Guinée : l’opposition incapable de recoller les morceaux

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Ces derniers jours, les commentaires allaient bon train sur une nouvelle alliance politique regroupant le trio Cellou Dalein Diallo, Sidya Touré et Lansana Kouyaté. Ce dernier affirme que le projet est un mort-né. Ce qui constitue un cadeau inespéré pour le pouvoir. Pour celui-ci, une entente entre les anciens Premiers ministres du général Lansana Conté est le pire des scénarios. C’est pourquoi, il mettra tout son poids dans la balance pour éviter ce scénario catastrophe pour lui.

Mais, c’est moins la stratégie du pouvoir que l’égoïsme de ses opposants qui empêche le trio de s’entendre. Alors que, si au début du règne de l’actuel président, il fallait pour certains mettre le nouvel élu à l’épreuve de la gestion du pouvoir, bon nombre d’observateurs estiment aujourd’hui qu’il n’existe plus aucune raison de ne pas se donner la main pour changer le changement. Arguant les difficultés tous azimuts qui assaillent les Guinéens.

En effet, près de 11 ans après l’accession au pouvoir de l’opposant historique, la Guinée est confrontée à une crise multidimensionnelle. Au plan politique, le changement de la constitution, rédigée avec le sang des martyrs des différentes crises, a plongé le pays dans une grave crise politique. Pour la première fois depuis la sortie de prison de l’actuel chef de l’État, les prisonniers politiques remplissent les maisons d’arrêt du pays. Ceux qui ont plus de chance n’ont pas d’autre choix que de prendre le chemin de l’exil.

Ceci entrainant cela, la crise politique s’installe avec ses corolaires de crises économiques et sociales. Avec entre autres les infrastructures routières qui en disent long sur l’état de l’ensemble du pays. Les routes nationales sont devenues comme une chemise usée que le propriétaire ne veut pas jeter. Il coud par ci, elle se déchire par là. En outre, au moment où les autres États du monde tentent de soulager les citoyens confrontés à une situation sans précédent avec la pandémie de Covid-19, l’État guinéen va à contrecourant du petit village planétaire. L’augmentation du prix du carburant à la pompe, qui a entrainé une flambée des prix sur le marché, est la preuve, s’il en est besoin, que les autorités guinéennes sont peu soucieuses des difficultés que connaissent les citoyens.

Pour revenir au sujet, dans un contexte comme celui auquel la Guinée est confrontée, les anciens Premiers ministres étaient censés accorder leur violon pour mettre la pression sur le gouvernement afin qu’il change sa politique actuelle. C’était sans compter avec l’égoïsme des uns et des autres. A l’exception de la période durant laquelle Alpha Condé fit ses premiers pas comme chef de l’État, le trio n’a jamais regardé dans la même direction. Parce que chacun veut pour lui seul.

Très tôt, Lansana Kouyaté se rend compte que mener la vie d’un opposant dans un pays dirigé par un ancien opposant n’est pas une promenade de santé. Il prend la place laissée vacante à Paris par le nouvel élu : celle d’un opposant en exil volontaire ou forcé. Cellou et Sidya continuent à monter sur le capot d’un véhicule et à inhaler chaque semaine le gag lacrymogène. La présidentielle de 2015 mettre fin à leur union de façade. Sidya tente de convaincre Cellou de le soutenir comme candidat unique de l’opposition. Le président de l’UFDG n’entend pas de cette oreille. Le divorce est inévitable.

Le patron de l’UFR rejoint le pouvoir non pas par amitié ou confiance au chef de l’État mais pour faire mal à son ancien allié à la présidentielle de 2010. Isolé, Cellou continue malgré tout à affronter tout seul le pouvoir. La velléité de modifier la constitution est une nouvelle aubaine pour voir à nouveau l’union de l’opposition. Mais certains, comme Lansana Kouyaté, savent que c’est peine perdue. Cellou et Sidya dénoncent le projet. Mais les deux hommes ne tardent pas à afficher au grand jour leur divergence. En cause, la décision de Cellou Dalein de participer à la présidentielle, alors qu’il avait boycotté les législatives.

Comme on le voit donc, ce que les trois hommes qui hantaient le pouvoir n’ont pas pu faire en dix ans, ils ne le feront pas aujourd’hui. Or, la situation plaide pour leur entente afin d’influencer les décisions du gouvernement. Mais, celui-ci peut désormais dormir tranquillement. Les anciens Premiers ministres qui ont donné tant de soucis au palais continuent à faire cavalier seul. Pour le plus grand bonheur d’Alpha Condé.

Habib Yembering Diallo pour Guineematin.com

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