COVID-19 en Guinée : l’Etat fait semblant d’aider les personnes vulnérables !

A l’occasion de sa présentation hier, mardi 23 juin 2020, de la Phase 2 du plan de riposte économique contre la COVID-19, le Premier ministre, Kassory Fofana, a annoncé « des mesures fortes » pour protéger les « personnes vulnérables » contre les impacts du nouveau coronavirus qui sévit en Guinée depuis le mois de mars dernier. Et, cette « protection » doit se traduire par un soutien financier. Seulement, compte tenu de la cherté de la vie dans le pays, le montant prévu par ménage et par mois frise le ridicule.

Selon le Premier ministre, « l’agence nationale d’inclusion économique et sociale (ANIES) déploiera, dans les prochaines semaines, un vaste programme de transferts monétaires au bénéfice d’un premier groupe cible de 240 000 ménages, à raison de 250 000 francs guinéens par ménage et par mois. Ces transferts seront accompagnés de distribution de vivres aux foyers communautaires infectés et de la poursuite de la campagne de sensibilisation et de distribution de kits sanitaires entreprises en phase 1 ».

Mais, à entendre cette mesure, on pourrait bien se demander si le gouvernement est bien imprégné de la précarité, de la paupérisation et de la cherté de la vie auxquelles sont confrontés actuellement les Guinéens.

En effet, l’apparition du nouveau coronavirus en Guinée a bouleversé les habitudes sociales dans le pays. Plusieurs secteurs d’activités ont été impactés ; et, les mesures restrictives (fermeture des frontières, couvre-feu, état d’urgence, port obligatoire de masque, distanciation sociale…) instaurées par les autorités pour limiter les contaminations au COVID-19 ont sérieusement affecté le quotidien et les conditions de vie des guinéens. Des conditions de vie qui étaient déjà effritées par la situation économique calamiteuse que traverse le pays depuis des années. Le coût du transport a augmenté de 100% à Conakry et un peu partout sur le territoire national. Les tentatives de l’Etat de « soutenir le pouvoir d’achat des ménages » à travers des « allègements fiscaux sur les importations » de riz et autres denrées de première nécessité n’a pas empêché une hausse des prix dans les différents marchés. Avec son faible revenu, le guinéen lambda est devenu plus misérable.

Avec tous ces maux, on se demande bien ce qu’un ménage peut faire avec ce montant dérisoire de 250 000 pour un mois. S’il s’agissait d’un salaire, on aurait nommé ce montant : SIDA (salaire insignifiant difficilement acquis). Hélas !

Donner 250 000 francs guinéens à un ménage pour une consommation d’un mois, c’est accroître ses problèmes. Car, sur le marché, cette somme ne permettra même pas de gagner un sac de riz de 50 kilogrammes. Et, pourtant, le riz est bien l’aliment de base des guinéens.

Le bidon de 20 litres d’huile d’arachide se négocie entre 230 000 et 250 000 francs guinéens. Et, avec les restrictions instaurées dans le secteur des transports, les prix des condiments sont aussi à la hausse. Egalement, pour un ménage se trouvant à Conakry, ces 250 000 francs ne couvriraient non plus les frais de transport pour un mois. Car, avec la limitation à trois le nombre de passagers dans les taxis, le coût du transport a doublé sur chaque tronçon.

Bref, compte tenu de la cherté de la vie, ce programme de protection annoncé par l’Etat à l’endroit des personnes vulnérables est simplement de la poudre aux yeux. C’est une manière très idiote d’amuser la galerie dans un contexte où le sérieux et la cohérence devrait pourtant être le fer de lance de l’ensemble des interventions du gouvernement de la République.

Mamadou Baïlo Keïta pour Guineematin.com

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