Violences policières contre les journalistes en Guinée : témoignage émouvant de Mariama Bhoye Barry (Cavi Médias)

Comme indiqué dans nos précédentes dépêches, le lundi dernier, 16 octobre 2023a a été une journée noire pour la presse avec la répression d’une marche initiée par le Syndicat des professionnels de la presse de Guinée (SPPG) pour dénoncer les restrictions imposées au site Guineematin.com depuis plus de deux mois en République de Guinée. Au-delà de la violente répression contre les acteurs des médias, 13 journalistes ont été arrêtés et gardés toute la journée, même ceux qui ont été blessés par la barbarie policière n’ont pas pu bénéficier de soins. Parmi les victimes de sévices corporels et d’arrestation figure Mariama Bhoye Barry, journaliste à Cavi médias.

Notre conteneur a d’abord été blessée avant d’être embarquée dans une fourgonnette. Heureusement, sa camera continuait à tourner et l’opinion publique a été fortement été émue par sa vidéo qui fait aujourd’hui le tour du monde, notamment grâce aux réseaux sociaux.

Elle a raconté à un reporter de Guineematin.com sa mésaventure

Le lundi, on était parti pour la couverture de la marche pacifique des journalistes. Je suis arrivée aux environs de 8 heures parce que je ne voulais vraiment pas manquer l’événement. Mais, dès mon arrivée, j’ai constaté qu’il y avait beaucoup de pick-up au rond-point du Port autonome. J’étais étonnée du dispositif qui était là juste pour une marche surtout des journalistes qui ne sont pas armés. Les journalistes venaient au fur et à mesure. Dès qu’ils ont vu la mobilisation, ils ont commencé à dire de quitter, de ne pas s’arrêter, qu’il est interdit de se regrouper. C’est comme ça qu’ils ont encerclé les journalistes. Ils ont commencé à nous pousser. Ils nous ont poussés jusqu’à la cité Chemin de fer. Quand nous sommes arrivés là-bas, il y a un officier qui parlait avec Sékou Jamal Pendessa, le Secrétaire général du SPPG. Dans leurs discussions, ils ont dit à Pendessa qu’ils ont reçu consigne qu’il n’y ait aucun regroupement…

Pendessa est revenu vers les journalistes pour expliquer ce qu’il s’est dit avec le responsable des forces de l’ordre. Moi, j’étais en train de filmer. J’ai vu un des officiers faire des signes avec ses mains. Il a fait un signe de croix avec ses mains deux fois. Pour moi, c’était une façon de dire aux autres policiers qui étaient là d’arrêter, de ne plus pousser les journalistes. Je n’avais pas compris que c’était une manière de donner l’assaut, de lancer les gaz sur les journalistes. J’étais en train de filmer, un officier m’a visé. Je ne sais pas si son objectif était de gâter ma caméra ou d’en finir avec moi. Le projectile qui est venu, je me suis un peu courbée. Il est tombé sur ma main. L’objectif de ma caméra est tombé dans çà. Le gaz s’est répandu sur nous… Je ne voyais plus rien, je ne savais plus où j’étais. Dans les vidéos, la façon dont j’ai crié, j’ai vraiment cru que c’en était fini avec nous. C’était vraiment horrible. Je craignais qu’on me retirait ma caméra. J’ai crié le nom d’un de nos confrères, Abdoul Latif, qui était en face de moi. Je disais à Latif de saisir ma caméra. C’est ainsi que deux officiers sont venus me ramasser pour m’envoyer dans leurs pick-up, ils voulaient m’assommer avec leurs matraques…

Il y a un journaliste qui s’appelle Ibrahima Foulamory Bah (du site Le Courrier de Conakry)  qui, heureusement ou malheureusement, est venu vers mon dos, m’a encerclé. Et les matraques sont tombées sur son cou. Et, actuellement, il est gravement touché sur le cou. Je suis vraiment désolé parce que si c’était tombé sur moi, je ne sais pas aujourd’hui si je serais là. Il m’a sauvé la vie. Je ne cesserai jamais de lui dire merci pour ça, et j’espère qu’il va se rétablir rapidement. Je demande que justice soit rendue parce que nous, on était là-bas pour faire notre travail…

https://www.facebook.com/watch/?v=837446971124035

Amadou Lama Diallo pour Guineematin.com

Tél : 669 681 561

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