Mairie de Ratoma : se faire un extrait de naissance biométrique relève d’un parcours du combattant

La Guinée souhaite s’inscrire dans la modernité en digitalisant les documents administratifs pour les populations. Les extraits de naissance biométriques se placent dans cette dynamique, sauf que pour les citoyens de Conakry, le processus est un véritable parcours du combattant. Du versement de la somme d’argent à la banque à l’enregistrement dans les communes, c’est un labyrinthe. Une situation que dénoncent des citoyens rencontrés à la mairie de Ratoma, mercredi dernier, 21 septembre, a constaté sur place Guineematin.com à travers un de ses reporters.

À 7 h GMT, plusieurs personnes sont déjà regroupées dans l’enceinte de la Mairie de Ratoma, où les citoyens de cette commune doivent se rendre pour déposer leurs dossiers en vue d’obtenir le fameux extrait de naissance biométrique tant convoité, dans un délai minimum de 3 semaines. Sur une des tables installées à droite du bâtiment principal de la Mairie, un jeune dresse une liste des candidats du jour. À notre arrivée, 151 personnes figuraient déjà sur une liste dressée à cet effet.

Vers 7h30, un autre jeune est venu récupérer les feuilles pour aller dans la salle où sont célébrés les mariages. Dans cette salle, il explique : « Ce sont 80 personnes qu’on va prendre et on barre les personnes qui ne sont pas présentes quand je vais appeler », a-t-il lancé d’entrée.

À la fin de son appel, les autres qui n’ont pas été retenus ont commencé à crier ; mais rien n’y a fait, elles vont devoir passer la semaine prochaine puisque le travail ne se fait que les lundis, mardis et mercredis.

Mamadou Alpha Diallo, citoyen

Venu de Dubréka à la recherche du précieux sésame, Mamadou Alpha Diallo a exprimé sa déception face à cette situation. « J’étais venu ici pour faire mon extrait de naissance biométrique. Je suis venu de Dubréka parce qu’hier mardi, j’étais-là, on m’a dit qu’on ne prend que 80 personnes par jour. Aujourd’hui, j’ai quitté Dubréka pour être ici parmi 80 personnes. Je suis arrivé ici à 6h40, je me suis inscrit sur la liste, mais j’étais encore la 124ème personne. Arrivé dans la salle, un agent chargé de faire l’enregistrement a annoncé qu’ils ne peuvent prendre que 80 personnes par jour, sans aucune explication. Ils font les choses selon leur bon vouloir parce que le citoyen guinéen n’a que des devoirs, il n’a pas de droits. Cette situation est alarmante et c’est une déception totale à commencer par la décision des autorités au plus haut niveau : on exige les cartes d’identité biométriques pendant que cela n’est possible qu’à Conakry, pourtant la Guinée ne se limite pas qu’à Conakry. Il est difficile de décrire le calvaire que nous traversons », a-t-il dénoncé.

En outre, Mamadou Alpha Diallo demande aux autorités guinéennes de mettre tout en œuvre pour permettre aux populations d’obtenir plus facilement leurs documents sur l’ensemble du territoire national.

En colère, un autre homme lance : « je viendrai la prochaine fois à 2 heures du matin pour être sur la liste des personnes retenues ».

Malgré elles, plusieurs autres personnes sont rentrées à la maison sans avoir déposé leurs dossiers. « Il est difficile pour moi de sortir de mon quartier très tôt à cause de l’insécurité, peut-être que je vais devoir venir passer la nuit chez des parents un peu plus proches d’ici pour pouvoir déposer mon dossier sans être en retard », a lancé un autre citoyen.

Fodé Bangaly Dansokho, politologue et chroniqueur

Par contre, d’autres ont eu plus de chance, mais après plusieurs passages à la Mairie de Ratoma. Pour Fodé Bangaly Dansokho, politologue de formation, c’est la 3ème fois qui a été la bonne puisqu’il est 53ème sur la liste du jour. « Ça fait déjà 3 jours que je viens ici parce que je me lève très tôt le matin, à 4h30, pour venir ; mais une fois ici, on rencontre assez de problèmes. Par exemple, on trouve ici des listes qui sont déjà rédigées par les vigiles qui, la veille, soutirent 5 000 GNF aux gens. Mais quand ils arrivent ici, ils ont tous des problèmes pour l’enrôlement. Donc, il faut reconnaître par là une incapacité des agents de la commune parce que 80 personnes par jour, il faut reconnaître que c’est petit vu le nombre actuellement et vu la date butoir. Je pense qu’ils devraient revoir cela pour fluidifier la chose. Parce que certains peuvent aller jusqu’à une, deux ou trois semaines et cela peut provoquer de la colère », a-t-il expliqué.

Fodé Bangaly Dansokho invite les autorités à revoir cette situation en faisant une décentralisation pour éviter, notamment la corruption. « Je lance un appel au gouvernement, aux communes, aux maires, de revoir cela pour mettre à disposition des machines pour faciliter l’accès et éviter la corruption, parce qu’avec cette centralisation au niveau de la commune et avec une seule machine, ça va engendrer réellement de la corruption », suggère Fodé Bangaly Dansokho.

Mamadou Yahya Pétel Diallo et Thierno Hamidou Barry pour Guineematin.com

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