Ancien ministre de l’Éducation nationale et de l’Alphabétisation sous le régime Alpha Condé, le Pr Alpha Amadou Bano Barry vient d’inscrire sa plume au vaste et riche patrimoine littéraire de la Guinée. Intitulé “Une année, deux mois et quatre jours : le temps pour comprendre la Guinée », ce livre poignant livre un diagnostic approfondi des dysfonctionnements majeurs qui entravent la capacité de la Guinée à transformer son potentiel en richesses nationales. Fort de son expérience acquise au fil des ans, l’auteur propose également des solutions novatrices pour une meilleure gestion de l’État guinéen, rapporte un journaliste de Guineematin.com qui a parcouru ce livre pour vous.
Dans cet essai percutant, Pr Bano Barry explore les « problèmes systémiques » qui minent le développement économique et social de la Guinée. En analysant “une année, deux mois et quatre jours” pleine d’expériences, qui marque le temps passé à la tête du Ministère de l’éducation nationale sous le règne du président Alpha Condé, l’intellectuel dévoile les obstacles qui entravent le progrès et propose des pistes de réflexion pour surmonter ces défis.
À travers ses années d’expérience en tant que ministre, ce professeur des universités guinéennes offre un regard critique mais constructif sur les défis auxquels la Guinée est confrontée. Dans cet essai édité par Harmattan Guinée, l’éminent sociologue dit être parti des données factuelles, historiques et statistiques pour dresser cet état des lieux. Comme l’a dit l’auteur lui-même, « ce livre est un diagnostic des dysfonctionnements majeurs qui affectent la capacité de la Guinée à transformer son potentiel en richesses nationales ».
Plus loin, Pr. Bano le présente comme étant « un document d’analyses, de compréhension et d’explications des pesanteurs qui bloquent la Guinée dans sa marche vers la transformation de son potentiel naturel”.
Structuré en deux parties essentielles, ce livre truffé d’idées révolutionnaires pose le diagnostic avec une volonté de l’auteur de « partager son expérience en rassemblant ce qu’il a vu, entendu et compris dans l’appareil d’État, dans le fonctionnement de l’administration publique et dans la gestion des politiques publiques », et propose des « solutions inductrices de changements… », en partant des problèmes qui affectent le pays. D’où son engagement à contribuer à l’édification de notre Nation commune : « J’ai décidé de partager mon expérience dans l’espoir d’aider à une meilleure gestion de l’État guinéen. Cet essai est ma contribution… », dira-t-il.
À travers cet ouvrage, l’ancien ministre offre un aperçu unique de la réalité guinéenne, soulignant l’importance cruciale de comprendre les mécanismes internes qui bloquent le pays. Pour lui, comme il l’aborde dans le premier titre de la première partie du livre : le diagnostic est mal posé. L’auteur dépeint l’échec de nos élites en dépit du fait que tous les régimes qui se sont succédé à la tête de l’État guinéen ont déclaré leur prétention d’assurer la prospérité économique de ses populations. De sorte qu’on peut dire que : “la Guinée est dans un perpétuel recommencement et non de capitalisation des acquis et expériences”.
« Du premier régime, dirigé par feu le président Ahmed Sékou Touré en passant par le régime dit de « redressement » de feu Général Lansana Conté, de Moussa Dadis en passant par Alpha Condé dont le « changement » a subi la « refondation » du jeune colonel Mamadi Doumbouya, (auteur du coup d’État du 5 septembre). Bref, chaque groupe d’hommes en prenant le pouvoir a dressé un réquisitoire implacable contre ses prédécesseurs ».
En partageant son expérience en tant qu’ancien ministre de l’éducation nationale, Pr Bano, dépeint un tableau peu reluisant du fonctionnement de l’appareil d’État en Guinée. Dans cette deuxième partie de ce livre, l’auteur de l’œuvre, bien qu’étant enseignant dans l’âme, n’a pas hésité à mettre à nu les tares du système éducatif, secteur qu’il met au centre de ce livre, qui est caractérisé par les fraudes multiformes et qui concerne plusieurs acteurs. Ce qui est, selon lui, “l’affaissement de la qualité des enseignements, des enseignants”.
