Prolongement de la transition en Guinée : « Nous ne l’accepterons pas», prévient Aliou Bah (MoDel)

A huit mois de la fin de la transition en Guinée, selon l’accord signé par nos autorités  avec la communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest (CEDEAO), plusieurs acteurs politiques commencent à redouter un glissement du chronogramme de la transition. Ils estiment que rien n’est fait dans le sens d’un retour rapide à l’ordre constitutionnel. C’est le cas de Aliou Bah, président du Mouvement Démocratique Libéral (MoDel). Pour son parti il est hors de question d’accepter un glissement du calendrier de la transition en Guinée. Il l’a dit en marge de l’assemblée  générale hebdomadaire du MoDel de ce samedi, 31 mars 2024, à Conakry, a appris Guineematin.com à travers un de ses reporters.

Selon ce leader politique le CNRD a eu tout le temps pour préparer la fin de la transition mais il n’a posé aucun acte pour cela. Or, il est tenu à respecter l’engagement qu’il a pris de rendre le pouvoir aux civils fin 2024. Et si la junte ne s’y conforme pas, Aliou Bah rappelle que le peuple de Guinée est débout et il saura y faire face.

« Ce qui nous intéresse aujourd’hui et pour quoi nous avons tenu notre Assemblée générale, c’est davantage faire comprendre à nos compatriotes que le CNRD a pris librement l’engagement de finir la transition, plus tard au mois de décembre 2024. Ils ont élaboré seuls une charte, ils ont élaboré seuls dix points qu’ils ont inscrits dans un chronogramme pour dire que la transition va se dérouler jusqu’en décembre 2024. Donc ils ont pris un engagement solennel devant le peuple de Guinée avec le monde entier comme témoin. Depuis cela, ils n’ont posé aucun acte qui va dans le sens du retour à l’ordre constitutionnel. Aucun acte n’est posé dans le sens que nous n’avons pas de Constitution, nous n’avons pas de fichier électoral, nous n’avons pas d’organe chargé d’organiser les élections. Et récemment, au lieu de mettre en place les dispositions nécessaires pour organiser les élections communales et faire remplacer les conseillers dont le mandat a expiré par des conseillers élus, ils préfèrent mettre en place des délégations spéciales qu’ils peuvent faire administrer les collectivités par les gouverneurs et préfets. Tout cela, c’est un esprit de domination, c’est un esprit de confiscation du pouvoir. Nous sommes dans une ère où la jeunesse guinéenne en particulier voudrait vivre dans un pays calme, un pays de paix où il fait bon vivre. Le CNRD n’est pas une autorité élue, il est le résultat d’un coup d’État. Lorsqu’ils sont arrivés, on leur a donné tous les conseils. Le MoDel leur a prévu 4 mémorandums contenant des propositions concrètes pour la conduite de la transition. Personnellement, j’ai eu à conseiller le président de la transition. Vous avez eu toutes nos prises de parole. Mais cependant, s’ils veulent manœuvrer pour faire glisser le calendrier, nous ne l’accepterons pas. Parce qu’aujourd’hui, ce n’est pas le temps qui a manqué au CNRD. 3 ans presque de transition, si le temps dont ils disposaient, ils avaient posé des actes allant dans le sens du retour à l’ordre constitutionnel, on aurait été rassuré. Mais tous les jours, ils montrent l’envie de confisquer la totalité du pouvoir. Aujourd’hui, ils ont éteint les médias, ils ont séquestré les acteurs politiques et les acteurs sociaux, ils les ont contraints à l’exil, ils ont confisqué les libertés collectives, aucun n’a désormais le droit de dire ce qui ne va pas dans son pays, nous n’avons pas d’internet, nous n’avons pas d’électricité, nous passons un mois de ramadan extrêmement difficile dans la chaleur et sous les moustiques. Ceux-là, ils ont dit qu’ils sont venus pour faire la refondation. Est-ce le résultat de la refondation ? Comment les Guinéens vivent-ils par rapport à la manière dont ils parviennent il y a 4 ou 5 ans ? C’est inacceptable. Il faut que la junte militaire revienne à la raison. Elle ne peut pas manipuler les Guinéens pour continuer à gouverner ce pays par la force au-delà de leur engagement (à finir la transition) en décembre 2024. Et c’est le message essentiel que le MoDel a voulu faire passer aujourd’hui. La décision aujourd’hui, c’est de se battre pour que la transition du CNRD prenne fin au mois de décembre 2024, conformément aux engagements pris par la junte. Ils étaient libres de prendre leurs engagements. Et toute personne qui veut les aider dans le sens de manœuvrer, qu’elle comprend que les Guinéens sont debout. J’ai dit au chef de la junte dès les premières heures de la transition que les Guinéens sont debout. S’ils les militaires étaient capables de déloger Alpha Condé, ils l’auraient fait avant. Mais il a fallu que les Guinéens se battent pour que les militaires aient le courage de faire un coup d’État. Qu’ils comprennent que les Guinéens sont là, conscients et regardants. Ils n’ont pas disparu, on ne peut pas les faire taire. On en est certains, mais il reste d’autres qui vont continuer à se battre. Donc c’est ce message que nous voulons adresser aux autorités de la transition et demander à l’ensemble du peuple de se mobiliser. Ce n’est pas contre un individu, ce n’est pas contre une communauté, c’est pour l’intérêt de la Guinée. Nous voyons des exemples un peu partout dans le monde, la Guinée ne peut pas continuer à être la mauvaise exception de l’Afrique. Ce n’est pas possible», a dit le président du MoDel.

Mamadou Laafa Sow et Hassanatou Bah pour Guineematin.com

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