Les mots et les maux du gouverneur

Habib Yembering Diallo
Habib Yembering Diallo

Cher ami,

Sachant que tu suis de très près tout ce qui se passe dans notre pays, tu as dû suivre les récents évènements qui se sont déroulés dans notre pays. Et plus précisément dans la région relevant de ma sphère géopolitique. C’est qui a suscité la levée de boucliers c’est l’interdiction d’effectuer les prières nocturnes pendant les dix derniers jours du mois de Ramadan. Cette décision a déchainé les passions. Suscitant la protestation et la contestation des fidèles. Lesquels ont tout de même dépassé les limites. Selon un de mes préfets, certains manifestants de sa localité avaient de fusils.

Alors que dans d’autres régions la pilule d’interdiction été facilement avalée, alors la mienne était censée accepter facilement cette interdiction, nous avons été surpris par la réaction des citoyens. Ce que j’ai vu m’a rappelé l’adage selon lequel « qui aime bien châtie bien ». Que la région qui constitue le fief incontestable du pouvoir soit en ébullition, et à cause d’une décision relative à la religion, c’était le moins attendu du monde. D’où le soupçon qu’il y a une nouvelle fois des causes inavouables dans cette contestation.

Mais ce n’est pas cela qui m’intéresse ici. Ce qui m’intéresse c’est le mauvais sort qui semble me suivre comme mon ombre. En effet, il est incompressible que je sois à nouveau confronté à une situation comme celle que je traverse depuis quelques jours. Après mon départ du fief de l’opposition pour celui du pouvoir, les miens ont estimé que c’était la fin de la traversée du désert pour moi. Tous étaient soulagés que je sorte indemne de cette région. Au figuré comme  au propre.

Mais le destin étant ce qu’il est, voilà que, contre toute attente, je suis à nouveau confronté à une contestation populaire. Non pas contre ma modeste personne. Mais contre mon patron. Ou plus exactement le patron de mon patron. Car je n’ai pas la prétention d’être directement lié au grand patron. Entre lui et moi il y a un intermédiaire. Mais encore une fois ce n’est pas cala qui constitue l’objet de cette lettre.

Un ami, très préoccupé par ma situation, me suggère de voir si les ennemis ne pas derrière cette situation. Tu conviendras avec nous qu’il y a lieu de s’inquiéter. Si une protestation était possible voire inévitable quand j’étais en zone hostile rien ne présageait ce qui se passe aujourd’hui. Et c’est là que mon ami a vu un complot occulte.

Malgré cette situation inconfortable, je dois avouer qu’il est plus facile de gérer une contestation en zone favorable qu’en zone hostile. Je ne t’apprends rien en te disant que si c’était là où j’étais que de telles contestations ont eu lieu, la situation aurait pris une autre tournure. Si ce qui vient de se passer ici s’était passé là-bas, j’aurais été le premier à crier au fanatisme, à l’intégrisme et même au djihadisme. Même si je n’avais pas la conviction j’aurais été obligé de le faire pour sauver mon poste voire ma tête.

Heureusement que durant mon séjour là-bas, le pire été évité. Même si de temps en temps j’ai été confronté à une situation similaire, elle n’a jamais pris une ampleur non maitrisable.

Je souhaite donc que tu m’aides. Dans un premier temps à calmer le jeu. Pour persuader les nôtres qu’ils ne doivent pas jouer le jeu de nos adversaires. Organiser tous les jours des contestations dans cette région revient à donner raison aux autres. Dans un deuxième temps, m’aider à voir si les ennemis ne sont pas derrière. Tu me diras que ce n’est moi qui suis visé

C’est pour cette raison que je souhaite ton implication afin que ces manifestations et protestations prennent fin. Surtout celles relatives à la religion. Cela n’honore pas notre région. D’autant plus qu’il y un précédent. Comme celui de ce monsieur qui prétend prier dans sa langue. Tout cela jette un discrédit sur nous. Il est donc souhaitable d’organiser des sensibilisations pour qu’une fois pour toutes cette région retrouve son calme et sa sérénité d’antan.

Pour y arriver, je sais compter sur toi. Même si tu diras que ce calme et cette sérénité, auxquels j’appelle de tous mes vœux, me profitent ils profiteront aussi à toute la région. Une région qui doit être un havre de paix après avoir été un véritable enfer.

Pour terminer, je te prie de garder le contenu de cette correspondance strictement confidentiel.

Toute ressemblance entre cette histoire et une autre n’est que pure coïncidence.

Habib Yembering Diallo, joignable au 664 27 27 47.

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