N’Zérékoré : les conducteurs de taxi-motos se plaignent d’être « la cible des agents de la police routière »

Pierre Haba, étudiant diplômé, conducteur de taxi-moto

Les conducteurs de taxi-moto de la commune urbaine de N’Zérékoré ne digèrent pas le mode d’opération des agents de la police routière. Ils accusent ces derniers de racket, de violences verbales et d’autres formes de tracasseries dans la circulation routière. Interrogés ce mercredi 19 juin 2024, ces conducteurs ne sont pas passés par le dos de la cuillère pour dénoncer les agissements des agents dans la circulation routière. Mais, la sécurité routière pointe l’indiscipline qui caractérise les taximotards qui ne respectent pas les règles de la circulation routière, rapporte la rédaction de Guineematin.com basée dans cette préfecture.

Racket, corruption, discrimination, agression verbale… sont entre autres les accusations portées sur les agents de la police routière par de nombreux jeunes conducteurs de taxi-moto de N’Zérékoré.

Trouvé stationné, en groupes au bord de la route, en face de l’hôpital régional, Tamba Böbö Koundouno, conducteur de taxi-moto, dénonce une arnaque pure et simple.

Tamba Böbö Koundouno, étudiant diplômé et conducteur de taxi-moto

« La police routière est là pour la sécurité et la réglementation de la circulation routière. Beaucoup de ces jeunes agents routiers ne savent pas ce que c’est que le policier. Quand vous quittez ici pour le rond-point du grand marché, les véhicules sont garés n’importe comment et les commerçants ambulants ont encombré la route. Cela fait même qu’on a des difficultés pour traverser le grand rond-point, mais cela ne les regarde pas. Par contre, dès qu’il fait jour, chacun d’eux a un programme. Nous sommes leur cible. Dès que tu viens débarquer un client, on te bloque en retirant la clé de la moto pour l’envoyer à la fourrière. Et une fois, si ce n’est pas 40 000, c’est 50 000 GNF qu’il faut donner pour s’en sortir. Et si tu n’as pas les moyens de payer cette somme, tu es tenu obligé de passer toute une journée là-bas. Ce que j’ai remarqué aussi dans le comportement de ces policiers, c’est que généralement, ils arrêtent ceux qui portent le casque, les paires fermées avec les rétroviseurs sur leurs motos, sous prétexte que ceux-ci sont des villageois. Dans tout ça, aucun policier n’a indiqué aux conducteurs de taxi-moto là où ils doivent garer. Même avant, ils s’ingéraient aussi dans le contrôle du gilet qui relève normalement du syndicat. Mais les syndicats ont tenu une rencontre par rapport à cela pour laisser ce domaine-là aux syndicats. Donc, c’est le syndicat qui est habilité à contrôler le gilet. Et là aussi, et les syndicats et les policiers, ce sont tous des arnaqueurs. Aucun syndicat n’est intervenu un jour dans un problème qu’un conducteur a eu avec un policier, même pour savoir juste la nature du problème ou de l’infraction. Ce qui les intéresse, c’est la vente de leurs billets », a dénoncé Tamba Böbö Koundouno.

Même son de cloche chez Pierre Haba, un autre étudiant diplômé, conducteur de taxi-moto, évoque même des cas d’agression verbale.

« Franchement, les policiers ne jouent pas leur rôle. Normalement, le contrôle des gilets relève des syndicats de taxi-moto. Parfois, ces policiers nous agressent verbalement ; et nous arrachent de l’argent quand ils arrivent à avoir la clé de la moto pour des cas de stationnement. Et c’est là le gros problème. Jusqu’à présent, ces policiers ne nous ont jamais montré ou indiqué là où on doit stationner sans problèmes. Spécialement au grand rond-point, on a des difficultés de stationner là-bas, même pour faire juste descendre un client. Parce que dès que tu gares, ils viennent pour te prendre. Quand ils te prennent, c’est pour te dire de payer l’argent entre 30 000 et 50 000 GNF. Au cas où tu n’as pas d’argent, c’est pour envoyer ta moto à la fourrière pour perdre toute la journée là-bas, au moment où tu as à déposer une recette. C’est pourquoi je demande aux autorités hiérarchiques, de nous montrer là où il faut exactement garer sans problème, parce qu’on est confus. S’ils nous montrent les points de stationnement et que quelqu’un faillit à cette loi, là ils peuvent le pénaliser. Même nos syndicats, tout ce qui les concerne, c’est la vente de leurs billets. Mais en aucun cas, tu ne verras un syndicaliste intervenir dans n’importe quelle situation entre un conducteur taxi-moto et un policier », a dit Pierre Haba.

De son côté, Jean Pierre Balamou dit être étonné de cette situation qu’ils vivent tout en se demandant où il faut se garer en ville, sans se faire prendre.

