Confection de passeports à Conakry : le policier Mouctar Tawel Camara jugé pour avoir trompé 42 personnes 

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C’est un secret de polichinelle, les arnaques pour l’obtention des documents administratifs sont légions en Guinée. Chacun y va de son stratagème ! C’est dans ce cadre que Mouctar Tawel Camara, policier de son état, est actuellement jugé au tribunal de première instance de Mafanco. Il est poursuivi pour « faux et usage de faux et abus de l’État d’ignorances », faits prévus et punis par les articles 585, 678 et 436 du code pénal, rapporte un des reporters de Guineematin.com qui a suivi le procès.

Ce sont au total 42 personnes (dont plusieurs femmes) qui ont été victimes des agissements de Mouctar Tawel Camara. Ce prévenu a emmené toutes ses victimes au ministère de la sécurité à Coléah où il dit avoir comme complice un certain Mamady Kourouma, démarcheur, pour les faire enrôler.

« Il m’a dit de l’accompagner dans son bureau en ville. Nous sommes allés à Coléah. Il a tenu ma main pour me faire entrer dans une grande Cour. On est partis dans une grande salle où il y a plusieurs machines. On a pris mes empreintes, une lumière m’a flashé. Il m’a fait sortir pour m’embarquer pour rentrer à Simbaya », a expliqué Moussa Sylla. Ce jeune plaignant, étudiant en licence 3 donnera ensuite la somme de 700 000 francs guinéens pour le prix du passeport, alors que son prix officiel est 500 000 francs guinéens.

Au cours de sa déposition, Moussa Sylla a expliqué que ces faits se sont déroulés, alors qu’il était mineur en ce moment. Mais, il n’a pas obtenu son passeport à l’époque, malgré ses nombreuses relances. Lorsqu’il a eu son baccalauréat, il est allé faire un autre passeport parce qu’il comptait postuler pour une bourse d’étude. Et, en ce moment qu’on lui a signifié qu’il avait déjà été enrôlé précédemment et qu’il ne peut donc pas avoir un autre passeport.

Vivant dans le même quartier que le policier arnaquer, il est allé se plaindre auprès de la famille de ce dernier et du chef du quartier. Ainsi, l’affaire va s’ébruiter dans le quartier. C’est suite à cela que plusieurs personnes ont commencé à révéler qu’elles sont également victimes de la même pratique. Et, finalement, les victimes ont porté l’affaire au tribunal de Mafanco.

Après le passage de M. Sylla à la barre, Maïmouna Diawara, Daouda Bangoura, Mafering Keïta et Alpha Éric Ahoussou ont fait leurs dépositions, racontant presque la même chose que la première partie civile devant de nombreuses autres victimes présentent dans la salle d’audience.

Confronté à ses victimes, Mouctar Tawel Camara conteste cette version des faits. Selon lui, ce sont les parties civiles qui l’ont contacté pour la confection des passeports, exceptées 2 qu’il a emmené au ministère de la Sécurité.

Face aux faits, son avocat lui demande de dire la vérité pour espérer avoir la clémence du tribunal. « À vous entendre parler, on a l’impression que vous protégez quelqu’un, dites la vérité au tribunal », a dit Me Sory Condé. « À partir de maintenant, je plaide coupable dans ce dossier », a ajouté l’avocat.

De son côté, Me Koikoi koto Koivogui, avocat des victimes, a demandé au tribunal d’ordonner un supplément d’informations pour dit-il « vérifier que mes clients peuvent avoir d’autres passeports ».

Ce que le procureur, Ibrahima Kanfory Camara trouve « pas important », se disant pour sa part être prêt à présenter ses réquisitions.

L’avocat de la défense est allé dans le même sens en estimant que : « la demande est sans objet ».

Ensuite, Me Koikoi koto Koivogui demandera au tribunal de lui accorder un temps « d’aller évaluer les préjudices administratifs causés » par les agissements du prévenu, faisant ainsi référence au fait que ses clients ne peuvent avoir de nouveaux passeports.

À son tour, Me Sory Condé sollicitera que la liberté soit accordée à son client si le tribunal vient à accéder à la demande de son confrère. Pour soutenir sa demande, il expliquera que Tawel Camara a perdu sa mère dont l’enterrement a eu lieu hier (lundi 03 juillet). « Il n’a pas pu assister à son enterrement ; mais, permettez-lui d’assister au troisième jour de son décès », a-t-il plaidé.

Mais, pour le procureur, libérer le prévenu constitue un danger pour ce dernier puisqu’il vit dans le même quartier que ses victimes. « Les 40 et quelques jeunes sont dans le même quartier que lui, les conséquences (de sa libération) seraient inestimables. Ce serait l’envoyer à l’abattoir, l’envoyer à la guillotine. Le représentant de la société que je suis s’oppose farouchement à cette demande », a alors martelé le parquet. Il sera rejoint dans cette position par l’avocat de la partie civile, pour qui « s’il ne disparaît pas, on va le faire disparaître », a-t-il indiqué.

Statuant sur siège, le tribunal, présidé par le juge Mohamed Sangaré, a rejeté les demandes à la fois de la partie civile et de la défense, avant de renvoyer le dossier au 13 juillet 2023 pour plaidoiries et réquisitions.

Du tribunal de Mafanco, Mamadou Yahya Petel Diallo pour Guineematin.com 

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