Kaloum : les pêcheurs locaux à couteaux tirés avec l’hôtel Noom pour un domaine au Port de Temenetaye

Dans la journée d’hier, vendredi 7 juillet 2023, les travaux de construction d’un mur, lancés sur ordre de l’hôtel Noom au niveau du port de pêche artisanale de Tenemetaye, ont failli tourner au vinaigre. Des ouvriers, accompagnés de gendarmes, avaient commencé les travaux, mais les pêcheurs locaux ont rapidement alerté les responsables de la pêche artisanale et les autorités du département en charge de la pêche et de l’économie maritime. Les travaux ont finalement été interrompus, mais la circulation dans la zone a été momentanément perturbée, a appris Guineematin.com à travers un de ses reporters.

Ce conflit opposant l’hôtel Noom aux pêcheurs du port de Temenetaye remonte à l’année 2011. Et, c’est le ministère de l’Habitat (sous le régime d’Alpha Condé) qui aurait accordé le débarcadère de Temenetaye à l’hôtel Noom, alors que ce domaine relèverait en réalité du ministère de la Pêche. C’est dans ce contexte que l’hôtel Noom a envoyé des ouvriers, accompagnés de gendarmes, pour récupérer ce domaine. Mais, les pêcheurs artisanaux ont opposé un niet à cette équipe. Et, la situation a failli partir en vrille ce vendredi.

Idrissa Kallo, responsable des relations extérieures, de la communication et de l’information de la Fédération guinéenne de la pêche artisanale

« L’hôtel (Noom) veut s’entêter, moi je le dis comme ça. Parce que depuis 2012, lors de la pose de la première pierre du centre de fumoir donné par l’Union européenne, nous avons appris que la partie du port de pêche artisanale de Temenetaye est octroyée à l’hôtel Noom. Donc, ça nous a étonnés, et pourtant : la place de l’hôtel, c’est un débarcadère. Le débarcadère a été aménagé par la BAD en 1992, et il faut comprendre que le port de Temenetaye ancestral. C’est en 1992 que ça a été aménagé avec toutes les infrastructures. Avec la complicité des autorités d’alors, on a vu que les infrastructures ont été démolies à cause de l’hôtel et pour construire quoi ? Pour construire le parking. Aujourd’hui, ils (l’hôtel Noom) tentent d’utiliser la gendarmerie, la force de sécurité, pour qu’ils puissent intimider la communauté des pêcheurs. C’est quelque chose qui ne va pas marcher. Nous n’arrivons pas à comprendre, parce qu’à travers la récupération des domaines publics, c’est le combat du CNRD et que le ministère de la pêche en a profité pour récupérer son domaine et celui-ci revient officiellement dans son portefeuille. Je pense qu’aujourd’hui le ministère de la pêche à tous les documents de ce domaine, y compris le titre foncier montrant que ça appartient au département de la pêche. Et puis, l’hôtel a trouvé les pêcheurs sur ce domaine. Mais, l’hôtel dit que c’est le ministère de l’habitat qui a donné le domaine (le port de pêche de Temenetaye) en bail. Pourquoi maintenant c’est au temps du CNRD qu’ils tentent de faire quelque chose ? Donc, on attend de voir si le CNRD va accepter cela et si c’est le ministère de la pêche qui va entrer en complicité avec l’hôtel pour retirer le domaine avec la communauté des pêcheurs. Mais, nous n’allons pas accepter que l’hôtel vienne faire quelque chose là-dessus. Peut-être que tous les pêcheurs seront en prison au temps du CNRD, mais nous n’allons pas accepter », a martelé Fodé Idrissa Kallo, le responsable des relations extérieures, de la communication et de l’information de la Fédération guinéenne de la pêche artisanale.

Venu sur les lieux pour apaiser les tensions entre l’hôtel Noom et les pêcheurs, Djibril Sylla, chef de secteur à la Direction nationale de l’économie maritime du ministère de la Pêche, a réussi à sensibiliser tout le monde et à interrompre les travaux qui avaient été entamés.

Djibril Sylla, chef section à la direction nationale de l’économie maritime du ministère de la pêche et de l’économie maritime

« Pour le moment, on ne peut pas qualifier ce qui se passe comme un conflit. C’est la situation d’incompréhension qu’on est en train de gérer. Donc, comme le voyez ici, le domaine a été mis au compte de l’hôtel Noom depuis 2011, parce je viens de voir l’acte avec les gendarmes que le ministère de l’habitat a mis le domaine au commissariat de l’hôtel Noom. Entre-temps, on a vu le groupe de Ali Sadi aussi qui était venu occuper les mêmes lieux. Lui, il avait même mis la clôture. Ensuite, il était même allé dans nos bureaux avec un document dans lequel il y avait des infrastructures qu’il devait faire en faveur de la communauté des pêcheurs, tout en occupant l’autre rive. Donc, après avoir mis la Cour, il y a eu le reversement du régime. Puis à un moment, on a vu des groupuscules qui sont venus enlever le mur qui était là, on en sait de l’ordre de qui. C’est resté comme ça et la communauté est revenue encore sur les lieux, parce que là où la communauté a été recasée, le lieu n’était pas aménagé. Donc, c’est dans cette situation que nous sommes ce matin, on nous appelé pour nous dire que l’hôtel Noom a amené des ouvriers, en compagnie des gendarmes, pour pouvoir reprendre la même Cour qui était faite par l’autre partie. Quand on a reçu cette information, mon directeur m’a mandaté de venir faire le constat et si possible d’arrêter les travaux. Heureusement nous nous sommes compris avec les gendarmes qui étaient là, on a arrêté les travaux, on a demandé à l’hôtel Noom de se référer au département de la pêche pour voir ce qu’il y a lieu de faire. Puisque jusqu’à preuve de contrôle, c’est domaine est au compte du ministère de la pêche. Et, quiconque doit venir, doit venir avec l’accord de ce ministère-là. Mais, si toutefois il vient avec des gendarmes, c’est que lui-même il n’est pas sûr de ce qu’il est venu faire sur le terrain. Parce que si les négociations avaient normalement été faites au préalable avec le département concerné, il n’aurait pas eu besoin de venir avec des gendarmes. Mais, pour le moment, il n’y a pas de problème, tout se passe bien. On a sensibilisé tout le monde en disant que le problème se trouve au plus haut niveau. Les gendarmes ont compris, l’hôtel aussi a arrêté les travaux. Donc, on se tourne désormais vers les autorités avec les documents dont ils disposent, on va voir qui a raison, qui ne l’a pas », a rassuré Djibril Sylla.

Mamadou Laafa Sow pour Guineematin.com

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