Manifestation contre Dadis Camara : « quand on a décidé la date du 28 septembre 2009, Alpha Condé était en Guinée »

A la barre du tribunal criminel de Dixinn (délocalisé à la Cour d’Appel de Conakry) en qualité de partie civile dans le procès du massacre du 28 septembre 2009, François Louncény Fall continue de répondre à la salve de questions des avocats de la défense. C’est sa deuxième comparution devant cette juridiction de première instance et il reste imperturbable dans sa position. Et, en réponse à une des questions de Me Antoine Pépé Lama, un des avocats du capitaine Moussa Dadis Camara, ce diplomate guinéen a indiqué que Alpha Condé était en Guinée quand la date du 28 septembre 2009 a été retenue pour la manifestation des forces vives contre la candidature de Dadis Camara à la présidentielle qui devait permettre à la Guinée de renouer avec l’ordre constitutionnel.

Guineematin.com vous propose ci-dessous une partie de cette phase questions-réponses entre Me Pépé Antoine Lama et François Lounceny Fall.

Me Antoine Pépé Lama : Je pense qu’hier on vous a posé des questions relatives au complot. Est-ce que vous croyez à la thèse du complot dans la perpétration des crimes du 28 septembre ?

François Lounceny Fall : Cette question hier est arrivée, mais puisque vous insistez, je vais le dire sincèrement, étant un acteur du 28 septembre, j’étais un des membres des forces vives. Et, personnellement, je ne crois pas à la thèse du complot. C’est nous qui avons mobilisé des gens.

Me Antoine Pépé Lama : Qui a choisi la date du 28 septembre pour la manifestation ?

François Lounceny Fall : Le président de la Commission d’organisation, Bah Oury, vous a dit ici que c’est lui qui a choisi la date du 28 septembre 2009. Ce que je sais, c’est que toutes les réunions se faisaient au siège de mon parti. Je n’ai pas raté une seule réunion. Quand la date du 28 septembre a été proposée, nous l’avons tous entérinée.

Me Antoine Pépé Lama : À cette occasion, le président Alpha Condé était présent ?

François Lounceny Fall : Qaund on a décidé la date du 28 septembre, Alpha Condé était là. Alpha est parti quelques jours avant le massacre du 28 septembre.

Me Antoine Pépé Lama : Est-ce qu’il vous avait prévenu qu’il partirait quelques jours avant ?

François Lounceny Fall : Moi je n’ai pas su qu’Alpha Condé voyageait.

Me Antoine Pépé Lama : À quel moment vous avez su qu’Alpha Condé a voyagé ?

François Lounceny Fall : Moi je l’ai su après le 28 septembre.

Me Antoine Pépé Lama : En tant que leader politique ayant participé à cette manifestation, est-ce que vous ne pensez pas avoir une responsabilité, ne serait-ce que morale, dans ce qui s’est passé ?

Fransois Lounceny  Fall : Sauf si on veut transformer les victimes en bourreaux. Si on veut le faire, si c’est dans cette logique, on peut considérer un responsable des forces vives de cette manière. Sauf si on change les victimes en bourreaux. Mais, ce que je peux dire, ce que je regrette, c’est que les militaires soient venus brutalement massacrer les gens qui étaient réunis pacifiquement dans un enclos fermé. Le gouvernement d’alors avait d’autres manières qu’il pouvait utiliser, il pouvait interpeller les leaders après la manifestation, puisque nous étions tous à Conakry, mais ils ont utilisé la manière des représailles. S’il y a un remord, c’est ceux qui ont donné l’ordre d’aller tuer. Mais, je continue à pleurer pour les victimes. Parce que quand on perd des êtres qui nous sont chers, des gens qui sont morts pour n’avoir rien fait et qu’on les assassine, des femmes qui sont venues réclamer leur droit pour elles-mêmes, pour leurs maris, pour leurs enfants, quand on les massacres, en tant que responsable, c’est pour ça je suis venu ici. Je suis venu ici le cœur meurtri. C’est pour ça je demande justice. Mais, ceux qui ont tué, ceux qui ont donné l’ordre d’envoyer les soldats, le tribunal appréciera cette question.

Propos enregistrés et décryptés par Mohamed Guéasso DORÉ pour Guineematin.com

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