« Parmi les acteurs de la fraude, on peut distinguer les acteurs du système administratif (les cadres du Ministère, en particulier du service en charge des examens, et les responsables des services décentralisés, en particulier les responsables des services examens des IRE, des DPE et des DSEE), les enseignants qui organisent des groupes de fraude collective et informatique, etc.
Mieux, l’ancien ministre de l’éducation nationale et de l’alphabétisation d’août 2020 à septembre 2021 lève le voile sur ce qu’il sous-titre “la fraude au budget des examens”. Il confie que “la fraude systémique des examens commence par la confection des listes des candidats en gonflant le nombre de candidats inscrits aux examens”.
Pour illustrer, il fait savoir que lorsqu’on observe les effectifs déclarés aux différents examens en 2020, « on constate que sur un effectif de 239 187 inscrits pour l’entrée en 7ème, il y a eu 19 789 élèves qui n’ont pas participé aux examens soit 8,3% d’absence. Pour les DCE/DPE en charge de cet examen, il y a donc eu un gain sans contrôle ni contestation de 660 salles d’examens et de 1 320 surveillants non rémunérés, soit une somme 1 milliard 280 millions GNF », enseigne-t-il.
Cependant, ce livre ne se contente pas de dresser un tableau des problèmes. Il vise également à inspirer le changement. En proposant des recommandations concrètes et pragmatiques, l’auteur aspire à catalyser un débat constructif sur la manière de relever les défis auxquels est confrontée la Guinée, offrant ainsi une perspective sur les enjeux politiques, éducatifs, économiques… auxquels la Guinée est confrontée.
En se livrant à cet exercice, l’ancien recteur de l’université privée Winfrey Oprah de Guinée entend se démarquer « des approches descriptives, strictement politique et/ou du ’’copie-coller’’ qui provient de l’expertise internationale en matière d’aide au développement ». Pour lui, tout d’abord, l’État guinéen doit être pensé et repensé autant dans son système politique. Sur le plan politique, ce consultant auprès de plusieurs institutions internationales préconise un système de mandat unique, pour, dit-il, parvenir à une réforme électorale majeure, qui débouchera sur la refonte du code électoral afin d’adopter au mode électoral proposé.
Pour le Pr. Bano, la configuration éthnique de la Guinée et le passé politique devraient conduire à faire accepter aux guinéens un régime politique de type présidentiel avec un ticket (président et vice-président), sans un Premier ministre, comme dans le modèle des États-Unis ou du Nigéria. Dans ce type de régime politique proposé, poursuit-il, l’équipe présidentielle doit avoir un mandat de 7 ans non renouvelable, pour leur permettre d’avoir un bilan avant la fin de leur mandat”
Sur le plan de la refondation du système éducatif guinéen, l’ancien vice-recteur de l’université Général Lansana Conté de Sonfonia estime que la réforme de l’État doit aller de pair avec celle du système éducatif. « Cette réforme, on va dire la refonte du système éducatif va permettre la qualification et la massification des ressources humaines… ».
Pour lutter contre la fraude dans le système éducatif, « il faut élaborer une réponse en tenant compte de ses origines, de ses acteurs et les types de fraudes. Pour arriver à cet objectif majeur, il faut distinguer les efforts conjoncturels et ceux structurels de lutte contre la fraude ».
Ainsi, ce livre intitulé “Une année, deux mois et quatre jours : le temps pour comprendre la Guinée”, est bien plus qu’un simple essai. L’ouvrage de 232 pages, de couleur cendre, est un véritable partage d’expériences et un appel à l’action pour une meilleure gouvernance en Guinée de la part de l’auteur. À travers ses pages, le Pr Bano Barry offre une trajectoire éclairée aux gouvernants et à tous ceux qui s’intéressent à l’avenir de ce pays, aujourd’hui confronté à d’énormes obstacles.
Malick DIAKITE pour Guineematin.com
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