Guinée : un pas de plus dans l’escalade

Cellou Dalein Diallo
Cellou Dalein Diallo

Après le débarquement de M. Cellou Dalein Diallo d’un avion et la confiscation de son passeport par la police, les réactions de fusent toute part. Et comme d’habitude, elles sont diamétralement opposées les unes aux autres. Pour les uns, en se soumettant aux injonctions de la police alors qu’il était déjà dans l’avion, le président de l’UFDG a fait preuve de faiblesse. Pour ces personnes, c’est une preuve de plus que celui qui se considère encore comme le nouvel élu de la dernière présidentielle n’est pas prêt à en découdre avec le régime. En revanche, pour les autres, le fait d’obtempérer, de descendre de l’avion et de remettre son passeport aux autorités, Cellou Dalein a, une nouvelle fois, montré qu’il est légaliste. 

Dans tous les cas, et après ce refoulement, les autorités ont franchi un pas supplémentaire dans la persécution de ce parti. Lequel a quatre cadres parmi les plus influents et plusieurs dizaines de militants en prison. À cela il faut ajouter la fermeture du siège du parti. Privant ainsi la première force politique du pays après le pouvoir de mener correctement ses activités politiques. 

Le moins que l’on puisse dire est que désormais on s’achemine vers le retour du monopartisme. D’autant plus qu’un acteur de premier plan vient d’indiquer que les oppositions ne sont pas adaptées à nos réalités. Ou du moins une opposition véritablement opposée au régime. Car l’auteur de ces propos lui-même vient de faire son entrée dans le cabinet du nouveau chef de file de l’opposition moins encombrant pour le pouvoir que l’ancien chef de file de l’opposition.

Pour revenir à la persécution de l’UFDG, le pouvoir avait déjà changé de stratégie et de méthode depuis la nomination de l’actuel Premier ministre. Lequel avait déclaré qu’il préfère l’ordre à la loi. Alpha Condé, auquel on reprochait d’être trop conciliant voire trop complaisant avec l’opposition, a changé à 180 à l’heure. Finis l’hésitation et le compromis. Le chef de l’Etat a sonné la fin de la récréation. Car même si certains accusent son entourage comme ils le faisaient au temps du président Conté, il y a des décisions qu’aucun proche n’ose prendre sans l’aval de son patron. 

Comme exactement entrer dans un avion prêt à décoller et extraire un opposant pour le débarquer comme un trafiquant de drogue. Même sans aucune preuve, logiquement l’entourage ne peut pas aller aussi loin. C’est autant dire que le président de la République a compris le message de tous ceux qui réclamaient à cor et à cri qu’il soit intraitable et implacable vis-à-vis de l’opposition. Mais une chose est répondre favorablement à cet appel. L’autre chose c’est de garder l’image d’un démocrate élu et réélu par son peuple. Car, la Démocratie oblige les démocrates d’avoir un pouvoir et une opposition. L’un sans l’autre ce n’est plus la démocratie. C’est la dictature. 

Or, même si le chef de l’Etat fait semblant d’être peu ou pas du tout soucieux de l’image et de l’héritage qu’il va laisser, il devrait faire en sorte qu’il y ait une différence entre le règne d’un élu qu’il est et celui d’un putschiste que furent deux de ses prédécesseurs. C’est vrai qu’après la modification de la constitution la Guinée a rejoint le club des Etats peu respectueux des principes démocratiques. Mais, elle n’est pas le seul pays à avoir modifié la constitution. La Côte d’Ivoire l’a fait aussi. Malgré tout, et après avoir obtenu ce qu’il voulait, le président ivoirien a préféré manier la carotte à la place du bâton. 

A l’opposé de la Côte d’Ivoire, la Guinée, elle, harcèle l’opposition. Elle veut la faire disparaître. Oubliant qu’on n’est jamais aussi fragile que quand on pense être fort. 

Habib Yembering Diallo pour Guineematin.com

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