Mme Fatoumata Korka Coulibaly, mère de M’mah Sylla, à la barre : « Patrice a refusé qu’elle avorte la grossesse »

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Le procès de l’affaire M’mah Sylla, décédée en 2021, après un viol suivi de grossesse et d’un avortement, s’est poursuivi hier, mercredi 22 février 2023, au tribunal de première instance de Mafanco. L’audience de ce jour a été marquée par la comparution de Mme Fatoumata Korka Coulibaly, mère de la victime, pour apporter son témoignage dans ce dossier, a constaté un reporter de Guineematin.com qui a suivi cette audience.

Les médecins accusés d’avoir violé, fait avorter et d’avoir administré des substances nuisibles à M’Mah Sylla sont entre autres : Patrice Lamah, Sebory Cissé et Célestine Millimono. Ils sont détenus à la maison centrale de Coronthie depuis le 14 octobre 2021.

À l’audience d’aujourd’hui, la maman de M’Mah Sylla a livré sa version des faits. Elle a déclaré que sa fille a contracté la grossesse avec Dr Patrice. Elle a précisé que l’avortement a été le choix de M’Mah et non de Patrice, son petit ami. « M’Mah Sylla est ma première fille. Ce que je sais, elle m’a appelé au téléphone pour me dire qu’elle est malade. C’est ainsi j’ai envoyé mes enfants pour en savoir plus, parce que j’étais malade. Lorsqu’ils sont arrivés à la clinique (Entag), ils m’ont dit de venir vite, que tout le corps de M’Mah est noir. J’ai emprunté une moto pour m’y rendre. Je suis arrivée, en ce moment, elle était dans le bloc opératoire… Ce jour, on a dormi à côté d’elle avec mes enfants.

La grand-mère de ma fille et les médecins m’ont dit qu’elle souffrait de tisse. Je leur ai dit de me montrer ce qui est sorti du ventre de ma fille. Ce que j’ai vu, je me suis dit que ce n’est pas du tisse. J’ai dit qu’il faut qu’on éclaircisse. J’ai passé la nuit à côté de ma fille. Le matin, je suis allée à la maison pour me laver. À 18 heures, M’Mah m’a appelé pour me dire qu’elle est arrivée chez sa grand-mère. Elle a passé une semaine là-bas avant d’aller chez Dr Cissé à Dabompa. Le lendemain matin, elle m’a appelé pour me dire qu’elle est arrivée chez Dr Cissé ; donc, qu’elle ne veut pas suivre l’intervention sans ma présence. À mon arrivée, Dr Cissé a dit qu’il ne peut pas faire l’intervention sans signature… J’ai fait la signature avec la grand-mère de M’Mah avant qu’il ne fasse le travail. On a fréquenté là-bas jusqu’à deux semaines. Un jour, M’Mah m’a appelé pour me dire, ‘’maman, la maladie que j’ai, c’est la grossesse. Je lui ai demandé qui t’a enceintée, elle m’a dit que c’est Patrice ; mais, elle m’a dit que Patrice a refusé qu’elle avorte la grossesse. Après, j’ai interpellé Patrice qui a reconnu avoir enceinté M’Mah Sylla. Il a ensuite déclaré qu’il n’a pas procédé à l’avortement. Il a même dit qu’il a proposé à ma fille d’aller chez sa sœur, si elle a peur. Il m’a dit que M’Mah est sa petite amie et ma fille aussi m’a confirmé ça », a précisé Mme Fatoumata Korka Coulibaly

« Est-ce-que Dr Sebory Cissé vous a dit de ne pas donner à manger à M’Mah Sylla ? », a interrogé un avocat de la défense. « Je n’ai pas donné à manger à M’Mah Sylla. C’est sa grand-mère qui lui a donné de la bouillie », s’est contentée de répondre madame Fatoumata Korka Coulibaly.

Interrogé par le juge Souleymane 1 Traoré pour d’éventuelles observations sur le témoignage de la dame, Dr Sebory Cissé, un des accusés, a indiqué que M’Mah Sylla a confirmé dans le bloc opératoire qu’elle avait reçu des coups et blessures lors des premières interventions chirurgicales dans la clinique d’Entag.

Les propos de ce médecin ne se sont pas passés inaperçus chez le ministère public. Il a sollicité un supplément d’information, estimant que la victime avait reçu des coups et blessures lors des différentes interventions qui ont entraîné sa mort. « On ne peut s’en sortir si les faits ne sont pas discutés. Il faudrait qu’on accepte. Comprenez, on dit cela dans l’intérêt de toutes les parties », a rassuré le procureur, Kanfory Ibrahima Camara.

Pour sa part, Houleymatou Bah, avocate de la partie civile, a soutenu cette requalification des faits du procureur. « Nous nous estimons que le ministère public est dans son plein droit de demander la requalification des faits et sur la base des éléments nouveaux, parce que ça n’a pas été discuté pendant toutes ces audiences passées. Donc, s’il estime qu’il y a des faits nouveaux, qu’il faille les discuter à l’audience avant qu’on ne clôture les débats et que les réquisitions et plaidoiries soient faites. Il est dans son droit. Et nous de la partie civile, nous le soutenons et nous prions le tribunal d’aller dans ce sens pour qu’on examine amplement cette nouvelle infraction qui a été débattue sommairement, des coups et blessures volontaires ayant entraîné la mort sans intention », a-t-elle précisé.

Mais, cet avis n’est pas du goût de Maître Pépé Kolié. Cet avocat de la défense a affirmé que le ministère public n’a pas de base légale de cette requalification des faits. « Ce qui démontre qu’il a poursuivi sans être sûr. Nous nous demandons sur quel fait le procureur se fixe pour demander la qualification. Nous estimons qu’il n’y a pas de faits nouveaux parce qu’il n’y a pas un fait qui n’a pas été révélé ici à la barre. Il veut évoquer les coups et blessures ; or, nous sommes en matière médicale, la chirurgie est ordonnée, c’est même prescrit par la loi. La chirurgie ne peut pas être considérée, quelque soit le résultat, qu’elle donne des coups en matière pénale », a désapprouvé Maître Pépé Kolié

Finalement, le président du tribunal, Souleymane 1 Traoré, a mis cette affaire en délibéré sur la requalification des faits du ministère public et a renvoyé le procès au 28 février 2023.

Kaïn Naboun TRAORÉ pour Guineematin.com 

Tel : 00224 621144891 

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