Clivages politiques, découpage administratif, bon voisinage… le maire de Mafara (Dalaba) dit tout à Guineematin.com

La commune rurale de Mafara est l’une des circonscriptions relevant de la préfecture de Dalaba. Située à 65km de la commune urbaine, elle compte 6 districts et a connu un « morcellement » sous le régime Alpha Condé dans le cadre de la création de la sous-préfecture de Kourou. Les mauvais agissements des acteurs politiques avaient fragilisé le tissu social. Dans un entretien accordé à l’envoyé spécial de Guineematin.com sur place, le maire de la commune rurale de Mafara est revenu sur les nombreuses difficultés quotidiennes, gérées avec pédagogie pour éviter toute déconvenue.

Selon Abdourahmane Diallo, maire de la commune rurale de Mafara, sa collectivité a connu des difficultés suite au découpage administratif opéré par le régime Alpha Condé.

Abdouramane Diallo, maire de commune rurale de Mafara

« Notre commune rurale a 6 districts. Mais à l’heure actuelle, on ne peut pas parler du nombre de la population parce qu’il y a eu un découpage effectué en diminuant notre collectivité pour envoyer certains secteurs dans la sous-préfecture de Kourou Maninka qui vient d’être créée. On a enlevé trois villages notamment Djinkonyah, Baady et kourouba. Ces villages font partie du district de Mafara centre. On les a mis dans la sous-préfecture de Kourou. Parmi ceux qui sont mis là-bas, Kourouba est dans le district Mafara centre. Il y a un district entre nous et Kourou Maninka. Le district Seriyâbhé, dans la commune rurale de Mafara, ils l’ont sauté pour prendre un secteur de Mafara centre. Ils ont sauté le district de Kétiguiah pour prendre Djinkonya. Derrière Djinkonya, il y a la limite entre Mafara et Bodié, sur le fleuve Téné, qu’ils ont ramené à Kourou Maninka. Nous avons ces difficultés là-bas, liées à des clivages politiques. Kourou Maninka était un district de la sous-préfecture de Ditinn, érigé en sous-préfecture en signe de reconnaissance au président déchu, Alpha Condé. C’est un district qui n’est pas aussi peuplé. Cependant, c’est un secteur qui appartient à notre commune, qui n’atteint pas 200 personnes, qu’on a désigné comme district là-bas. Notre village, qui s’appelle Djinkonya, qui a près de 250 personnes, qu’on a également désigné comme district. Il suffit seulement que ces endroits soient des districts. Tout ça ne nous cause pas d’ennuis. C’est du fait qu’ils ont créé des polémiques entre nos populations ici, c’est ce qui nous pose problème. Il s’agit de créer des problèmes ou malentendus entre les habitants qui vivaient ensemble dans l’harmonie et dans l’entente dans le temps jadis. Cela a entraîné la bagarre. Ce sont ces difficultés que nous avons », a expliqué le maire de Mafara.

Poursuivant, Abdourahmane Diallo est revenu sur les problèmes de l’extension du marché hebdomadaire de Dondé, qui constitue le poumon économique de la commune rurale de Mafara. « A notre arrivée à la tête de la commune, nous avons trouvé beaucoup des difficultés. Toute la commune rurale de Mafara n’a qu’un seul marché hebdomadaire. Les recettes nous manquent dans cette collectivité. Cependant, nous avons pensé à agrandir et aménager ce marché qui date de l’indépendance.  On a fait la consultation partout, en présence d’une délégation préfectorale et sous préfectorale pour le réaménagement et l’agrandissement de ce grand marché qu’on appelle Dondé, pour avoir une gare routière, des espaces et autres. Nous avons construit des bureaux, des toilettes et des puits en faisant un lotissement. Par la suite, il y a eu un groupe d’individus qui est parti se plaindre à la justice en disant qu’ils n’ont pas été associés. La justice à son tour n’a pas joué pleinement son rôle. Au lieu de mener des enquêtes, elle a ordonné la fermeture du grand marché en complicité avec deux personnes. Sinon, ce lieu était devenu un grand marché où beaucoup de préfectures telles que Dalaba, Tougué, Pita, Mamou et autres viennent pour faire leur business. Maintenant, tout est arrêté pour le petit commerce. Nous avons deux carrières de sables dont une fonctionnelle. Sinon, on a suffisamment de sable, mais il n’y a pas de routes. Nos principales recettes sont uniquement les taxes du marché et la carrière de sable. Nous n’avons ni taxes d’abattage, ni taxes de cantonnement forestier. Nous n’avons pas des forêts ici. C’est pourquoi nous cherchons à reboiser », a indiqué le maire de Mafara.

Pour ce qui est des relations autrefois difficiles entre les communautés, monsieur appelle à la cohabitation pacifique et à la fraternité. « Tout le Fouta Djallon est de même père, même mère. Les Peuls et les Malinkés sont identiques. Il y a un brassage ethnique. Donc, il est hors question de parler d’ethnocentrisme. La création d’un générique qu’on appelle Manden Djallon est une source de division, de clivage communautaire et de haine, en disant que les Peuls et les Manden Djallon ne doivent pas vivre ensemble. C’est quelque chose qui ne peut pas marcher. Moi par exemple, ma première femme est une femme Malinké de Dabola, qui a fait 8 enfants pour moi. Elle a ses fils qui ont fait des enfants. Donc, il y a un brassage ethnique. Alors, on ne peut plus parler d’ethnocentrisme. Des gens à la quête du pouvoir utilisent des stratégies pareilles pour détruire la communauté », dénonce le maire de Mafara Abdourahmane Diallo.

En outre, il est revenu sur un problème domanial survenu dans la localité de Niogo, et qui a failli tourner au drame. « Comme nous sommes des parents et la terre nous appartient, l’endroit s’appelle Niogo. Alors, nous ne voulons pas aller en justice. Nous voulons régler cela à l’amiable. Si ton parent est dans l’erreur, il ne faut pas le suivre. Nous les écoutons. Nous avons démontré les papiers, en leur faisant comprendre que les travaux effectués dans ce domaine ont été une décision collective. Ce n’est pas la commune seule qui a décidé. L’octroi de ce domaine a été signé par le Kountigui de la localité, par le chef du secteur, le président du district, les imams, la jeunesse et enfin nous de la commune. Tout le monde a signé. Ceux qui s’opposent sont manipulés par tierces personnes pour les tromper. Nous avons compris qu’il y a des trouble-fêtes. C’est pourquoi nous avons fait un recul parce que nous vivons ensemble et nous avons un patrimoine commun, qui est indivisible, qui date des temps jadis. Qui tente de remettre cela en cause va échouer. Une décision signée par près de 11 secteurs ne peut pas être annulée par deux personnes. Mais, si certains individus mal intentionnés ont poussé l’affaire jusqu’à la justice, on peut déduire qu’il y a une autre prétention ou décision pour opposer des communautés qui ont un bien commun. Du fait qu’on a compris cela, nous tentons de calmer les ardeurs. Alors, nous observons le silence pour permettre aux gens de faire une prise de conscience », a laissé entendre le maire de Mafara.

De retour de Mafara (préfecture de Dalaba), Amadou Baïlo Batouala Diallo pour Guineematin.com

Tél. : (00224) 628 516 796

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