Dubréka : deux médecins condamnés pour dissimulation et vol de cadavre à l’hôpital préfectoral

Deux médecins, en service à l’hôpital préfectoral de Dubréka, ont été reconnus coupables de dissimulation de corps à l’audience correctionnel du lundi, 20 mai 2024. Pour la répression, Madame Camara et Ouendéno ont écopé d’une peine de 6 mois de prison assortis de sursis. Pourtant, tout au long du procès, les deux prévenus ont nié les faits qui leur sont reprochés, rapporte l’envoyé spécial de Guineematin.com qui a suivi l’audience.

Qu’est ce qui s’est passé dans cette affaire ? Le 16 mai 2024, Madame Camara, médecin titulaire qui était de garde à l’hôpital préfectoral de Dubréka, a reçu un corps des mains de la police, de la protection civile et des parents du défunt. Ledit corps avait reçu un coup de poignard dans le quartier Tobolon, où il a été retrouvé. Informé de cette situation, le parquet a ouvert une enquête à travers les Officiers de police judiciaire (OPJ) qui ont procédé à des arrestations. Pour élucider le parquet dans cette affaire, il a été instruit à un médecin légiste d’aller procéder à l’autopsie. Malheureusement, une fois sur les lieux, le corps avait été restitué par Émile Ouendéno, chef de la morgue, d’où leur arrestation.

Madame Camara, médecin et domiciliée à Kagbelen, ne reconnaît pas les faits de dissimulation et vol de cadavre. Pour elle, comme la police et la protection civile étaient présentes lors du dépôt du corps, toute la procédure avait été faite.

« Lors de notre garde dans la nuit du lundi à mardi, la police et la protection civile étaient partis avec un corps vers les 05 heures. C’est la stagiaire qui m’a réveillée pour dire qu’il y a un corps. Moi et la stagiaire, nous sommes allées à la morgue. On leur a dit de ne pas faire rentrer le corps à la morgue, on va le visionner. Les parents étaient là, le corps avait des coups de poignard. Quand on a fait le constat, après on l’a fait entrer dans la morgue. En partant, les policiers ne nous ont pas dit de garder le corps, mais je leur ai dit vous êtes venus déposer le corps dans quelque temps à 05h le courant va partir. Les parents et les policiers sont rentrés ensemble, on a gardé le corps. Quand on a fini de faire la garde, on a fait le rapport. Habituellement, quand nous finissons la garde, on rend tout ce qui doit être référé. On nous a dit les circonstances du poignard, c’est lors de la bagarre. Rien ne nous a été dit de plus. Du coup, j’ai laissé des consignes. Souvent, ce sont les parents qui viennent réclamer le corps. Je ne connaissais pas ces procédures-là. Les parents sont venus avec la police, pour moi tout était réglé. Je n’ai pas l’habitude de passer la garde, c’est le nouveau ministre qui a instruit que les médecins titulaires doivent être dans les hôpitaux. Sinon avant, je ne faisais pas la garde la nuit. J’avais appelé les parents pour leur dire que le courant allait partir, et que si le corps reste à la morgue, il peut y avoir dépravation, c’est ma première fois de gérer ce genre de situation. Je ne connais pas les modalités. Comme les parents sont venus avec la police, pour moi, tout était réglé. J’ai donné la consigne aux surveillants », a-t-elle déclaré.

Même son de cloche chez Émile Ouendéno, médecin interne à la maternité, responsable de la morgue, qui ne reconnaît pas les faits. Il dit ignorer s’il y avait une enquête et reconnaît avoir donné le corps aux parents du défunt.

« J’ai été appelé à 09 h par monsieur Condé, pour me demander si j’étais à l’hôpital. J’ai répondu que j’étais en route. Maintenant, je ne savais pas si le corps était venu avec les policiers. Je n’ai pas été informé des circonstances de l’arrivée du corps. Si on envoie un corps, on demande la personne responsable, le lien qui est entre le défunt et la personne, la destination. Lorsque les parents sont venus sous les consignes de l’équipe sortante la nuit, j’ai restitué le corps. Ça a été une erreur. Je suis toujours informé, je ne savais pas qu’il y avait une enquête. On avait aucune intention », a-t-il déclaré

Le ministère public, représenté par le substitut du procureur Kadiatou Kolou Guilao, a requis la condamnation des deux prévenus à deux ans de prison assortis de sursis.

« Dans la nuit du lundi au mardi, dans le quartier Tobolon, nous avons été informés de la découverte d’un cadavre. Une fois que le parquet est informé d’une telle situation, nous tenons à donner les conduites à tenir par les OPJ, surtout que la mort n’a pas été naturelle. Il était question que ce corps soit gardé là-bas à l’effet d’ouvrir des enquêtes, un médecin légiste a été déplacé. Mais, à peine le médecin légiste se présentait dans les locaux, ils ont été surpris de la restitution du corps. Finalement, l’enquête a été brouillée, c’est à partir de là qu’ils ont été interpellés par le commissariat. C’est ce qui les amène devant le tribunal. Le ministère public se pose des questions, est-ce que les faits dont on a parlé leur sont reprochables ? À la lumière des débats, nous répondons par l’affirmative. La police et la gendarmerie devraient savoir de quoi il est mort. Malheureusement, on n’a pas donné l’occasion au ministère public pour savoir ce qui s’est passé. On peut dire que le corps a été dissimulé, en ce sens qu’on avait besoin des enquêtes. Mais le corps a été restitué pour des raisons personnelles. Ce corps n’était pas mort de faits naturels. On avait procédé à des interpellations à Tobolon. Madame a déclaré que le corps n’était pas à l’état normal, elle était présente et elle a donné des consignes, elle ne s’est pas référée. Ils ont fait une entrave à l’exercice de la justice. Émile a dit pour restituer un corps, ça obéit à des formalités. Miraculeusement ce jour, il a ignoré tout ça. Dans ces hôpitaux, il y a tout un tas de problèmes. Émile qui a l’habitude de faire les choses dans le registre, banalement il a violé tout ça. Au vu de ce tout ce qui a été retenu, le ministère public requiert de bien les retenir dans les liens de la prévention. Pour la répression, je vous demande de les condamner à 2 ans assortis sursis. Ce n’est pas une première, il faudrait bien à travers ça qu’ils prennent conscience », a-t-elle déclaré.

Finalement, le tribunal a déclaré madame Camara et Émile Ouendéno coupables des faits de dissimulation de corps. Pour la répression, ils sont condamnés à 6 mois de prison, assortis de sursis.

Ismaël Diallo pour Guineematin.com

Tél. : 624 693 333

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