Par Amadou Diouldé Diallo ! Le fait peut paraître banal au point que certains peuvent se demander pourquoi de tels hommages. Pourtant, à voir de près et à une époque où c’est la manivelle qui était à l’allumage, sur des routes classées parmi les plus accidentées et les plus mauvaises de la Guinée, on se rend vite à l’évidence que les chauffeurs de ces deux préfectures, méritent bien des hommages, car sans eux, plusieurs activités n’auraient jamais pu être menées avec succès.
À commencer par le transport des hommes et de leurs biens, des artistes, des musiciens et des sportifs sur le plan local, lors des quinzaines artistiques, sportives et culturelles au chef-lieu des régions et les festivals nationaux à Conakry, Sans oublier les déplacements des équipes qui prenaient part aux compétitions (championnats et coupe PDG) dans plusieurs disciplines.
Ces chauffeurs presque tous des employés des ERC, (entreprises régionales de commerce) dont les parcs étaient constitués de « Gaz Ordinaire, de Gaz Modifié, de GIL, de Gil Modifié » de marque Russe, de « Romania »de marque Roumaine et de « Hino » Japonais
À noter que ces derniers n’ont jamais emprunté la route Koundara-Gaoual-Telemele-
Kindia-Conakry à cause du rocher percé de Wonku à la sortie de Santou et le Col de Loubha à la sortie de la ville de Télimélé. Il ya avait une seconde catégorie de chauffeurs, qui faisaient les marchés hebdomadaires et d’autres qui étaient ceux des autorités (secrétaire fédéral et gouverneur de région) et qui les accompagnaient dans les missions dans les arrondissements, aux chefs-lieux des régions (Labe) pour Gaoual,(Kindia) pour Telimele, et Conakry pour les Conseils Nationaux de la Révolution et Congrès du Parti. Eux, étaient à bord de Jeeps Russes.
Suite au règlement du contentieux Franco-Guineen consécutif à la visite du Président Valéry Giscard D’Estaing en Guinée, les Secrétaires Fédéraux et les Gouverneurs de Région, seront dotés de voitures Renault 16 et 18.
Télimélé et Gaoual eurent des chauffeurs de renom grâce à la maîtrise de leurs véhicules.
On peut citer les Maitres Abidina Filo, Papa, Garanke, Silati, Bobo Sodjo, Thiam, Dian Samba, Kaba et Boure de Kambaya de Télimélé.
De Gaoual aussi avec Maitres Alseny Lente, Ndongo, Liberti Valence, Soriba, Hamdiata, Oumar Diely, Kalidou, Balla Binani, Bobo et son beau-frère Diogo Barry.
De Sinta à Missira en passant par Santou et Koba, de Tarihoye à Tyontyan, de Daramagnaki à Konsotami, de Télimélé à Conakry, en passant par toutes les régions de la Basse Guinée, nos pères ou grands frères chauffeurs précités, ont transporté le Télé-Jazz et la troupe fédérale de Télimélé à tous les rendez-vous artistiques, sportifs et culturels de l’époque. Il en est de même de ceux de Gaoual qui de Koumbia à Wendou Nbourou, Foulamory, Kakony et Touba ainsi que partout en Moyenne Guinée et à Conakry, ont permis à la région de naissance de l’illustre Alpha Yaya Diallo et du Waliou Thierno Ibrahima Ndama, de participer à toutes les manifestations.
Le Tominé Jazz de Gaoual dans la profondeur de la nuit à la permanence de Koumbia, après une séance animée de lutte traditionnelle entre le « Koli » et le « Binani » en présence du Secrétaire Fédéral Elhadj Amadou Binani Diallo taquinant Dansa Kanté, Boubacar Koumbia, Hothia et Alpha Saliou tous membres du bureau fédéral et fils de Koumbia, si seulement on pouvait revivre ces moments fabuleux de notre adolescence. Ou encore le vrombissement des moteurs des camions « Zil »
Modifié de Maitres Abidina Filo et de Liberti Valence au départ de Telimele et de Gaoual avec à leur bord, les artistes et les sportifs pour les quinzaines régionales ou les festivals nationaux.
De toute cette faune d’images, je garde celle-ci :
« Une après-midi de départ pour la quinzaine artistique et sportive à Labé. Le rassemblement a lieu à la permanence fédérale de Gaoual. Trois camions de L’ERC (entreprise régionale de commerce), y sont stationnés pour assurer le transport de la troupe et de l’équipe fédérale. Le Secrétaire Fédéral Elhadj Amadou Binani Diallo est lui-même au volant de sa Jeep Russe pour aller chercher les retardataires.
Du haut de ses 1,85m,Maitre Liberti Valence, le meilleur de la région à l’époque, embarque les filles du chœur et de l’ensemble instrumental. On noue des foulards autour du cou des cantatrices on les fait boire du jus de citron, les enveloppent dans des couvertures et on les installe au-devant de la carrosserie.
Tout le monde est à bord.
Le départ est pris sous la direction de Elhadj Amadou Binani Diallo en présence d’une foule nombreuse de parents, amis et connaissances y compris mon père dont deux des fils étaient du voyage. Moi, le reporter sportif et ma petite sœur Hadjiratou la cantatrice de l’ensemble instrumental. Arrivée au bac sur le Koliba, Elhadj Amadou Binani Diallo sort son fusil calibre 12 et tire 7 coups avant la traversée. Il salut, il encourage, il motive et retourne là. Il est 18 heures, le voyage sera de nuit. Destination Labe ».
À quand la renaissance de toutes ces activités qui de par leur organisation et leur intensité ont forgé le destin de notre génération ?
Amadou Dioulde Diallo, Journaliste-historien
