Massacre du 28 septembre : « Il n’y a aucun doute que les atrocités, les horreurs ont été perpétrées au stade du 28 septembre »

Devant le tribunal criminel de Dixinn (délocalisé à la cour d’appel de Conakry), le substitut du procureur, Sidiki Camara, s’est employé à démontrer l’effectivité des faits poursuivis dans le dossier du massacre du 28 septembre 2009. Et l’un des éléments qu’il a brandi pour le prouver, c’est le contenu des fichiers vidéos et audios versés dans le dossier de la procédure et qui ont été projetés par le tribunal au cours des débats dans cette affaire. Ce parquetier décrit la position de certains accusés dans ces vidéos, mais aussi les témoignages de certaines victimes dont feu Jean Marie Doré, ex-président de l’UPG et ancien Premier ministre. Il parle aussi des femmes nues au stade. Et à l’en croire, tous ces éléments montrent que les atrocités évoquées dans ce dossier ont bel et bien été commises au stade du 28 septembre lors de la répression du meeting des forces vives.

Guineematin.com vous propose ci-dessous un extrait des réquisitions du procureur Sidiki Camara.

« Vous (le tribunal) avez permis du visionnage public, on a écouté des audios, et ça nous a permis de savoir réellement ce qui s’est passé avant, pendant et après le 28 septembre 2009. Cela nous a permis de comprendre qu’à la date du 28 septembre 2009, pour la tenue du meeting, a été proposée par monsieur Bah Oury. Aussi, le 28 septembre 2009, une forte marée humaine était mobilisée au stade du 28 septembre. Et l’accusé Moussa Dadis Camara fait une intervention où il dit clairement que l’armée était non structurée. Aussi, le même accusé Dadis a déclaré que ce sont 57 morts qui lui avaient été signalés, soit 53 par bousculades et 4 par balles perdues. Ce qui veut dire monsieur le président qu’il y a eu effectivement un 28 septembre 2009. Aussi, après les massacres, l’accusé Dadis a accordé une interview à une chaîne de télévision au cours de laquelle nous ne remarquons aucun regret dans son comportement. Et juste après l’interview, il rejette l’entière responsabilité des massacres sur les leaders politiques. Et nous remarquons qu’il s’est fait nuitamment un bain de foule et également il manifeste toujours son intention de se présenter à toute élection présidentielle. Nous avons également vu, au cours de ce processus, qu’il y a eu échange de propos entre l’accusé Tiegboro et les leaders politiques qui consistaient à empêcher ces derniers à tenir leur meeting. Il a proféré des injures grossières à l’égard des manifestants. Aussi, le même accusé Tiegboro avait, parmi sa garde rapprochée, deux (2) bérets rouges. Et nous remarquons également que les hommes en body noir sont très violents et ils sont en train d’infliger des exactions aux manifestants. Nous remarquons également que les leaders politiques avaient été blessés, la plupart au niveau de la tête. Également, juste après l’arrivée de feu Jean Marie Doré au stade, les premiers coups de feu ont retenti. Nous voyons la débandade des populations après les tirs, aucun manifestant n’était porteur d’armes. Les cas de viol sont une réalité, car nous voyons dans les vidéos plusieurs femmes nues, meurtries, déboussolées et complètement effondrées. Les cas de disparus sont une réalité, car certains parents déclarent n’avoir pas retrouvé les leurs lorsque les corps ont été exposés dans la cour de la grande mosquée Fayçal. Nous voyons dans les vidéos le largage de gaz lacrymogènes à l’intérieur de la mosquée Fayçal. Et là où on a osé larguer du gaz lacrymogènes dans une maison de culte, ce n’est pas au stade qu’on va hésiter. Également monsieur le président, nous voyons l’accusé Toumba, dans une interview accordée à la RFI dire que l’ordre d’aller au stade provenait de son supérieur hiérarchique, c’est-à-dire son coaccusé Dadis. Et il précise dans cette interview que dans l’armée ils sont sous ordre. Le chef d’état-major général des armées affirme que c’est seulement la police et la gendarmerie qui devraient maintenir l’ordre public, aucun militaire ne devrait sortir. Le stade a été repeint juste après les massacres. C’était pour faire disparaître les traces… La Croix Rouge est également visible sur le terrain en train d’embarquer les blessés. Certains assaillants avaient des bandeaux rouges autour de leur tête. Dans ces vidéos, le leader Elhadj Cellou Dalein Diallo déclare avoir été frappé, et lorsqu’il s’est fait passer pour mort, les assaillants l’ont abandonné. Nous voyons aussi monsieur Jean Marie Doré faire remarquer, dans une interview, qu’il a vu un militaire en train de violer une femme. Et après sa sale besogne, il (le militaire) a fait entrer le canon de son fusil dans la partie génitale de sa victime. Il (Jean Marie Doré) ajoute avoir été frappé et il voyait des femmes ensanglantées, ainsi que quatre (4) morts. Dans ces vidéos, monsieur le président, des femmes victimes de viol apparaissent clairement en train de faire le récit macabre et inadmissible dont elles ont fait l’objet. Ce qui veut dire qu’il n’y a aucun doute que les atrocités, les horreurs dont nous parlons ont été effectivement perpétrées ce jour-là au stade du 28 septembre et les jours qui ont suivi », a déclaré le procureur Sidiki Camara.

Mamadou Baïlo Keïta pour Guineematin.com

Tel : 622 97 27 22

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