Me Traoré sur le dossier des détenus politiques : « on est arrivés au bout de nos efforts »

Etienne Soropogui, président du parti « Nos Valeurs Communes »

C’est à la fois un aveu d’impuissance et une interpellation de l’opinion nationale et internationale que Me Mohamed Traoré a fait dans un entretien qu’il a accordé à Guineematin.com hier, samedi 24 juillet 2021. Il a laissé entendre que les avocats des opposants détenus à Conakry sont au bout de leurs efforts sans pouvoir faire évoluer positivement le dossier.

Depuis la libération conditionnelle de Chérif Bah, Ousmane Gaoual Diallo, Cellou Baldé et Abdoulaye Bah, tous des responsables de l’UFDG (le principal parti de l’opposition guinéenne), les attentions sont de moins en moins focalisées sur le dossier des détenus politiques en Guinée. Pourtant, plusieurs opposants au 3ème mandat du président Alpha Condé, dont Etienne Soropogui (président du mouvement Nos Valeurs Communes), Kéamou Bogola Haba (président d’honneur du parti UGDD), Foniké Menguè (responsable des antennes et de la mobilisation du FNDC) et tant d’autres, sont toujours détenus, la plupart sans jugement, à la Maison centrale de Conakry. Et, malheureusement, même leurs conseils n’ont aucune lisibilité sur la procédure les concernant, annonce Me Mohamed Traoré, membre du collectif d’avocats qui défend ces détenus politiques.

Me Mohamed Traoré

« En tant qu’avocat, je ne peux pas vous dire aujourd’hui à quel niveau se situe le dossier de ces détenus politiques. Dans un dossier qui est plus politique que judiciaire, le rôle de l’avocat est très réduit. Le silence autour du dossier est la conséquence justement de la politisation à outrance de ce dossier. Aujourd’hui, tout dépend de la volonté du chef, ce n’est pas lié à la procédure. Tout ce qui est pris comme mesures, concernant la libération des détenus, concernant la conduite même de la procédure, ne semble pas maîtrisé par les magistrats qui sont chargés du dossier. C’est pourquoi, à un moment donné, j’ai même dit que le procureur de la République lui-même ne maîtrisait pas le calendrier de cette affaire. Il y a une sorte de mainmise sur ce dossier de telle sorte que même nous avocats, on n’a aucune lisibilité sur le déroulement de la procédure. C’est désolant mais c’est cela la réalité », explique l’avocat.

Selon lui, les avocats de la défense sont aujourd’hui au bout de leurs avocats dans ce dossier. C’est pourquoi, il estime que la mobilisation de tout le monde est nécessaire pour faire évoluer positivement cette affaire. « Aujourd’hui, il faut la mobilisation de toutes les personnes éprises de justice, que ça soit au plan interne, que ça soit au plan international. En tout cas, nous avocats, on est arrivés au bout de nos efforts. Nous faisons des dénonciations, des points de presse et beaucoup de choses pour alerter l’opinion nationale et internationale mais malheureusement, nos efforts semblent être infructueux jusqu’à présent.

Et ce que je regrette le plus, c’est que les gens se contentent de demander la clémence du président de la République alors que les personnes qui sont détenues ont plus besoin de justice, ont plus besoin de vérité que de clémence. Parce que la clémence voudrait dire dans une certaine mesure qu’ils sont déjà coupables des faits qui leur sont reprochés, alors qu’il n’en est rien. Je pense que les démocrates de ce pays, les personnes éprises de paix et de justice, au lieu de parler de clémence, devraient œuvrer plutôt à ce que ce procès s’ouvre rapidement pour que ces personnes puissent s’exprimer par rapport à ce qu’on leur reproche. Mais, parler simplement de clémence, de grâce alors qu’on n’est même pas dans un procès d’abord, je pense que c’est totalement déplacé », a dit Me Mohamed Traoré.

Alpha Assia Baldé pour Guineematin.com

Tél : 622 68 00 41

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