Plus que Coronavirus, la crise malienne contamine la Haute Guinée

Encore une fois, la contestation vient de là où elle était la moins attendue du monde. Après Kankan, ce fut tour de Siguiri de battre le pavé hier, mardi 14 juillet 2020. Les jeunes ont brandi pancartes et banderoles. Avec un contenu qui, autrefois, aurait été assimilé à un sacrilège. Parce que hostile au leader du RPG.

Que Kankan manifeste, on peut à la limite comprendre. C’est la ville dont sont originaires certains opposants à l’actuel régime, comme Ousmane Kaba ou Lansana Kouyaté. Mais que Siguiri proteste contre le RPG et son leader, c’est tout un symbole. L’expression d’une déception qui est aujourd’hui à la dimension de l’espoir d’hier.

Selon certaines informations, les grognards seraient allés plus loin qu’une simple revendication pour de meilleures conditions de vie. Si ces informations sont confirmées, la Haute Guinée pourrait devenir au régime actuel ce que la place Tahrir fut pour le régime de Ben Ali en Tunisie. C’est véritablement un séisme politique.

Le régime guinéen s’est pris à son propre piège. Il a sous-estimé la maturité des citoyens de ce pays. Et plus particulièrement ceux de la Haute Guinée. Il s’est trompé. Et lourdement. A l’heure des réseaux sociaux, les jeunes savent ce qui se passe sous d’autres cieux. Et pour Kankan et Siguiri en particulier, ils observent avec intérêt les événements en cours de l’autre côté de la frontière, à Bamako.

Contrairement au discours qu’on leur a toujours tenu dans cette région, ils savent qu’au Mali voisin, il ne s’agit nullement d’une région contre une autre. Encore moins une ethnie contre une autre. Ils savent qu’Ibrahima Boubacar Keïta est combattu par les « siens ». De par les informations qu’ils reçoivent de Bamako, ils savent que ce n’est pas une partie du peuple malien qui s’est révoltée. C’est tout le peuple. Cette crise, qui prévaut tout près, a dû inspirer la jeunesse de la Haute Guinée. Si ce n’est toute la jeunesse guinéenne.

Le régime guinéen se passerait bien volontiers de ce qui se passe actuellement au Mali. Plus qu’Ebola ou Coronavirus, cette crise est en train de contaminer la région limitrophe. Et à un moment où l’opposition et le FNDC veulent emboîter le pas à l’opposition et au mouvement social maliens. On pourrait donc assister, le 20 juillet prochain, à des manifestations tous azimuts, à la fois à l’Est et à l’Ouest du pays.

Devant cette perspective anxiogène pour Sékoutouréya, celui-ci tente de colmater les brèches en envoyant quelques groupes électrogènes en Haute Guinée. Mais, comme dit l’adage, « Quand le soleil est au Zénith, on ne peut pas l’éclipser avec la paume de la main ». Le pays et la région ressemblent à une tenue complètement usée. Quand on coud d’un côté, elle se déchire de l’autre. Si on peut régler les problèmes d’électricité par des groupes électrogènes, il n’en est pas de même pour l’eau. Et que de dire des routes ? Surtout en cette saison des pluies.

Sauf miracle donc, on ne peut pas régler tous les problèmes auxquels cette région, comme toutes les autres, est confrontée. Malheureusement pour Sékoutouréyah, il n’existe pas de miracle en matière de développement. Ce qui n’a pas été fait depuis 10 ans le sera difficilement d’ici octobre. Or, les résultats de cette échéance se jouent maintenant. Et, plus précisément en Haute Guinée.

Habib Yembering Diallo pour guineematin.com

Tél. : 664 27 27 47

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