat n’est pas possible. Il lui suffit aujourd’hui de dire qu’il n’est pas candidat à la prochaine élection pour que le climat se décrispe et que tout le monde soit dans l’harmonie pour aller à ces élections. Si tel n’est pas le cas, on va être dans les débats inutiles de révision constitutionnelle, de changement de constitution, de troisième mandat qui n’apporte rien à la Guinée, parce qu’il a fini ses deux mandats. On a besoin que l’alternance intervienne dans notre démocratie pour que la paix règne en Guinée, notre pays.

Interview réalisée par Siba Guilavogui et Léon Kolié pour Guineematin.com

Tél. : 620 21 39 77/ 662 73 05 31

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