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Incarcération d’Oustaz Taïbou Bah : « c’est un acharnement », dénonce son avocat

Comme annoncé dans nos précédentes publications, le prédicateur islamique, Oustaz Mamadou Taïbou Bah, a été incarcéré de nouveau à la maison centrale de Conakry. Il est cette-fois accusé par le cambiste Thierno Nouhou Diallo de « charlatanisme ».

Rencontré samedi dernier, 08 janvier 2022, Me Thierno Ibrahima Barry, avocat de Oustaz Taïbou Bah a dénoncé un acharnement contre son client. Il a aussi promis de se battre pour obtenir sa libération. Lisez !

Guineematin.com : Oustaz Taïbou Bah de nouveau emprisonné à la maison centrale de Conakry. Expliquez-nous ce qui s’est passé ?

Me Thierno Ibrahima Barry : en fait, c’est une nouvelle plainte pour charlatanisme qui a été toujours portée par la même personne qui le suit depuis 2017. C’est-à-dire, c’est par rapport à la procédure de 2017. Le plaignant a perdu le procès jusqu’à la Cour suprême.

Guineematin.com : ce plaignant c’est qui ?

Me Thierno Ibrahima Barry : c’est Thierno Nouhou Diallo qui se dit cambiste. Donc, par rapport à cette procédure d’escroquerie, il a perdu jusqu’à la Cour suprême. Après avoir perdu sur le plan pénal, il est encore revenu porter la même demande au civil. Là, également, par rapport à la décision qui a été rendue en instance, sa demande de paiement a été rejetée et il a été condamné à payer 50 millions de francs guinéens à titre de dommage et intérêt à monsieur Taïbou Bah. Je pense que c’est parce qu’il n’est pas content de tout ça qu’il cherche à emmerder mon client. Parce que la procédure telle qu’elle a été initiée, je pense que l’objectif recherché ce n’est pas pour recouvrer quelque chose ou être rétabli dans son droit. C’est juste humilier mon client tout simplement. Vous imaginez, par exemple, par rapport à cette plainte, il (Oustaz Taïbou Bah ; ndlr) n’a reçu aucune convocation de la part des agents d’enquêtes préliminaires. Ce sont des pickups qui sont allés le prendre Manu militari, ce qui est contraire à la procédure, et il  été gardé pendant 24 heures. Au niveau de l’unité de la gendarmerie qui assurait l’enquête préliminaire, on lui a fait une proposition de règlement. De reconnaître qu’il reste devoir à monsieur (Thierno Nouhou) les 8 milliards comme ça et on abandonne la plainte de charlatanisme. Il leur a dit que par rapport à la procédure des 8 milliards, il y a déjà des décisions, je ne vais pas reconnaître ça. Ils disent bon, comme tu ne reconnais pas pour qu’on fasse un plan de paiement, comme ça on te défère. Il a dit : il n’y a pas de problème, il faut me déférer. Voilà comment il s’est retrouvé encore à la maison centrale. C’est parce qu’il a refusé de reconnaître les 8 milliards. Donc, moi je pense que c’est un acharnement médiatique et judiciaire. Sinon, même par rapport au charlatanisme, je ne vois pas. Moi, quand je m’en tiens à la définition que la loi donne au charlatanisme, je ne vois pas ce qu’on lui reproche. Parce que le seul élément de preuve que la partie civile détient, c’est un élément sonore, une conversation qui aurait eu lieu entre monsieur Bah et un certain Abdoulaye Diallo. Ce n’est même pas entre lui et monsieur Nouhou. Et vous savez, la loi punit de 2 ans de prison quelqu’un qui met une personne sur écoute sans qu’il ne le sache. Seul le juge d’instruction est permis de le faire. Donc, quand ils l’ont interpellé, moi-même j’ai porté plainte contre monsieur (Thierno Nouhou) au niveau de la même unité de gendarmerie pour violation de la vie privée, en application de l’article 385 alinéa 1 du Code pénal et pour diffamation. Mais, à ma grande surprise, seule sa plainte a été examinée et on a déféré mon client. Je me suis dit que ce n’est pas une procédure judiciaire, que c’est juste un acharnement juste pour chercher à humilier le monsieur (Oustaz Taïbou). Je vais me battre jusqu’à ce qu’il obtienne sa liberté, qu’il soit rétabli dans ses droits et que son honneur soit lavé. Ça au moins, vous pouvez en être sûr.

Guineematin.com : est-ce que vous reconnaissez quand-même que c’est sa voix qui est sur l’audio qui a circulé ?

