Procès du 28 septembre : Elhadj Nouhou Barry dit avoir perdu 4 dents et réclame 8 milliards GNF

Une autre victime est à la barre du tribunal criminel de Dixinn délocalisé à la Cour d’appel de Conakry ce lundi, 17 avril 2023. Il s’agit d’Elhadj Nouhou Barry qui dit avoir perdu son Grand-frère Amadou Oury dans le massacre perpétré contre les civils au stade de Conakry sous le régime du CNDD. À la barre, le plaignant a également déclaré avoir reçu des coups et blessures de la part des bérets rouge, perdant 4 dents et ayant un bras cassé. Il réclame la somme de 8 milliards de francs guinéens en guise de dédommagement, a constaté sur place Guineematin.com à travers un de ses journalistes.

Décryptage du passage d’Elhadj Nouhou Barry à la barre :

Elhadj Nouhou Barry, victime du massacre 28 septembre 2009

« Le matin du 28 septembre 2009, moi Elhadj Nouhou Barry ; mon Grand-frère, Amadou Oury Barry ; Ibrahima, le fils à mon Grand-frère ; et Abdoulaye Baïlo, l’enfant à ma grande sœur, nous nous sommes levés à 6h du matin pour venir assister au meeting au stade du 28 septembre. Quand on a bougé, on est descendu à Kénien. On était tous à jeun pour les 6 jours du mois de Ramadan. Quand nous sommes arrivés au stade à 9h 30, la porte était ouverte et nous sommes rentrés au stade. Mon Grand-frère Amadou Oury était âgé de 90 ans. Nous sommes montés au niveau des tribunes. Les leaders étaient un peu en haut et nous nous étions en bas. L’ambiance était bon enfant. On était avec Ibrahima.

Entre 10 heures et 11 heures, ils ont commencé à tirer. Mon frère a dit : Qu’est-ce qu’on va faire ? Chacun n’a qu’à se sauver. J’ai tourné la tête et j’ai trouvé qu’on bastonnait les leaders. Ceux qui bastonnaient les leaders, j’ai vu des gens qui portaient des maillots de Chelsea et des cauris sur leurs têtes. Mon Grand-frère m’a dit : ne me laisse pas ici parce que je ne suis pas très jeune. On s’est débrouillé jusqu’à ce qu’on soit sorti du stade. Quand on est sorti, on a vu les bérets rouges arriver. On a cherché à se sauver vers le Marocana. On a trouvé que les bérets rouges avaient tiré sur un fil électrique. Tous ceux qui venaient toucher le fil mourraient. Nous nous sommes retournés.

J’étais devant et mon grand frère était derrière. Nous sommes venus de l’autre côté du stade, il y avait beaucoup de trous là-bas. On patinait dans ça. C’est en ce moment qu’ils ont tiré sur lui. Après, il s’est assis. Il disait : ils ont tiré sur moi. Ils l’ont tiré sur le pied et la poitrine. Moi aussi je me suis couché là-bas pour ne pas qu’on tire sur moi. Je me suis fait passer pour mort.

Après ça, j’ai eu l’intention de tirer le corps de mon Grand-frère. Les gendarmes sont venus me trouver là-bas, j’ai donné mon téléphone à un d’entre eux, je lui ai dit aide-moi. C’est là que les bérets rouges sont arrivés. Ils m’ont bastonné là-bas, ils ont cassé mon bras, ils m’ont arraché 4 dents. J’ai des preuves ici. J’avais perdu un peu conscience sur place. Ce sont les agents de la croix rouge qui sont venus me chercher pour m’envoyer à l’hôpital Donka. C’est à 18h que je me suis réveillé. Mais, les militaires sont partis là-bas saccager. Ils avaient l’intention de nous arrêter tous. Ils ont arrêté beaucoup de personnes là-bas aussi. À l’hôpital Donka, il y avait quelqu’un qui avait un téléphone, je lui ai demandé de composer le numéro d’un autre grand-frère en famille en leur annonçant qu’Amadou Oury est décédé. La famille est venue me rejoindre à l’hôpital. On a cherché le corps de mon frère qu’on n’a pas vu.

Les bérets rouges sont arrivés à Donka et ils ont embarqué d’autres personnes. J’ai dit à ma famille que je ne peux pas rester à l’hôpital Donka ici. De là-bas, ma famille m’a pris pour m’envoyer à la clinique « Mère et Enfants » où j’ai fait 7 mois. Quand je suis sorti de là, je suis retombé malade. Pour porter plainte, nous sommes venus à la Villa 31. Après, on a été à l’hôpital. Pour une deuxième hospitalisation, j’ai été alité un an six mois. Beaucoup de victimes m’ont trouvé là-bas et elles sont mortes, d’autres sont devenues handicapées.

Jusque-là, je n’ai pas recouvré toute ma santé. Je demande au tribunal et à toute bonne volonté de m’aider. Je suis content du tribunal, je demande à ce que Dieu fasse que la vérité triomphe sur le mensonge. Mon Grand-frère Amadou Oury, son corps a disparu. J’ai la photo de son corps. C’est tout ce que je peux dire dans cette affaire. Puisque c’est le président Dadis qui était à la tête du pays, c’est lui que j’accuse ; et je demande un dédommagement de 8 milliards de francs guinéens… ».

Propos recueillis par Mohamed Doré pour Guineematin.com

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