Conakry : immersion dans le quotidien de Boubacar Bayo, un des premiers importateurs de chameaux en Guinée

Il est comme une goutte d’eau dans le désert. Boubacar Bayo est le propriétaire des ânes, chevaux et autres chameaux vendus aux abords de la Corniche Nord au niveau de Kipé, à quelques pas de l’école française. Cet éleveur dans l’âme importe ces équidés en Guinée depuis plus de très longues années maintenant avec une clientèle issue généralement d’une catégorie plus aisée de la population.

Dans un entretien accordé à un reporter de Guineematin.com, Boubacar Bayo est revenu sur son activité, faite de hauts et de bas.

Boubacar Bayo est un éleveur et vendeur de bétail. Une qu’il a appris avec ses parents il y a de cela des années. Il est installé sur la Corniche Nord, notamment au quartier Kipé, dans la commune de Ratoma. Depuis une dizaine d’années, il s’est lancé dans la vente de chameaux, chevaux et ânes qu’il achète bêtes en Mauritanie, au Sénégal, au Niger, en Algérie et au Mali. Selon ce qu’il a confié à notre reporter, il est l’un des premiers guinéens à importer des chameaux en Guinée. « Nous sommes en face d’un chameau. Je suis l’un des premiers à envoyer ces animaux en Guinée pour la vente et l’élevage. Ça fait plus de 13 ans maintenant que j’ai commencé à les envoyer. Les chameaux sont utilisés le plus souvent pour des sacrifices car rarement les gens les achètent pour les élever », a-t-il expliqué.

Boubacar Bayo, éleveur et vendeur

Actuellement, Boubacar Bayo dit avoir deux chameaux en vente. Le plus gros se négocie entre 48 et 45 millions de francs guinéens. Pour le moment, les clients ont proposé en dessous du prix de vente. « Ce chameau est là il y a un mois et ça aussi c’est parce que je ne me suis pas entendu avec les gens qui voulaient l’acheter, sans quoi il serait déjà parti. Mais quand j’ai fait le calcul, j’ai trouvé que la proposition des clients n’était pas en ma faveur si je le vendais à ce prix. Il y a eu deux clients qui sont venus, mais on ne s’est pas compris. J’ai demandé 48 millions GNF pour au moins s’accorder sur 45 millions GNF, mais jusque-là rien. Si on fait une évaluation par rapport au Sénégal en revendant la viande du chameau par kilogramme on va gagner plus que 35 millions. Cette bête pèse près de 300 kilogrammes », a laissé entendre monsieur Bayo.

Par ailleurs, notre interlocuteur soutient que l’élève des chameaux est beaucoup plus aisé en Guinée que dans les pays Sahéliens à cause du climat. « Je pense que si les choses sont bien faites, les chameaux ont moins de problèmes de nourriture en Guinée que dans les pays du désert et le relief guinéen est confortable pour eux. Ici, on fait un mélange de manioc, de pain, de maïs, de mil et de riz, bref tout un mélange pour qu’ils soient résistants », a fait savoir Boubacar Bayo.

Selon nos informations, tout est utile chez le chameau. Ses excréments sont convoités par certains fumeurs qui souhaitent se débarrasser de la consommation de cannabis et de cigarette. « Les chameaux ont une importance très capitale parce que même leurs excréments sont utilisés par les parents des enfants qui prennent de la drogue et fument de la cigarette. Ils viennent chercher les crottes ou les urines pour les enfants drogués et alcooliques. Dans les temps, ce sont les pèlerins qui ramenaient ces excréments de l’Arabie Saoudite ; mais maintenant, en longueur de temps, les gens viennent payer les matières fécales avec nous », a ajouté monsieur Bayo.

Les chameaux et chevaux de Boubacar Bayo sont souvent sollicités par des familles aisées pour les cérémonies de mariages et autres festivités. « Il y a certaines personnes qui, si elles ont des cérémonies de mariages, elles viennent louées les chevaux ou les chameaux avec nous. D’autres, c’est pour les dédicaces ou pour les clips, ils viennent louer les chevaux. Les enfants aussi viennent ici pour les anniversaires et les fêtes pour prendre des photos ».

Boubacar Bayo, éleveur et vendeur

Toutefois, cet éleveur-vendeur est confronté à un problème d’espace approprié pour la vente de ses bêtes. Une réalité qu’il déplore. « La ville de Conakry n’a pas de parcs, chacun se débrouille de son côté. Ici, je suis à l’Ecole des Postes et Télécommunications ; pour le moment je suis là temporairement. Je ne suis pas assuré d’y rester éternellement car je sais que du jour au lendemain on peut me demander de quitter quand ils auront besoin du domaine pour aller ailleurs. C’est toujours comme ça pour le moment. Je suis le fondateur du parc animalier de la Bellevue, j’ai fait quatre années là-bas seul, je passais la nuit là-bas sans hangar car j’avais trop de difficultés, le vol était récurrent ».

Malgré les difficultés rencontrées, Boubacar Bayo est fier de ce qu’il a accompli depuis 1985, l’année à laquelle il a débuté l’élevage après ses études universitaires en Sciences Techniques et Biologie. Aujourd’hui, il a réussi à inculquer la passion de l’élevage à de très jeunes garçons qui sont dans le quartier. Il estime que la relève sera assurée même à sa disparition. Mais en attendant cette disparition, il se fixe pour principal objectif de faire émerger l’élevage des chameaux et autres bêtes comme les chevaux et les ânes en Guinée.

Mamadou Tanou Bah pour Guineematin.com

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