Volet recettes du projet de la LFI 2024 adopté : voici les interrogations, les constats et recommandations du CNT

Après des débats intensifs du 18 au 25 décembre 2023, les conseillers nationaux ont mis en lumière des préoccupations cruciales lors des travaux sur le volet recettes du projet de LFI 2024. La rapporteure de la commission du plan, des affaires financières, madame Fatima Camara, a égrené les points de divergence dans le processus. C’était lors de la séance plénière tenue le 26 décembre dernier à l’hémicycle, a constaté sur place Guineematin.com à travers un de ses reporters.

Devant les conseillers nationaux de la transition, les membres du gouvernement, les représentants des institutions républicaines et plusieurs conseillers municipaux présents lors de la plénière, la rapporteure de la commission du plan, des affaires financières et du contrôle budgétaire a d’abord rappeler les interrogations sur lesquelles le volet recettes de la LFI 2024 a été examiné.

« Les écarts constatés sur la mobilisation des ressources entre la LFR et les projections du PLFI 2024; la hausse, la baisse ou l’absence de prévisions de recettes sur certaines lignes ; les exonérations qui affectent de façon très négative la mobilisation des ressources au niveau des douanes et des impôts ; la situation de paiement des dividendes et de I’IMF par les sociétés publiques ; les amendes relatives au mauvais stationnement des véhicules ; la situation des restes à recouvrer au compte de la DGI et la DGD pour l’exercice 2023 ; la rétrocession des recettes aux BAS ; l’impact du projet Simandou sur la mobilisation des recettes ; les nouvelles mesures de sécurisation des recettes ; les nouveaux plans de modernisation des régies financières ; la possibilité de mobilisation des appuis budgétaires ; L’impact de l’explosion du dépôt de carburant à Kaloum sur les recettes : les dispositions envisagés pour la mobilisation des recettes supplémentaires en PLFI 2024 pour 1359,26 Mds, étant donné que les objectifs assignés en 2023 n’ont pas été atteints ; les raisons de la baisse des recettes de la Direction Générale du Trésor et de la Comptabilité Publique par rapport à la LFR 2024 ; les projetions des recettes minières dans la LFI 2024 ; le taux directeur et la réserve obligatoire de la BCRG ; le non-paiement, par les sociétés minières, de la taxe à l’extraction, à l’exception de SMB ; la baisse drastique de la taxe à l’exportation pour l’année 2024 de la SAG ; la situation des recettes générées par le ministère en charge de la pêche et les difficultés rencontrées pour leur mobilisation ; les éléments factuels sur lesquels les prévisions des recettes sont bâties au Ministère des postes, des télécommunications et de l’économie numérique ; la révision de la taxe prélevée dans les hôtels pour les nuitées la mobilisation des ressources liés aux permis de travail ; les motivations des nouvelles dispositions fiscales et la lecture de l’administration fiscale sur le courrier réponse du Patronat relatif aux nouvelles mesures fiscales », a déclaré la rapporteure de la commission du plan, des affaires financières.

Madame Fatima Camara a également évoqué les dispositions envisagées pour mobiliser des recettes supplémentaires en PLFI 2024, à hauteur de 1 359,26 Mds, suite à des objectifs non atteints en 2023. Elle a aussi présenté une liste de plusieurs constats faits par le Conseil National de la transition ainsi que plusieurs recommandations qu’il a formulées au gouvernement de la transition dirigée par Dr Bernard Goumou.

« A la lumière des interrogations soulevées et des réponses apportées par les représentants du gouvernement, des constats assortis de recommandations spécifiques ont été formulés ainsi qu’il suit : au regard des besoins croissants en ressources de financement, le CNT encourage le Gouvernement, à travers le Ministère en charge des finances, pour les démarches entreprises dans le cadre de l’identification de nouvelles niches de recettes. A cet effet, l’invite à lui fournir la liste exhaustive des dites niches avant la LFR 2024 ; le CNT constate que la recommandation relative au versement au trésor public des recettes issues des contraventions liées au mauvais stationnement des véhicules n’a pas été prise en compte. Etant donné que ces recettes ne sont pas versées au trésor, le CNT invite le Gouvernement (Ministère en charge des Finances, Ministère de la Sécurité et de la Protection Civile et le Ministre en charge de l’administration du territoire) à suspendre cette activité en attendant la mise en place d’une réglementation permettant le versement desdites recettes dans les comptes du trésor ; le CNT constate le faible taux de rétrocession des ressources destinées aux collectivités locales à travers 1’ANAFIC. Cette situation n’est pas liée qu’au trésor, mais aussi et surtout au faible niveau d’absorption des ressources mises à disposition. L’ANAFIC n’ayant pas à date de Conseil d’Administration, le CNT invite le Gouvernement à sa mise en place dans les meilleurs délais. Cela permettrait d’améliorer sa capacité de l’absorption et, par ricochet, impacter positivement les populations à la base.