Jean Pierre Balamou, étudiant diplômé, conducteur de taxi-moto

« C’est vraiment étonnant pour nous, surtout en ce qui concerne les stationnements interdits. Parce dans la ville ici, on ne sait plus où il faut garer. Une fois que tu prends un passager qui te dit que je vais en ville ou bien au grand marché, c’est tout un problème, parce que partout où tu vas garer, ils vont retirer ta clé. Le contrôle de gilet relève du syndicat. Mais il y a des policiers qui nous prennent par rapport au gilet. Et une fois que ta moto est envoyée à la fourrière chez eux là-bas, on te demande de payer soit 150 000 ou 100 000 GNF pour te libérer… »

Des accusations balayées d’un revers de main par le commissaire spécial adjoint de la police routière de N’Zérékoré, Michel Kandet Roger Bangoura, qui parle plutôt du non-respect des codes de la route et des normes de conduite de ces taximotards.

Michel Kandet Roger Bangoura, commissaire spécial adjoint de la police routière de N’Zérékoré

« C’est par ignorance qu’ils le disent. Dans le cadre de la réglementation de ce service de taxi-moto, il existe dans l’un des articles, que le port de gilet est obligatoire, et que la couleur du gilet relève de la commune. Si la commune a délégué ce choix de la couleur à ces différentes corporations de taxi-moto, cela ne veut pas dire que c’est à eux de faire ce contrôle. Le contrôle dans la réglementation n’a jamais relevé d’une ONG ou d’une section syndicale. C’est parce qu’ils ne le savent pas. On contrôle le gilet pour identifier le conducteur de la mototaxi. Savoir réellement si son gilet correspond à sa moto dans le cadre d’adhésion au syndicat. Vous verrez qu’un conducteur continue à utiliser un gilet dont la moto est partie il y a longtemps, mais qu’il utilise le même gilet pour deux à trois motos. Vous verrez aussi des conducteurs dont le gilet est déchiqueté ou que le numéro de son gilet n’est plus lisible. Nous ne permettrons pas à un motard de rouler sans gilet puisque c’est ce qui fait qu’ils plient les plaques d’immatriculation à tel point que s’ils commettent une faute et qu’ils n’obtempèrent pas à l’interpellation de l’agent, qu’on puisse le repérer par son numéro de gilet sur son dossard. Mais vous verrez que quand ils portent le gilet, c’est faire sortir un bras ou plier le gilet jusqu’au niveau de la poitrine dont on ne peut plus lire. Or, le numéro se trouve sur le gilet pour que le passager puisse lire en cas de quelque chose. En un mot, ces conducteurs de taxi-moto ne veulent pas être contrôlés. Non seulement ils ne veulent pas immatriculer leurs motos, et ils ne veulent pas aussi être contrôlés dans ce port de gilet qui est obligatoire », a expliqué Michel Kandet Roger Bangoura.

En outre, le commissaire spécial adjoint de la police routière de N’Zérékoré est revenu sur la question du stationnement.

« Pour les cas de stationnement, ils doivent comprendre que tout stationnement interdit doit être réprimé. Le stationnement général dans la circulation est une infraction de première classe selon le code de la route, et qui est sanctionnée par une contravention de 50 000 GNF. On leur a dit qu’il est interdit de stationner aux intersections, c’est-à-dire dans les carrefours, qu’il y ait panneaux d’interdiction ou pas, un bon conducteur doit le savoir. Si un policier de la routière qui a appris te trouve stationné à ces endroits pareils, il te verbalisera, à plus forte raison qu’il y ait un panneau de signalisation. Tout ce que ces conducteurs-là veulent, c’est de les laisser faire ce qu’ils veulent… Ce n’est pas la police qui octroie ou qui attribue les points de stationnement. Qu’ils partent vers leurs syndicats pour connaître les lieux de stationnement. C’est la commune qui indique les points stationnement, et la police vient pour contrôler. Ces jeunes conducteurs ne veulent pas respecter les règles de la circulation. Pour preuve, ils roulent sans plaque, sans casque, sans des paires fermées. La conduite d’un engin auto ou moto est une infraction de la 4ème classe qui est sanctionnée de 400.000fg. La surcharge et le sens interdit sont aussi des infractions de 4ème classe, sanctionnées chacune de 300 000 GNF. C’est pourquoi, je demande à ces conducteurs de revenir à la raison et aux meilleurs sentiments. Ne fait pas le transport qui le veut, mais celui-là qui connait et qui respecte les règles de la circulation routière. De chercher à connaître et à comprendre ce qu’ils doivent faire et ce qu’ils ne doivent pas faire pendant la circulation pour éviter tout autre problème avec les services de la sécurité routière », conseille Michel Kandet Roger Bangoura.

 De N’Zérékoré, Jean David Loua pour Guineematin.com

Tél : (+224) 620.58.60.02

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