Tierno Monénembo tacle le CNRD : « ce n’est pas un régime qui a de bonnes intentions pour son pays »

Thierno Monénembo, écrivain

Connu pour sa plume acerbe contre les dictatures successives qui ont freiné la Guinée dans son épanouissement, l’intellectuel Tierno Monénembo remet ça. Dans le viseur de l’écrivain de renommée internationale, la junte du CNRD qui a renversé Alpha Condé il y a un peu plus de deux ans. A l’occasion d’une conférence de presse qu’il a animée ce mercredi, 31 janvier 2024, au siège de la Maison de la Démocratie et des Droits de l’Homme de Guinée (M2DH) à Nongo, le prix Renaudot a tiré à boulets rouges sur le CNRD, dans un contexte de restriction des libertés individuelles et collectives. Il affirme que les guinéens ne survivront pas à une sixième dictature, s’ils ne prennent pas leurs responsabilités, a constaté sur place Guineematin.com à travers ses reporters.

Cette conférence de prise de responsabilité de l’intellectuel avait pour thème « les dérives autoritaires du CNRD et la prise en otage de l’avenir démocratique de la Guinée : constat, analyse, enjeux et solutions ». Connu pour son franc-parler et son esprit critique, Thierno Monénembo dénonce la naissance d’une nouvelle dictature en Guinée sous le régime du CNRD. « J’ai l’impression que depuis qu’il est venu au pouvoir, notre Lieutenant-Colonel, excusez-moi, notre Général d’armées, n’a cessé de nous lancer des signaux, de nous adresser des messages à peine codés. J’ai l’impression qu’aujourd’hui, la lecture est toute faite, les guinéens savent très bien ce qui se passe. Qu’est-ce qui se passe ? C’est la construction, devant nous tous, d’une dictature, certainement une des plus féroces que le pays ait connu. Cette construction-là, elle est manifeste. On la sent se préparer, on la sent venir. On sent déjà sa férocité, puisqu’un régime qui commence par fermer tous les moyens de communication, qui commence par arrêter des journalistes, interdire la chose la plus indispensable aujourd’hui à la communication, internet, c’est une dictature forcément. Ce n’est pas un régime qui a de bonnes intentions pour son pays. Donc, tous les guinéens sont prévenus. Et on peut empêcher cela. C’est évident qu’il suffit d’un minimum pour imposer un respect du chronogramme de la transition, pour imposer des élections à date, des élections régulières, transparentes, faire en sorte que la Guinée finisse enfin avec ce cycle infernal de dictatures que nous subissons depuis 1958 », a-t-il déclaré.

Par ailleurs, Tierno Monénembo s’adresse aux intellectuels. « Je voudrais simplement dire aux guinéens : demain, quand le pire sera là, devant nous tous, sur nos têtes à tous, personne ne dira qu’il ne savait pas. Toutes les dictatures qui étaient faites en Guinée ont été faites par les guinéens eux-mêmes. J’ai dit plusieurs fois que la Guinée est une usine à dictatures. Les guinéens ne savent rien faire d’autre que de fabriquer des dictateurs. Dans notre pays, tous les automatismes sont faits pour cela. Dès que quelqu’un arrive, on applaudit, même les intellectuels applaudissent. Un intellectuel qui applaudit est un criminel ! L’intellectuel n’applaudit pas. L’arme de l’intellectuel, c’est l’esprit critique, c’est l’observation lucide des choses », a lancé Tierno Monénembo.

L’auteur du roman Les Crapauds-brousse affirme que si le pays va mal, c’est par la faute des « irresponsables » qui nous dirigent depuis 1958. « Je vous assure, la Guinée ne survivra pas à une sixième dictature. On est déjà très mal en point. Notre société est déchiquetée de partout, par des irresponsables qui ont posé des actes inutiles et qui ont cassé l’économie, qui n’ont jamais assis un projet historique et social digne de ce nom. Il suffit de la moindre étincelle pour que le pays s’embrase. Pas par la faute des guinéens. Tous cherchent à vivre ensemble. C’est par la faute des irresponsables qui nous dirigent depuis 1958. C’est maintenant, c’est le moment ou jamais d’agir. Chacun a son mot à dire pour l’avenir de la Guinée, chacun a quelque chose à faire… Il faut que les guinéens prennent leurs responsabilités aujourd’hui. Sinon, ça sera trop tard », prévient-il.

Malick DIAKITE et Ibrahima Touré pour Guineematin.com

Tél : 626-66-29-27

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