Me Thierno Ibrahima Barry : je ne l’ai jamais écouté. J’ai entendu les gens parler. A supposer que ça soit sa voix ; mais, par exemple, la personne avec laquelle il a convergé dans cette audio a elle-même été condamnée pour escroquerie par le tribunal. Donc, vous voyez un délinquant qui met quelqu’un sur écoute, une autre personne prend cette audio pour servir de preuve et porter plainte. Vous trouvez cela normal ? Et, tout le monde ferme les yeux parce que tout simplement il faut l’amener en prison. Moi, je n’accepterai pas cela, parce que j’ai compris que ce n’est plus un problème d’argent, ni un problème de droit à protéger, c’est juste pour l’humilier. Sinon, la procédure  pénale est claire. Quand il y a une infraction, on envoie une convocation une fois, deux fois, quand l’intéressé ne vient pas, le procureur peut donner des instructions à des argents pour aller t’arrêter par des réquisitions. Mais, on ne le convoque pas, on envoie deux pickups de gendarmerie pour l’arrêter comme si c’était un criminel et pour un délit en plus. Donc, ce n’est plus un problème de justice ; mais, un acharnement.

Guineematin.com : en dehors de cette arrestation sans convocation, est-ce que vous aviez pu l’assister pendant son audition à la brigade de recherche de Kipé ?

Me Thierno Ibrahima Barry : Non ! Il a été arrêté le 05 janvier. Au moment où je venais, on l’avait déjà écouté. Donc, je n’avais pas assisté à son audition. Mais, quand j’ai compris cela, j’ai aussi porté plainte. Parce qu’encore une fois, le seul élément de preuve que celui qui a porté plainte contre lui a c’est cet élément sonore obtenu par un délinquant qui a été condamné par le tribunal de Kindia pour escroquerie. Donc, moi je ne peux pas comprendre que des magistrats acceptent de tels éléments de preuve pour envoyer quelqu’un en prison, surtout que c’est une personne respectable. Il a une adresse connue, des avocats. Il n’y avait pas de raison. C’est-à-dire c’est en violation de l’article 235 du Code de procédure pénale qu’on l’a mis en prison. Parce qu’on ne met quelqu’un en prison que quand c’est nécessaire. J’ai vu sur l’ordonnance de placement sous contrôle judiciaire, c’est pour éviter des collisions avec des gens. Mais, il n’y a pas de collisions possibles, parce que l’élément qui constitue la preuve est déjà dans le dossier. Donc, il n’y a pas de collision. Je ne sais pas avec qui il va parler pour qu’on parle de collision. Et puis, on dit qu’il n’a pas été représenté ; mais, c’est des histoires, il y avait un avocat. C’est une personne respectable et connue dans le monde, je ne vois pas pourquoi il va fuir des choses comme ça. Et, nous, on est prêt à nous défendre, parce que de toutes les façons les faits de charlatanisme ne tiennent pas.

Guineematin.com : vous vous contentez de l’infraction ‘’charlatanisme’’ ; mais à côté, certains ajoutent aussi les faits de ‘’menace de mort’’. Qu’en pensez-vous ?

Me Thierno Ibrahima Barry : moi, je m’en tiens à l’infraction visée dans l’ordonnance de placement en détention provisoire.

Guineematin.com : vous avez cette ordonnance ?

Me Thierno Ibrahima Barry : j’ai la copie. Ce que je vois viser : ‘’inculpé de charlatanisme’’. Je ne vois nulle part où c’est écrit menace. Et puis, même si on veut rectifier le tir pour dire menace, je ne vois pas. C’est toujours avec le même élément sonore. C’est-à-dire, le problème qui se pose dans ce dossier, l’élément qui sert de preuve a été obtenu illégalement. Est-ce qu’une preuve obtenue illégalement peut valoir en justice ? C’est toute la question de ce dossier.

Guineematin.com : vous dites que les affaires judiciaires sont les preuves et vous dites qu’à la brigade de recherche on aurait demandé à votre client de négocier. Est-ce que vous aussi vous avez les preuves sur ces accusations ?

Me Thierno Ibrahima Barry : ce ne sont pas des accusations, c’est la vérité. Parce que la dernière fois quand je suis allé, on m’a dit : on va négocier et moi je ne connaissais pas les termes de la négociation. C’est mon client qui a dit qu’on lui a proposé de reconnaître les 8 milliards et de faire un plan de paiement, il (Thierno Nouhou Diallo : ndlr) va abandonner la plainte. Ça, c’est mon client qui me l’a dit et je reconnais que j’étais allé, entre le 05 ou le 06, et on m’avait dit qu’il y a une négociation qui est entamée ; mais, les termes de la négociation, je ne les connaissais pas. Le vendredi, la journée, ils l’ont appelé, puisque c’est ce qu’il m’a dit, et on lui a proposé de reconnaître les 8 milliards et faire un plan de paiement comme ça ils vont abandonner la plainte. Ça, c’est lui qui me l’a dit.

Guineematin.com : mais, les gens qui vous ont parlé de cette négociation, ce sont les responsables de la brigade de recherche ?

Me Thierno Ibrahima Barry : Non ! C’est lui (Oustaz Taïbou Bah : ndlr) qui m’a dit qu’ils lui ont proposé un règlement à l’amiable.

