Quand un duel entre deux Condé à Conakry rappelle un autre entre deux Sall à Dakar

Ismaël Condé, premier Vice-Maire de Matam et membre du Bureau Exécutif de l’UFDG
Ismaël Condé, premier Vice-Maire de Matam et désormais membre du Bureau Exécutif de l’UFDG

Depuis près d’une décennie, les deux principaux partis politiques guinéens se livrent à une lutte sans merci pour débaucher leurs responsables et militants. Mais jusqu’ici, ce sont les plus souvent de simples militants –autoproclamés communicants de ces partis- qui quittent un parti pour rejoindre un autre. Les poids lourds s’abstiennent de se livrer à ce jeu. A l’exception d’Alhoussainy Makanera Kaké, les autres transfuges sont tous ou presque des militants de second rang.

C’est pourquoi, leur départ et ou leur arrivée ne fait parfois ni chaud ni froid dans les états-majors politiques. En revanche, le départ d’un responsable de haut niveau ne laisse personne indifférent. Et cela pour deux raisons au moins. Contrairement à un militant, qui applaudit, un responsable réfléchit. Son départ a un impact sur la stratégie du parti. La deuxième raison est qu’il apporte une valeur ajoutée au parti qu’il rejoint.

C’est compte tenu de tous ces aspects que le RPG arc-en-ciel n’a pas digéré le départ d’Ismail Condé. Encore que s’il quittait le navire pour rejoindre un autre parti susceptible de ne jamais remplacer le leader du RPG au palais, la pilule aurait été moins difficile à avaler. Mais, il a fait exactement ce que ses anciens collègues craignaient le plus. En quittant son parti il lui porte un coup dur. Mais, en adhérant à son principal concurrent, il le poignarde en plein cœur. D’où ses ennuis actuels.

L’observateur le moins averti savait que les déclarations faites par M. Condé et largement relayées par les médias traditionnels et les réseaux sociaux ne resteraient pas « impunis ». Même si ces déclarations étaient un secret de polichinelle, qu’elles sortent de la bouche d’un haut responsable, elles ont mis à nue les pratiques peu orthodoxes du RPG. A savoir que le parti ne se contente pas de faire campagne sur ce qu’il veut et peut faire pour les Guinéens. Il le fait pour discréditer voire diaboliser son adversaire.

Dire que l’UFDG fait peur en Haute Guinée parce que les militants de son adversaire ont été formés pour inculquer cela dans la tête des gens était déjà une révélation peu confortable. Mais, ajouter qu’il va s’atteler au « lavage » de cerveaux pour extraire ces préjugés de la tête de ceux à qui son nouveau parti fait peur, était le comble pour le parti au pouvoir. Pour la première fois, le RPG a senti toute la capacité de nuisance d’un partant. Dès lors, même Toto comprend les ennuis de M. Condé. Sans toutefois les justifier.

La police reprocherait M. Condé d’escroquerie. Il aura fallu qu’il quitte le parti au pouvoir pour que, subitement, la police et la justice lorgnent dans sa gestion. Comme l’a dit l’intéressé lui-même, ses ennuis visent à le faire taire. Jouera-t-il le jeu ou résistera-t-il ? Les jours à venir nous apporteront la réponse. En attendant, cette affaire est la preuve, s’il en était besoin, que le patronyme n’a rien à avoir avec la politique. Autant un Condé peut être persécuté, autant un Diallo peut être protégé. Selon qu’ils soient partisans ou opposants.

L’opposition d’Ismaël Condé à Alpha Condé n’est pas sans rappeler le duel sans merci entre Macky Sall et Khalifa Sall au Sénégal voisin. C’est cela la démocratie. Par contre, chercher des poux dans la tête d’un homme parce que tout simplement il a quitté votre parti pour adhérer à un autre est aux antipodes de la démocratie et de l’Etat de droit.

Habib Yembering Diallo pour Guineematin.com

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