Mafara (Dalaba) : à la découverte de l’arbre fruitier, symbole de réputation, et de la mosquée de Niogo

Elhadj Amadou Talibé Diallo, sage de Niogo missidé, Mafara

La mosquée de Niogo, située dans la commune rurale de Mafara, relevant de la préfecture de Dalaba, est l’une des plus anciennes dans l’histoire du Fouta Djallon. Elle a été fondée par trois familles après les mosquées de Timbo, Bhouria, Fougoumba et Dondé. Ce lieu de culte est caractérisé par la présence d’un arbre fruitier (le corossol) sous lequel plusieurs fidèles musulmans viennent se prosterner, faire des prières, des sacrifices, des bénédictions et autres afin d’obtenir gain de cause. Tel est le constat fait sur place par Guineematin.com à travers son envoyé spécial.

Elhadj Amadou Talibé Diallo, sage de Niogo centre, âgé de 98 ans, interrogé par notre reporter, est revenu sur l’histoire de cette mosquée. « Cette mosquée a été fondée après la bataille de Talansan (1726, ndlr), dans l’histoire du Fouta Djallon. Il y a eu la création des mosquées de Timbo, de Bhouria, de Fougoumba, puis la mosquée de Dondé.  Deux ans après la mosquée de Dondé, celle de Niogo a été aussi créée. Il y a 3 familles qui se sont rencontrées ici pour fonder cette mosquée. Une famille de Yillâbhé, Alilâbhé et celle de Dianbouriyâbhé.

A l’époque, il n’y avait ni moto, ni véhicule. Les briques ont été confectionnées à distance. Ce sont les gens qui se sont mis en rang pour transporter les briques. Chacun donne une brique au plus proche et ainsi de suite jusqu’à la destination. Après la construction de la mosquée, il y a trois portes qui ont été installées pour les trois familles. Une porte pour la famille Dianbouriyâbhé, une porte pour la famille Alilâbhé et une porte pour la famille Yillâbhé. Dans cette maison de Dieu se trouve implantée un arbre fruitier communément appelé Sopsop « Doukounméhoun » en Pular (le Corossol) qui constitue un symbole. Cette plante a fait plus de trois siècles. On l’a trouvé comme ça. C’est devenu un lieu de culte pour la localité, le Missidé. C’est ici qu’on se mobilise pour implorer la grâce divine », a expliqué le vieil homme.

Poursuivant, Elhadj Amadou Talibé Diallo a expliqué que les péripéties que le village de Niogo a connu pendant son évolution. « En 1933, la plupart des habitants d’ici s’étaient dispersés.  Après plusieurs années, les gens sont revenus. Qu’est-ce qui était à la base de cette dispersion ? C’est la conquête du pouvoir dans cette localité. Vous savez, Niogo a été érigé en canton. La limite est là. Il y avait un nommé Alimou à Tamikhouré, qui a tué le chef du Ketiguiya, Alpha Gassimou.

Après son assassinat, ils ont pris le chef d’ici pour le déporter à Fotoba (les Iles de Loos). Alimou Tamikhouré fût arrêté aussi. Ce dernier a, par la suite, accusé Thierno Souleymane Diallo de lui avoir dit de tuer Alpha Gassimou. On les a tous envoyés à Fotoba. Lorsqu’il a trouvé qu’il ne pouvait pas s’en sortir, il a avoué qu’il les a accusés à tort. C’est ainsi qu’ils sont revenus. Et cela correspond au règne de Thierno Souleymane Diallo. A cette époque le bureau du commandant de cercle était à Ditinn et Missidé Niogo était commandé par là-bas.

A Missidé Niogo, il y avait Alpha Mamadou Bobo qui est un chasseur. Ils ont arrêté Alimou Tamikhouré pour proclamer Alpha Mamadou Bobo comme chef et ils ont transféré le canton à Bodié. Ensuite, ils (les colons français, ndlr) ont pris le bureau de Ditinn pour envoyer à Dalaba. Après, Alpha Mamadou Bobo qui était le chef de canton, en colère, a semé la terreur en mettant du piment sur les citoyens au niveau de tous les trous. Et tous les habitants ont fui. Il est resté 5 maisons. Tous ont pris la fuite pour laisser cet arbre fruitier Sopsop ici (le corossol). Cet arbre a une grande importance pour la communauté dans cette mosquée. C’est devenu un lieu de culte. On vient ici pour prier et faire des bénédictions pour la population. Tout ce que tu demandes ici, Dieu va accepter. Tout musulman qui vient avec une bonne intention, si on fait des bénédictions pour lui, ça va forcément réussir », a laissé entendre Elhadj Talibé, du haut de ses 98ans.

Par ailleurs, notre interlocuteur a dit son souhait de voir cette vieille mosquée être reconstruite. « Cette mosquée a été reconstruite d’une autre façon. Ce n’est pas comme ça que nous voulions. Mais celui qui a fait cela a dit c’est ce qu’il peut. Il a fait les travaux et des matériels sont restés. On ne voulait pas une mosquée avec plafond mais plutôt on voulait une mosquée à étage. Les ressortissants ont envoyé un financement d’une mosquée à étage. Vraiment, nous sollicitons la construction d’une mosquée à étage parce qu’elle fait partie des premières mosquées du Fouta. Nous vivons dans l’harmonie et en parfaite convivialité sur les principes de l’islam. On fait les Zikr, des prières et des bénédictions sous cet arbre sacré.  Je suis né en 1925. Mais, je suis encore lucide, conscient, je fais toutes mes prières à la mosquée, je marche seul et vois clairement. C’est comme ça que je suis allé à la Mecque. Je n’ai aucune maladie. Des fois, je sens seulement des courbatures », a conclu le sage de Niogo, Elhadj Amadou Talibé Diallo.

Depuis, Mafara (Dalaba), Amadou Baïlo Batouala Diallo envoyé spécial de Guineematin.com

Tél. : (00224) 628 516 796

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