Coller à la tradition ou s’ouvrir au monde ? Les avis divergent à N’zérékoré !

Le monde est devenu un « village planétaire » où les pratiques les plus diverses ont envahi les populations africaines. Avec cette mondialisation (voulu ou imposée ?), le choc des cultures fait rage et de nombreuses personnes s’interrogent sur leur avenir. Si un problème de choix se pose entre tradition et modernité, une 3ème dynamique se pose de plus en plus, celle qui encourage le brassage culturel. La ville de N’zérékoré n’échappe pas à ce dilemme, a constaté sur place l’équipe de Guineematin.com basé dans la préfecture.

Trouvé assis dans une chaise, sous un manguier, à la devanture de sa concession au quartier Horoya 2, dans la commune urbaine, Alain HABA, un Colonel de l’armée à la retraite, âgé de 80 ans, se dit favorable à la tradition.

Colonel Alain Haba, traditionaliste

« Quelque soit les époques ou les circonstances, chaque peuple a une valeur culturelle ou un mode de vie propre à lui. En Afrique noire, on a un mode de vie spécialement appelé ‘’tradition’’ que beaucoup comprennent mal.

Pour beaucoup, quand on parle de tradition, c’est purement une moquerie ou une vie sans civilisation. Or, j’avoue que la vie traditionnelle est une vie éducative, remplie de savoir et de sagesse. La tradition est remplie de beaucoup de savoirs et des pratiques incroyables.

A titre d’exemples, je fais recours à la pharmacopée, à la royauté, au respect et au droit d’ainesse, au style d’habillement… Il n’y a pas très longtemps, il était difficile voire interdit aux enfants ou aux jeunes gens de s’introduire si facilement au milieu des grandes personnes comme pendant les cérémonies ou autour des corps dans les lieux de décès. Ce qui a complètement changé de nos jours au profit de la modernité. Les manières traditionnelles de résoudre les différends ont également changé et tant de choses. Cette vie de tradition que j’aime, tend à disparaître au profit de la modernité », a indiqué le colonel à la retraite.

Etienne Loua, maitre couturier

Même son de cloche chez Etienne Loua, maitre couturier âgé de 68 ans, résidant au quartier Horoya 1. « C’est une bonne question de votre part, car c’est la vie de la modernité qui est en train de dérouter la plupart des gens de nos jours. D’une parabole de nos parents, il est dit que ‘’quel que soit la durée d’un morceau de bois dans l’eau, il ne peut se transformer en caïman ni en serpent’’. Il nous faut aimer notre bon modèle de vie traditionnelle et non adopter une vie qui n’est pas de notre nature. Il est vrai que je suis religieux, mais je ne peux oublier la vie traditionnelle de mes anciens. Si vous faites une simple comparaison entre le mode d’habillement de la vie traditionnelle et celle de la modernité aujourd’hui, vous allez vous rendre compte qu’il est nécessaire de vivre une vie de tradition », a laissé entendre Etienne Loua.

Terminant ses propos, Etienne Loua n’a pas manqué de conseiller la nouvelle génération et tous ceux qui s’invitent aujourd’hui dans la vie de la modernité : « je conseille à toute cette nouvelle génération et à ceux qui oublient cette vie de tradition au profit de la modernité, d’avoir l’amour de la culture traditionnelle qui peut leur permettre d’avoir une bonne identité culturelle, leur permettre d’être mieux éduqués, d’être plongés dans une grande sagesse… ».

Fassou Lamah, maître électricien bâtiment

Par contre, Fassou Lamah, âgé de 27 ans, électricien en Bâtiments, domicilié au quartier Horoya 2, dit être du côté de la modernité. « Moi, à l’heure où je parle, je veux faire une vie de modernité, être un homme moderne dans tous mes comportements et mon style de vie. La vie moderne pour moi est une bonne vie et une vie à part. Dans cette vie, aucun n’a à en vouloir à l’autre dans ce qu’il fait. La vie moderne fait que nous sommes dans un monde planétaire, surtout avec la science et la technologie. C’est pourquoi je dis à tous ceux qui m’écoutent maintenant là d’adopter cette vie de modernité pour être éveillé et inspiré de beaucoup de choses », a lancé le jeune Fassou Lamah.

Jean Claude Kourouma, agent technique de Santé (ATS)

Pour Jean Claude Kourouma, alias J.C.K, agent technique de santé (ATS), rencontré au quartier Horoya 2 (Jamaïque), il faut un brassage entre la tradition et la modernité. « La tradition et la modernité nous cultivent. Sur ce, il est nécessaire de prendre des deux côtés les bons aspects. Quand on prend de la tradition, il y a assez de choses qui nous rappellent la vie de nos ancêtres comme : la pharmacopée, les bonnes éducations à travers les contes… qui sont pour moi des valeurs à respecter et à conserver sérieusement. Du côté de la modernité, c’est une vie que j’apprécie aussi par certains aspects de la vie en société. Par conséquent, il nous faut un brassage culturel nous permettant d’être de plein pied dans le monde actuel… ».

Enfin, Jean Claude Kourouma lance un message aux protagonistes des deux modes de vie. « Chaque chose doit avoir une limite. Je demande à la jeunesse et à la nouvelle génération d’aimer la modernité mais avec une limite. Egalement à ceux qui soutiennent totalement la tradition, dans tous ses aspects, il y a de ces pratiques de la tradition qui peuvent ternir notre identité culturelle de nos jours et qu’il faut abandonner », a-t-il lancé.

Une manière de rejoindre Léopold Sédar Senghor du Sénégal : « Nous ne récusons les civilisations ni de l’Europe, ni de l’Amérique, ni de l’Asie, où nous avons à prendre et à apprendre. Mais, nous devons penser et agir par nous-mêmes et pour nous-mêmes en nègres… ».

Depuis N’Zérékoré, Foromo Gbouo LAMAH et Jean David LOUA pour Guineematin.com   

Tel. : +224620166816/666890877

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