En attendant la mise en place des CA, le CNT invite le gouvernement à faire valider le budget de l’ANAFIC et-de tous les EPA n’ayant pas de CA, par le Ministère de l’économie et des finances ; au regard des efforts de mobilisation fournis par la LONAGUI, en termes de dividende, le CNT l’invite à poursuivre ses actions dans ce sens ; le CNT s’est impliqué, à travers sa «commission du plan, des affaires financières et du contrôle budgétaire», dans la médiation entre les structures de jeux et l’administration fiscale, en vue de l’application de l’article 513 du code général des impôts, relatifs à la taxe sur les jeux de hasard. A cet effet, il invite les entreprises de jeux au respect scrupuleux des dispositions dudit article. A noter que l’application de cette disposition permettra de rehausser les prévisions de recettes à plus de 250 Mds ; dans le souci d’améliorer le niveau de mobilisation et la sécurisation des recettes fiscales et douanières, Le CNT invite le Gouvernement à accélérer le processus de mise en œuvre de la facturation électronique par l’administration fiscale et la dématérialisation des paiements douanières à l’intérieur du pays ; le CNT constate que l’intensification des activités minières n’est pas proportionnelle à la mobilisation des ressources y afférentes.

Cet état de fait est dû à la non transformation des matières premières sur place, d’une part, et aux exonérations fiscales surréalistes d’autres part ; ce qui compromet les intérêts de l’Etat. À titre illustratif : la SAG bénéficie d’un congé fiscal de 2020 jusqu’à 2025 et est exonérée des impôts et taxes suivants : La Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA), Impôt Minimum Forfaitaire (IME), l’impôt sur les sociétés (IS), les Droits d’Enregistrement (DE), la Patente, la Retenue sur loyers et la Taxe d’Apprentissage (TA). Cela entraîne un manque à gagner estimé à 332 ,56 Mds GNF par an ; GAC est exonéré des impôts et taxes suivants : la Taxe sur la Valeur Ajoutée (TVA), I’Impột Minimum Forfaitaire (IME), I’Impôt sur les sociétés (BIC). Soit un manque à gagner estimé à 19, 66 Mds FG par an ; la SPIC est exonérée des impôts et taxes suivants: la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), I’Impôt Minimum Forfaitaire (IMF), I’Impôt sur les sociétés (1S), CFU, IRVM, la Patente, la Taxe d’Apprentissage (TA). Soit un manque-à-gagner estimé à 94, 55 Mds GNF par an ; la SOCIETE MINIERE DE MANDIANA est exonérée des impôts et taxes suivants : la taxe sur la valeur (TVA), I’Impôt Minimum Forfaitaire (IMF), I’Impôt sur les sociétés (1S) et la Taxe d’apprentissage (TA) Soit un manque-à-gagner estimé à 93,93 Mds GNF par an. La SMB est exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA): soit un manque-à-gagner estimé à 790,61 Mds GNF par an :

WINNING CONSORSIUM RAILWAY GUINEA SAU est exonérée des impôts et Taxes suivants : la taxe sur la valeur ajoutée (TVA), I’lImpôt Minimum Forfaitaire (MF), I’Impôt sur les sociétés (1S) congé fiscal de 25 ans, la Patente, la Taxe d’Apprentissage (TA). Le manque-à-gagner par an est estimé à 238,73 Mds GNF. La société KOUROUSSA GOLD MINING est exonérée de la taxe sur la valeur ajoutée (TVA). Le manque-à-gagner par an est estimė à 94 ,014 Mds GNF. La Société Minière de Dinguiraye (SMD) est exonérée de la TVA, Retenue sur Loyers, la Taxe d’Apprentissage (TA). Le manque-à-gagner par an est estimé à 156,96 Mds GNF. Il ressort de ces 8 exemples seulement, un manque-à-gagner par an de 1915,6 Mds de GNF sur les recettes minières, au compte de la Direction Générale des Impôts. Quant à la Direction Générale des Douanes, le manque à gagner par an est estimé à 6 064,41 Mds GNF dont :

