Hadja Fatoumata Bah, épouse de Diallo Souleymane : « le Lynx est comme une coépouse pour moi »

Figure emblématique de la presse guinéenne et vaillant combattant de la liberté de presse et d’expression, le doyen Souleymane Diallo, journaliste et fondateur du Groupe de presse Lynx-Lance, sera célébré ce samedi, 29 octobre 2022, par les professionnels de médias en Guinée. Cette célébration anthume est une manière pour les hommes de médias guinéens de magnifier et d’honorer ce monument de la plume pour le service inlassable qu’il rend à la Guinée depuis plus de trois décennies dans le domaine de l’information.

Et, à la veille de cette célébration, un reporter de Guineematin.com est allé à la rencontre de Hadja Fatoumata Bah, l’épouse de cette icône de la presse guinéenne, pour parler de sa vie aux côtés du journaliste Diallo Souleymane. Elle dit que Le Lynx (le journal satirique de mari) est comme une coépouse (et donc la seconde épouse de Diallo Souleymane) qui a bénéficié d’une grande attention.

« C’est une grande joie, une très grande joie, parce qu’il y a eu du chemin. Monsieur Diallo est un grand homme, un grand travailleur, il a beaucoup travaillé et on voit qu’il mérite cette cérémonie. Parce que c’est quelqu’un qui s’est beaucoup battu dans la vie, surtout en Guinée, pour la liberté de la presse. Donc, c’est une grande fierté pour moi qu’on le lui reconnaisse aujourd’hui, parce que ce n’est pas évident en Guinée. Il y a des gens qui l’apprécient, par contre il y a d’autres non. Et, il y a eu des occasions où il a eu des prix, mais ça a été reçu en Guinée avec froideur, surtout quand il a reçu le prix à Genève (en Suisse). Ailleurs, le gouvernement aurait fait quelque chose, mais les gens sont restés comme si rien ne s’était passé. A peine si on a annoncé même, ce sont les autres médias qui en ont parlé. Donc, de ce fait, si aujourd’hui des journalistes se réunissent et décident de lui rendre hommage, franchement je ne peux être que comblée. Je suis très heureuse et je les remercie. Je profite de l’occasion pour remercier du fond du cœur l’initiateur, monsieur Sanou Kerfala Cissé, et tous les organisateurs. Ce n’est pas toujours facile, parce que le Lynx c’est comme une coépouse pour moi (rire). Je peux dire que le Lynx a pris en partie mon époux, parce que Elhadj [Diallo Souleymane] passe plus de temps au boulot qu’à la maison. On a été un peu privés de son affection, les enfants et moi. Mais, comme c’est pour une lutte pour une bonne cause, on s’est dit qu’il n’y a pas de soucis, on va s’embarquer nous aussi. C’est comme ça que je me suis mise à ses côtés pour l’aider comme je pouvais », a expliqué Hadja Fatoumata Bah.

Avec ses révélations sur des cas de saignée financière (détournement, marché gré à gré,…) qu’il fait dans Le Lynx, Diallo Souleymane a souvent eu des ennuis avec le pouvoir. Il a fait de la prison, sans jamais assouplir sa plume ou démordre de ses sujets. Mais, il a aussi mis sa vie en danger à d’innombrables fois dans sa quête de l’information. Et, tout ceci, son épouse, Hadja Fatoumata Bah, l’a vécu de près.

« Ça a été difficile, parce que les enfants étaient petits. La première fois, il (Diallo Souleymane) n’a fait que 24 heures en prison, on l’a libéré. Mais, la deuxième fois, ça a pris beaucoup de temps ; et là, c’était compliqué. Les trois premiers jours, les enfants me voyaient sortir, aller et revenir, mais ils ne comprenaient pas ce qui se passait. Donc, finalement, j’étais obligée de leur expliquer. J’ai dit qu’on a arrêté papa, il a écrit un article qui n’a pas plu au président [Lansana Conté], donc on l’a arrêté, mais il n’a rien fait de mal. Les matins, je déposais les enfants à l’école ; et, après, j’allais à la sûreté pour déposer son repas. De là-bas, je courais derrière les avocats : Feu Me Gandhi et Me Bassirou Barry qui est encore là. Et, il y avait beaucoup d’autres avocats, mais j’étais le plus souvent avec ces deux-là, surtout Me Bassirou. Il m’a beaucoup aidé. Quand on a fait le jugement, on n’a pas voulu le libérer. Et, pourtant, il est dit qu’il devait être libéré, c’était en 1996 », a rappelé Hadja Hadja Fatoumata Bah.

Mamadou Tanou Bah pour Guineematin.com

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