Conflit domanial à Maléya (Siguiri) : des gendarmes accusés d’exactions dans le district de Danaya

Un conflit foncier, vieux de deux ans, refait surface dans la sous-préfecture de Maléya, située à 85 kilomètres du chef-lieu de la préfecture de Siguiri. Ce conflit, qui oppose les districts de Danaya et Saraya, à cause d’une zone minière, a connu des rebondissements jusqu’à la Cour suprême. Dans la journée du mardi 14 mai 2024, des gendarmes, à bord de 3 pickups, accompagnés de citoyens de Saraya, sont accusés d’avoir fait une descente musclée dans le district de Danaya, dans le cadre de la même affaire. Plusieurs dégâts matériels et des arrestations ont été enregistrés à Danaya, a appris Guineematin.com à travers un de ses correspondants dans la région.

Selon nos informations, le jeudi dernier, le procureur de la République près le tribunal de première instance de Siguiri, a mandaté la gendarmerie pour aller arrêter les travaux sur cette zone aurifère conflictuelle. Mais, une requête en cessation des travaux, introduite par Saraya, a été annulée par la Cour suprême de Conakry le 12 avril, apprend-on. Ce qui donnait le feu vert à Danaya pour continuer l’exploitation minière sur place. Cependant, un autre dossier est pendant au tribunal de première instance de Siguiri, concernant cette fois la reconnaissance de propriété des lieux. C’est pour cette raison que le juge en charge du dossier a demandé aux deux parties d’arrêter les travaux. C’est dans cette dynamique qu’hier mardi, la gendarmerie a fait une descente pour faire respecter cette décision.

Mais des débordements ont été enregistrés, explique Aly Keïta, citoyen de Danaya, et témoin des faits. « Hier après-midi, on était en train de travailler dans la mine, quand on a vu trois pickups venir de Saraya. Ils ont traversé notre village pour aller dans la mine. Dès qu’ils sont arrivés, ils ont commencé à tirer des gaz lacrymogènes et des balles réelles. Les gens ont commencé à fuir dans toutes les directions. Chez nous, dès que nos parents voient les corps habillés, tout le monde fui. Mais, ces corps habillés étaient accompagnés par certaines personnes de Saraya, notamment la femme du patriarche. Donc, quand ils sont venus, ils ont saboté trois tricycles qui étaient dans la mine, un camion-benne, puis ils ont saisi 10 compresseurs et leurs moteurs. Il y a aussi eu 5 personnes blessées et 4 personnes arrêtées. En fait, les gendarmes ont juste dispersé les gens avec des gaz lacrymogènes et des balles réelles. Mais, les gens de Saraya qui les accompagnaient ont fait la casse et la saisie de nos biens », a-t-il dit.

Joint par téléphone, Gnoumet Sacko, président de la jeunesse de Saraya, a nié en bloc ces accusations. « Nous étions au champ lorsqu’on a appris la descente des gendarmes à Danaya. Aucun de nos concitoyens n’a accompagné les forces de sécurité. D’ailleurs, nous avons appris que la Cour suprême de Conakry a rejeté notre requête en cessation des travaux sur le site. Mais, la décision ne nous a pas été signifiés. Et puisqu’il y a un autre jugement pour reconnaissance de propriété des lieux au tribunal de première instance de Siguiri, le juge a fait savoir aux deux parties d’arrêter les travaux sur le site. Mais les populations de Danaya continuent d’y aller. Même jeudi dernier, les gendarmes sont encore descendus là-bas », a-t-il expliqué.

Interrogé par notre reporter, le procureur de la République près le tribunal de première instance de Siguiri a apporté des précisions sur ce dossier. « C’est moi qui ai fait intervenir hier la gendarmerie à Danaya pour faire arrêter les travaux parce qu’il y a un risque d’affrontements. C’est vrai que la Cour suprême a rejeté la requête en cessation des travaux, mais dans de telles situations, les deux parties peuvent introduire des requêtes d’arrêt des travaux autant de fois que nécessaire. Je reconnais que le dossier a duré ; mais, puisque l’administration est une continuité, nous avons pris fonction en janvier. Néanmoins, j’ai appelé les deux parties au dialogue, mais elles ne veulent pas comprendre, alors j’ai fait intervenir la gendarmerie pour l’arrêt des travaux », a fait savoir le procureur.

Aux dernières nouvelles, 9 personnes ont été mises aux arrêts lors des deux descentes menées par la gendarmerie de Siguiri à Danaya. Il faut rappeler que, selon les informations, au début des hostilités, c’est Danaya qui avait porté plainte contre Saraya pour agression au tribunal de première instance de Siguiri. Mais, avant de se prononcer sur l’affaire, le juge en charge du dossier à l’époque avait rendu une décision d’arrêt des travaux. Cette décision avait été cassée par la Cour d’appel de Kankan et confirmée par la Cour suprême. Ce qui donnait le libre champ à Danaya de continuer l’exploitation minière des lieux avant que le tribunal de Siguiri ne prenne une autre décision d’arrêt des travaux sur le site.

Abdoulaye N’Koya SYLLA pour Guineematin.com

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