Déguerpissement à Boké : de nombreux citoyens dans la tourmente

En début de cette semaine, le préfet Hassane Sanoussy Camara a annoncé aux populations de Boké le démarrage d’une vaste campagne de déguerpissement pour libérer les emprises des voiries de la commune urbaine et pour la récupération des domaines de l’Etat. Et cette annonce a semé un vent de panique aussi de la population.

Plusieurs commerçants et autres exploitants d’auxiliaires de commerce sont dans le désarroi. Également, plusieurs vendeuses qui occupent les bordures de route sont dans la tourmente. Elles sont désemparées et se demandent à quel saint se vouer pour échapper à cette tornade de déguerpissement, a constaté le correspondant de Guineematin.com dans la préfecture de Boké.

Ce qui convient d’être appelé « opération bulldozer » a été entamé mercredi dernier, 10 mars 2021, dans la commune urbaine. Les cris et gémissements des pauvres populations pour implorer la clémence du préfet Hassane Sanoussy Camara n’ont servi à rien. Plusieurs lieux de commerce (boutiques, magasins, petits conteneurs…) qui se trouvent en bordure de route ont été démolis. Les plus avisés des citoyens avaient déjà sorti leurs marchandises et décoiffé leurs boutiques. Mais, ceux qui comptaient sur le tendre cœur des autorités ont subi avec étonnement la fureur destructrice des machines déployées sur le terrain pour terrasser leurs boutiques.

Désemparés face au funeste destin qui a été réservé à leurs commerces, des jeunes, les mains aussi habiles que celles des charpentiers professionnels, s’activent dans la précipitation à décoiffer leurs boutiques et magasins. La triste scène était visible sur la route Réné Caillé, au carrefour 110ème, en passant par le commissariat central de police jusqu’au carrefour La Pirogue.

Safiatou Sampou, vendeuse

Au marché central également, les femmes ont les yeux larmoyant. Elles sont paniquées face à la situation cauchemardesque qu’elles subissent impuissantes. « Nous sommes dans des difficultés, parce que c’est ici qu’on gagne tous nos besoins. Moi, comme beaucoup de femmes ici je suis veuve. C’est ici qu’on se débrouille pour nourrir nos enfants. Mais si on me dit de quitter ici, je me demande où aller », se lamente Safiatou Sampou.

« Ils veulent nous enlever ici où nous nous débrouillons pour chercher à nourrir nos familles. Nos maris sont pauvres, ils ne travaillent pas, nous avons la charge des familles, on ne peut pas aller à 400 bâtiments, c’est loin pour nous. Il n’y a pas de place dans les autres marchés, vraiment nous demandons aux autorités d’avoir pitié de nous. Nous cherchons la subsistance pour nos enfants », lance Gondoba Djikiné.

Fatoumata Haïdara, vendeuse de chaussures

Entre peine et interrogation sur son avenir, Fatoumata Haïdara, vendeuse de chaussures, est sur le point de s’effondrer. Son moral est visiblement plus bas que jamais. « Notre inquiétude est très grande aujourd’hui, seul Dieu peut nous aider à la gérer. Là où nous sommes, c’est ici que tous nos problèmes sont réglés, les cas de maladie de nos enfants, leur scolarité, c’est à travers ce marché qu’on gère tout petit à petit.

Aujourd’hui, on nous demande de quitter ici ; et, si on quitte ici, on ne connaît aucune destination. Si on nous demande de quitter la route, on va quitter et nous allons nous coller au mur. Moi, depuis ce matin, je n’arrive pas à manger, je suis troublée, je ne sais plus quoi faire. Nous demandons au préfet de nous laisser là pour le moment », dit-elle alors qu’elle se trouve au bord du sanglot.

Assise devant une table de friperie, Fatou Sylla a également l’air perturbée. Elle implore la pitié des autorités. « Moi je vends de la friperie ici. Nous savons que les autorités ont raison, mais nous souffrons énormément et nous demandons au préfet de nous pardonner. Nous venons ici pour aider nos maris et nos enfants.

Et si on nous enlève ici, le temps pour nous d’avoir une autre place, on aura perdu toutes nos marchandises. Nos maris ne travaillent pas, c’est nous qui donnons à manger à nos enfants. Ils n’ont qu’à avoir pitié de nous. Eux-mêmes ont des sœurs et des mamans, ils n’ont qu’à nous pardonner pour l’amour de Dieu », a imploré Fatou Sylla.

Mais, il faut dire que les scènes de lamentation auxquelles se sont livrées ces femmes ne semblent nullement affecter le préfet de Boké, qui était présent sur le terrain. Hassane Sanoussy Camara a juré de déguerpir tous occupants des emprises de la route.

De Boké, Abdourahmane N’Diaré Diallo pour Guineematin.com

Tel. 628-98-49-38

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