Guineematin.com : vous avez dit quand vous avez été, on vous a parlé des négociations en cours…

Me Thierno Ibrahima Barry : Non ! Moi, personnellement,  je n’ai pas parlé de ça avec les enquêteurs. Tout ce que je vous dis-là, c’est ce que je tiens de mon client. Il m’a dit quand je suis allé lui rendre visite, je pense que son beau-frère est venu, ils ont parlé des choses comme ça et qu’il y avait une négociation en cours. Mais, moi je ne pouvais jamais imaginer que cette négociation, si en tout cas ce qu’il m’a dit c’est la vérité, portait à ce qu’il reconnaisse les 8 milliards sur lesquels il y a eu déjà des décisions de justice qui ont été rendues. Pourquoi reconnaître ça ?

Guineematin.com : aujourd’hui votre client est en prison. Qu’est-ce qui va se passer ou risque de se passer ?

Me Thierno Ibrahima Barry : je veux me battre pour qu’il sorte de là, monsieur. Parce qu’il est illégalement détenu. Ça, au moins c’est sûr. Il est détenu parce que des personnes tapies dans l’ombre veulent qu’il reste là-bas. C’est malheureux, mais c’est ça la vérité. Je ne veux pas citer des noms ; mais, je connais des noms qui veulent en finir avec lui. Mais, je ne veux pas me laisser faire, ils vont me trouver sur leur chemin.

Guineematin.com : de nos jours, le dossier se trouve à quel niveau ?

Me Thierno Ibrahima Barry : c’est au niveau du cabinet d’instruction. Il a été mis sous mandat de dépôt hier et dès lundi, je vais mettre des procédures en cours pour essayer d’obtenir sa liberté, ne serait-ce que provisoire. Parce que moi je tiens, je vous le dis, à ce que cette procédure soit instruite jusqu’à la fin pour que les gens sachent ce qui s’est réellement passé. C’est ce qui est le plus important et non ce qui se dit dans les médias. C’est le résultat de l’enquête faite par la justice qui est importante. Nous, nous vous donnons des décisions qui justifient que sa plainte a été rejetée par rapport à ces 8 milliards. Maintenant, qu’il a porté plainte pour charlatanisme, là aussi on souhaite qu’il y ait une solution judiciaire.

Guineematin.com : donc des débats contradictoires ?

Me Thierno Ibrahima Barry : Oui ! Des débats contradictoires ? Je tiens à ça. Parce que pour moi, quand on a parlé de négociation, c’était qu’il allait retirer sa plainte et que moi aussi j’allais retirer la mienne. C’est dans ce cadre que j’ai pensé et j’ai dit : bon, négociez. Mais, quand il m’a dit que la négociation qu’ils ont proposé c’est de reconnaître qu’il doit 8 milliards et qu’il fasse un plan de paiement ils vont abandonner la plainte, j’ai dit : non. Heureusement que tu n’as pas reconnu et il (Oustaz Taïbou) a dit : maître, je ne peux pas le faire. De 2016 jusqu’à 2020, on a fait une procédure par rapport à ces 8 milliards et il y  eu des décisions de justice jusqu’à la Cour suprême qui a statué sur ça, il (Thierno Nouhou) est revenu au civil en instance, il a perdu et a même été condamné à 100 millions à titre de dommage et intérêt pour avoir porté inutilement plainte contre eux par rapport aux 8 milliards. Non content, il est encore revenu au civil. Là aussi, il a rejeté sa demande de paiement et il a été condamné à les payer 50 millions de francs à titre de dommage et intérêt. Mais, là, il ne va jamais dire ça dans la presse. C’est ça le problème.

Guineematin.com : entre les deux plaintes, laquelle a été déposée en premier ? Est-ce que c’est après l’interpellation de votre client que vous aussi vous avez porté plainte ou bien c’est avant ?

Me Thierno Ibrahima Barry : quand j’ai compris qu’il a porté plainte pour charlatanisme et que la preuve qu’il a c’est l’audio que j’ai entendu parler, sachant que cet élément est obtenu en violation de la loi, moi aussi j’ai porté plainte devant la même gendarmerie avec décharge. Pour moi, ils allaient instruire les deux avant de déférer. Mais, on laisse ma plainte de côté et on instruit l’autre, parce que l’objectif recherché c’était qu’il aille en prison.

Guineematin.com : vous pensez que la brigade de recherche peut-être complice de ça ?

Me Thierno Ibrahima Barry : Non ! Ils ont fait leur boulot. Selon ce que j’ai appris, même sa plainte, c’est le procureur qui l’a transmise. C’est-à-dire qu’il a porté plainte au niveau du parquet et le parquet a transmis la plainte au niveau de la brigade pour enquêtes préliminaires et PV. Eux, ils ont fait leur boulot ; et, donc, je ne peux pas dire qu’ils sont complices. Maintenant qu’ils refusent, surtout que les deux faits sont connexes, qu’ils n’entendent pas le monsieur (Thierno Nouhou) par rapport à ma plainte pour diffamation, qu’on n’en fasse pas cas dans le PV qu’ils ont déféré, franchement, c’est là où je n’ai rien compris.  

Interview réalisée et décryptée par Alpha Assia Baldé pour Guineeamatin.com

Tél : 622 68 00 41

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