Fraude aux examens : Moussa Doré du Collectif des professionnels de l’éducation dénonce un système bien huilé

Moussa Doré, président du Collectif des Professionnels de l'Éducation (CPE)

À quelques jours de la fin du brevet d’études du premier cycle (BEPC) Plusieurs cas de fraudes sont rapportés dans le déroulement des évaluations du Brevet d’études du premier cycle (BEPC) de la session 2024. Des groupes WhatsApp et Messenger sont créés pour traiter les épreuves et les envoyer aux candidats dans les salles de classes. Alors que le Ministère de l’Enseignement pré universitaire promet de sévir, des voix dénoncent une fraude systémique, depuis le choix des surveillants jusqu’au retrait de sommes d’argents aux candidats. Dans un entretien accordé à un reporter de Guineematin.com, Moussa Doré, président du Collectif des professionnels de l’éducation (CPE), dénonce un système de corruption mis en place du sommet à la base et demande de fortes sanctions soient prises contre les responsables.

Le ministère de l’Enseignement Pré-Universitaire et de l’Alphabétisation s’est fendu d’un communiqué pour annoncer des poursuites judiciaires contre toutes personnes impliquées dans les cas de fraude présumée au BEPC de la session 2024.

Moussa Doré, président du Collectif des professionnels de l’éducation (CPE), indique que c’est une situation récurrente. Au-delà des communiqués, l’Etat doit sévir.

« C’est une pratique qui est devenue monnaie courante au sein de l’éducation. L’année dernière, nous avons vu les mêmes cas à Siguiri et à Kankan, où c’est beaucoup plus développé en Haute Guinée. Je pense que les communiqués ne peuvent pas résoudre la situation, il faut vraiment sanctionner. L’année dernière, on a pris des gens qui ont été mis en prison. La question qu’on doit se poser, est-ce que l’année dernière il y a des cadres qui étaient impliqués dans cette situation ? Est-ce qu’ils ont été sanctionnés ? Parce-que tant qu’on fait des communiqués, on ne sanctionne pas les auteurs, on va beau chanter, mais ça ne va pas finir. Pour moi il faut passer à l’acte. Il faut sanctionner les DPE et les cadres de l’éducation qui sont impliqués dans cette situation et ceux qui gèrent les groupes WhatsApp, parce-que le gouvernement a la possibilité de contrôler l’internet », a-t-il dit.

Par ailleurs, Moussa Doré pointe un doigt accusateur sur plusieurs groupes et institutions. « On doit questionner le fonctionnement de notre système éducatif. Aujourd’hui, vous et moi, quand on a les moyens, on ouvre une école et puis on prend un jeune frère qui est à la maison et puis on le met comme directeur, professeur, dans les classes primaires. Et ces gens n’ont aucune déontologie du métier d’enseignant. Ils se permettent de tout. La grande partie des écoles privées, c’est des gens, tous leurs soucis, c’est comment faire en sorte que les enfants passent massivement dans les salles d’examens. Je donne un exemple, la semaine dernière, j’étais surveillant à l’examen d’entrée en 7ème année à Coyah. Il y a un responsable d’une école privée qui s’est permis de m’appeler pour me demander qu’il veut qu’on négocie ma place, pour qu’il puisse envoyer quelqu’un me remplacer. Je lui ai dit qu’il était malade. Parce que pour lui, il faut aider les gens, coûte que coûte, même si c’est par la fraude. Pour moi, il faut amener des gens conscients, soucieux de l’avenir de la nation. À l’allure où vont les choses, enseignants et élèves n’ont pas le souci de ce qu’on va devenir demain, mais l’objectif, il faut aller avoir le diplôme, même si derrière ça on n’a pas la conscience nécessaire. C’est ce qui est grave. Le gros problème c’est les enseignants, pas les enfants. Parce que quand l’enseignant montre à l’enfant que c’est par la corruption je suis venu par-là et que c’est par la corruption vous allez passer en classe supérieure, les gens vont suivre. C’est pourquoi on doit retravailler sur la question de l’enseignant dans les écoles et sur qui on doit recruter dans les écoles. Parce que si les gens n’ont pas la morale professionnelle, quoiqu’on dise, ils vont faire ce qu’ils veulent », a-t-il laissé entendre.

En outre, Moussa Doré du CPE dénonce toute une chaîne de fraude, du Ministère à la base, et demande qu’il y ait des sanctions.

« C’est une chaîne. Si vous passez dans plusieurs DPE, pour que les gens soient surveillants, il faut passer par la négociation. Quand ils paient de l’argent pour être surveillants, il faut aussi qu’ils essaient de récolter cet argent avec les élèves. D’où la corruption des surveillants. C’est depuis le département jusqu’aux services déconcentrés de l’éducation. Nous, on a proposé à l’État de faire en sorte qu’on fasse une étude de moralité avant les examens, c’est-à-dire celui qui doit être acteur de l’examen, qu’on amène des gens pour qu’ils sachent est-ce que cette personne est apte à gérer l’examen, sans qu’il y ait fuite par lui. Est-ce que cette personne peut gérer les examens sans qu’on ne donne des billets de banques pour acheter sa conscience ? Le second aspect est de sanctionner les gens. Ceux qui sont acteurs de ces choses il faut les sanctionner publiquement, qu’ils soient traduits devant les juridictions et qu’ils soient mis en prison afin qu’ils servent d’exemple aux autres », a-t-il lancé.

Ismaël Diallo pour Guineematin.com

Tél. : 624 693 333

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