Affaire libération d’Ousmane Gneloy : la partie civile récuse le juge en charge du dossier

Ousmane Gneloy Diallo devra patienter encore pour savoir s’il va obtenir une liberté provisoire ou non. L’audience qui doit permettre à la Cour d’appel de Conakry de statuer sur la demande de mise en liberté introduite par les avocats du jeune militant du RPG Arc-en-ciel n’a finalement pas eu lieu ce lundi, 13 décembre 2021. Elle a été reportée en raison de la récusation du juge en charge du dossier par la partie civile, a appris Guineematin.com à travers un de ses journalistes.

C’est le deuxième report dans cette procédure. Lundi dernier, l’audience avait été renvoyée à huitaine, à cause de l’absence du juge, qui était malade. Et aujourd’hui encore, elle n’a pas pu avoir lieu, parce que la partie civile avait déjà saisi la Cour suprême pour récuser le juge en charge du dossier.

Me Pépé Antoine Lamah, avocat de la partie civile

« Après réflexion et constat, Mme Kadiatou Biro Diallo a estimé que cette procédure, l’allure qu’elle prend, ne donne pas les garanties suffisantes pour la tenue d’un procès juste et équitable. La partie civile, ayant douté sur l’impartialité de M. Seydou Keïta, premier président de la Cour d’appel de Conakry, a décidé d’introduire une procédure de récusation contre sa personne par devant le premier président de la Cour suprême de Guinée.

Dans la même demande, Mme Biro Diallo a sollicité un sursis à continuation des débats avant l’examen de sa demande de récusation. Le premier président, sous le fondement des dispositions des articles 742 et suivants du Code de procédure pénale, a non seulement transmis la demande de récusation à l’intéressé, mais il a aussi pris une ordonnance de sursis à continuation des débats. C’est pourquoi, aujourd’hui, le dossier n’a pas été débattu. Nous aurons donc les regards tournés vers le premier président de la Cour suprême de Guinée, qui aura la responsabilité d’apprécier en toute souveraineté la demande de récusation portée par Mme Kadiatou Biro Diallo », a expliqué Me Pépé Antoine Lama, l’avocat de la partie civile.

Me Almamy Samory Traoré, Avocat de la défense

De leur côté, les avocats de la défense dénoncent une fuite en avant. Pour Me Almamy Samory Traoré, l’un des conseils d’Ousmane Gneloy Diallo, la partie civile n’avait pas besoin d’engager une telle démarche dans cette procédure. « Nous considérons simplement que c’est une fuite en avant de la partie civile, qui veut influencer la procédure. Sinon, la procédure qui est en cours, c’est une procédure de mise en liberté. Dans cette procédure, en réalité, notre interlocutrice, c’est le ministère public, la partie civile n’est pas notre interlocutrice. Alors, si le juge qui doit juger le dossier ne convient pas à la partie civile, nous disons que c’est de bonne guerre et nous attendons de voir à quelle chambre le dossier a été confié. Bien entendu, si le juge qui doit gérer le dossier ne nous convient pas non plus, on mettra en place la procédure qu’il faut pour aboutir à une récusation éventuellement.

Nous regrettons que le procès n’ait pas lieu aujourd’hui, parce que c’est une procédure de mise en liberté. En tout état de cause, nous estimons que l’audience va avoir lieu, que le débat se tiendra et que la vérité va être dite quant à la mise en liberté. Parce qu’il faut simplement rappeler que la partie civile n’est pas personnellement intéressée dans la procédure. Ce qui intéresse la partie civile, ce sont des intérêts civils qu’elle réclame. En l’espèce, dans la décision de la Cour d’appel, ils ont réclamé une somme symbolique et la condamnation du jeune. Ça a été fait et à ce stade, on se demande pourquoi la partie civile s’intéresserait à une mise en liberté de notre client. Aujourd’hui, en quoi la liberté de M. Ousmane Gneloy dérangerait pas la partie civile ? C’est la grosse question », a réagi Me Almamy Samory Traoré.

A rappeler que cette affaire est partie de la publication sur Facebook d’une vidéo dans laquelle Ousmane Gneloy Diallo a tenu des propos grossiers à l’encontre d’Elhadj Boubacar Biro Diallo, ancien président de l’Assemblée nationale guinéenne, et certains membres de sa famille. Indignée par cette situation, Kadiatou Biro Diallo, alias DK, fille d’Elhadj Boubacar Biro, a porté plainte contre le jeune homme, qui se faisait appeler « ministre de la défense du président Alpha Condé sur Facebook ». Le 20 mai 2021, le tribunal de première instance de Dixinn a reconnu Ousmane Gneloy Diallo des faits d’injures et menaces pour lesquels il était poursuivi, le condamnant à cinq d’emprisonnement ferme. Mais, cette décision n’avait pas été exécutée parce que le condamné bénéficiait de la protection des autorités d’alors.

Il a fallu la chute du président Alpha Condé, renversé par un coup d’Etat militaire, le 5 septembre 2021, pour que le jeune homme soit rattrapé par sa condamnation. Le 28 septembre, Ousmane Gneloy a été arrêté à l’aéroport de Conakry, alors qu’il tentait de sortir du pays. Puisque ses avocats avaient déjà interjeté appel contre la décision du tribunal de première instance de Dixinn, un nouveau procès s’est tenu devant la Cour d’appel de Conakry. Le 28 octobre 2021, la juridiction supérieure a reconnu le prévenu coupable, mais elle a réduit sa peine à deux ans d’emprisonnement plus le paiement d’un montant symbolique à la partie civile. N’étant pas d’accord avec cette décision, les avocats de la défense ont décidé de se pourvoir en cassation auprès de la Cour suprême. Et en attendant l’examen du dossier par la plus haute institution judiciaire du pays, ils ont introduit une demande de mise en liberté provisoire de leur client.

Mohamed Guéasso DORÉ pour Guineematin.com

Tel: +224 622 07 93 59

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