Retrait du Mali, du Burkina et du Niger de la CEDEAO : « c’est une décision risquée », selon Dr Zotomou Kpoghomou

Dr Edouard Zoutomou Kpogomou, président de l’UDRP (Union Démocratique pour le Renouveau et le Progrès)

Les juntes militaires qui dirigent le Mali, le Burkina Faso et le Niger décident de se retirer de la Communauté Economique des Etats d’Afrique de l’Ouest (CEDEAO). Les putschistes, sous sanctions de l’institution depuis leur prise du pouvoir illégale, accusent la CEDEAO d’être sous le diktat de puissances extérieures. Dr Edouard Zotomou Kpoghomou, président de l’UDRP, interrogé à ce sujet par un reporter de Guineematin.com, parle d’une décision risquée pour des pays enclavés et sous influence Russe.

Suite aux coups d’État en 2020 au Mali, en 2022 au Burkina et 2023 au Niger, la CEDEAO avait suspendu les trois pays, leur imposant des sanctions économiques, et menaçant d’une intervention militaire le Niger. Les 3 juntes ont décidé le dimanche 28 janvier 2024 de se retirer de la CEDEAO et l’ont notifié à l’instance.

Dr Edouard Zotomou Kpoghomou, président de l’UDRP et membre de l’ANAD, estime que cette décision est risquée pour des pays enclavés, dépendant de leurs voisins. « Je trouve quand-même que c’est une décision risquée dans la mesure où les trois pays constituent ce que les anglais appellent land-locked, c’est-à-dire que ce sont des pays qui n’ont pas d’ouvertures sur la mer, qui dépendent d’autres pays frontaliers qui sont membres de la CEDEAO. Moi, j’avais pensé qu’au lieu de se retirer, ils devaient plutôt rester pour faire valoir leurs points de vue et obliger la CEDEAO à les soutenir dans leurs mouvements divers. C’est-à-dire la lutte contre le terrorisme et d’autres luttes sur d’autres fronts. Mais avec ce qui arrive maintenant-là, même si la CEDEAO doit être reprochée de beaucoup de choses, il faut se dire qu’avec le risque du terrorisme, surtout dans les trois Etats, il y a des risques sécuritaires. Alors qu’au niveau de la CEDEAO, même si celle-là n’avait pas pris des dispositions pour les aider, moi je pense qu’ils pouvaient rester et convaincre tous les autres pour former un front contre le terrorisme », estime-t-il.

Les 3 pays dénoncent des ingérences dans les décisions que prend la CEDAO. Dr Zotomou Kpoghomou soutient que ces pays sont également sous influence d’autres puissances. « Ils justifient ce départ au manque et d’ouverture à certaines puissances. D’accord. Si des puissances sont en train de manipuler la CEDEAO, il y a aussi des puissances qui sont en train de manipuler ces 3 Etats parce que de part et d’autre, il y a des puissances. Si dans ces pays, c’est la Russie qui est mise en exergue ; dans les autres pays, c’est la France qui est mise à l’index. Dans tous les cas, ce sont des puissances qui sont en train de manipuler de part et d’autre. Je pense donc personnellement, ça n’aurait pas dû se faire. Il y a beaucoup de risques associés à cela. Et en cas d’épidémie, il suffira qu’il y ait une mésentente avec un pays frontalier, comme la Côte d’Ivoire, le Togo, le Bénin ou alors l’Algérie, si on prend le nord du Niger, pour qu’il y ait une autre crise à l’intérieur de ces pays. Je crois que c’est mal calculé », déclare le président de l’UDRP.

En ce qui concerne l’aspect politique, Dr Kphogomou craint que le retrait ne justifie une transition prolongée des juntes militaires au pouvoir, entravant ainsi le retour à l’ordre constitutionnel. « En se retirant de la CEDEAO, il faut dire qu’ils sont en train de justifier une transition à perpétuité. Parce que d’une part, ils diront sans eux, c’est eux. S’ils pensent qu’ils sont en train de faire en sorte qu’ils soient indépendants, le travail n’étant pas achevé, ils trouveraient une justification pour qu’eux, ils restent au pouvoir pendant le plus longtemps possible. Je ne pense pas que cela puisse favoriser le retour à l’ordre constitutionnel. En tout cas, ce retour à l’ordre constitutionnel, ce n’est pas pour demain », a-t-il laissé entendre.

Mamadou Laafa Sow pour Guineematin.com

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