536,38 Mds au titre du régime dérogatoire du code minier, 1610,26 Mds au titre des conventions particulières, 3 905,50 Mds au titre des protocoles, accords et conventions et 12.27 Mds au titre des exonérations exceptionnelles et conditionnelles. Au-delà de cette illustration, ce manque à gagner sur les recettes minières aurait également permis de faire face aux conséquences de certaines catastrophes comme celle survenue au dépôt d’hydrocarbures de Kaloum. Il est à préciser que ces exonérations abusives n’émanent pas du régime actuel. Elles sont le fait du lourd passif minier des régimes précédents. Par ailleurs, grâce aux réformes des nouvelles autorités, les recettes minières sont passées de 3142, 22 Mds en 2020 à 4 272 Mds en 2022 soit une hausse de plus de 1000 Mds (35,95%). A la lumière de ce qui précède et nonobstant l’Ordonnance O/2021 /001 /PRG/CNRD/SGG du 16 septembre 2021, portant prorogation des Lois Nationales, des Conventions, Traités et Accords Internationaux en vigueur à la date du 05 septembre 2021, le CNT attire l’attention du Chef de I’Etat sur la nécessité de la révision de ces conventions qui sont défavorables au développement du pays, et compromettantes pour l’avenir des futures générations.

Il le rassure de son soutien total dans cette démarche. Le CNT réitère son inquiétude face à l’accroissement du volume des importations de poussins d’un jour alors que le secteur privé a énormément investi pour répondre au besoin du marché. Par conséquent, il recommande la taxation de leur importation, dans les mêmes conditions que les œufs de consommation et les carcasses de poulets congelés, en vue d’encourager la production locale et lutter contre la concurrence déloyale ; le CNT invite le Gouvernement à s’acquitter de la contrepartie guinéenne évaluée à un million cinq cent mille dollar US au titre du projet PRODEIC (Diplomatie économique), pour bénéficier d’un financement de 17 Millions d’euros ; le CNT invite le Gouvernement, à travers le ministère des affaires étrangères, à organiser un Forum de la Diaspora pour identifier et évaluer les possibilités de financement de l’économie guinéenne ; pour financer la construction des infrastructures artisanales et promouvoir la compétitivité des produits artisanaux Made in Guinée, le CNT invite le Gouvernement à envisager la création d’une taxe de développement artisanal (TDSA). Le taux et la base d’imposition, les modalités de collecte et de rétrocession peuvent être précisés dans les projets de lois de finances rectificatif 2024. Il peut être aussi envisagé la création d’une autre taxe pour soutenir l’Industrie Cinématographique et de la Production Audiovisuelle (TDICA) ; Le CNT constate avec satisfaction les efforts réalisés par le Gouvernement dans le cadre de la mobilisation des dividendes payées par les sociétés assujetties.

Toutefois, il ressort de nos analyses, à partir du tableau de bord de la direction du portefeuille, que sur 47 sociétés, 13 sont à l’arrêt, 16 déficitaires, 6 en cours de création, 2 ont payé, 8 n’ont pas payé et 2 ont partiellement payé. Au regard de cette situation, le CNT invite le Gouvernement à mettre tout en œuvre pour recouvrer les dividendes des sociétés qui n’ont rien payé au compte de l’exercice 2022 à savoir : SOGEKA, SONAPL, Bel Air Mining, Alliance Mining Commodité, Alliance Mining Responsable, Société Minière de Boké, Société de distribution des chaînes de télévision ; Prendre des mesures fermes pour redresser, privatiser ou fermer si nécessaire celles qui, depuis 5 ans, exercent à perte », a suggéré au gouvernement.

Mamadou Laafa Sow pour Guineematin.com
Tel : 622919225

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