C’est sur les terres fertiles et fécondes de Bouramaya, fondé en 1860 par un chasseur du nom de Ibrahima Touré, venu du village de Fandié (Forécariah), selon nos sources, que naquit Lansana Conté, en 1934 à Moussayah, district de Loumbayah, sous préfecture de deTanéné, préfecture de Dubréka.
Nous sommes dans le Bouramayah Fontôta, car il y a aussi le Bouramayah Fassa, le Bouramayah Kéréba et le Bouramayah Lintinyi, l’énumération de ces quatre (4) Bouramayah, vous allez le voir, est intéressante. Car, c’est de l’union entre Alkhaly Alsény Conté de Fotonta, qu’on dit venir du village de wondeti, sous préfecture de Lisso dans Boffa et de Mafory Camara dite M’mah du village de Kondéya dans le Fassa que naquit le deuxième Président de la République de Guinée. Alkhaly Alseny Conté avait épousé en premières noces Dienaba, dite N’na Yéni du village de Kémayah, à une quinzaine de kilomètres de Moussayah. Elle lui fit 2 enfants : Hadja Khady et El hadj Salifou Diannanké.
L’origine de Alkhaly Alsény Conté à Wondéti parait plausible dans la mesure où nos recherches ont démontré que Lisso dans Boffa et Gbéréyiré Bafila dans Forécariah constituent les 2 grands terroirs des Conté. Les autres étant l’effet de petites migrations.
Pour revenir au cœur du sujet, disons que le Bouramayah Fassa en ces années là, venait de connaitre la culture de rizière introduite selon toujours nos sources par un Sierra Léonais du nom de Kandaoul. Séydouba Camara dit Alkhaly Gbelia à cause de son teint très clair fils de Yeni Modou, fils de Manga Condé le fondateur du village de Kondeyah, était un riche propriétaire terrien dont la générosité n’avait d’égal que celle de Alpha Yaya l’illustre roi de Labé, fils de Koumanthio Wali Sané et de Alpha Ibrahima Bassagui lui même fils de Alpha Saliou, fils de Thierno Mamadou Dian le courageux fils de Thierno Mamadou Cellou dit Karamoko Alpha mo Labé l’un des 9 marabouts qui fondèrent au 17e siècle le royaume Théocratique du Fouta Djallon.
Vous allez le voir la comparaison entre Alkhaly Alseny Conté et Alpha Yaya n’est pas fortuite. Ils ont en commun et en partage la générosité et chacun a été récompensé. Le premier à travers sa descendance, son petit fils Lansana Conté est devenu Président de la République de Guinée et le second par lui même à travers l’hymne national de la Guinée, liberté tire d’un air entonné par un griot Alpha Yaya Mansalou Be Mankan après lui avoir offert beaucoup de présents et de l’argent.
Généreux envers les siens, Alkhaly Gbelia l’était aussi envers les autres. C’est de gaieté de cœur donc qu’il donna la main de Mafory l’ainée de ses 9 enfants en y ajoutant des terres dont celles de Wawa à Alkhaly Alseny Conté. Mafory Camara prend le chemin de Moussayah comme 2e épouse de Alseny Conté. Comme sa mère, elle fit aussi 9 enfants; Hadja Hawa, Lansana, Forimodou N’faly, Soriba, Daouda, Idrissa, Salematou et Harouna. Seuls Hawa, Forimodou N’faly et Harouna sont en vie mais leur père a eu près d’une vingtaine d’enfants.
Lansana conté suit des études coraniques et est inscrit à l’école française à Ouassou Dubréka avant d’être recruté dans l’armée. Le 1er juin 1955 il est incorporé dans l’armée française. Feu Colonel Jean Traoré a raconté dans un journal de la place une histoire intéressante et pathétique qui montre combien de fois Lansana Conté était attaché à sa mère. C’était en début d’hivernage écrit- il, le bateau qui devait l’emmener à Bingerville accostait une fois tous les 3 mois. Lansana Conté préféra attendre jusqu’au prochain afin de cultiver le champ de Mafory Camara. Il venait d’être admis au collège technique des enfants de troupe et effectua ses études successivement à Bingerville (Côte d’Ivoire) et Saint louis du Sénégal. Rapidement il y obtient ses premiers Diplômes militaires dont le Certificat interarmes en 1957. La même année c’est le départ pour la guerre d’Algérie. Il y restera jusqu’a la proclamation de l’indépendance de son pays le 2 Octobre 1958. Libéré à sa demande, le sergent Lansana Conte débarquera à Conakry le 31 décembre 1958. Il se met alors à la disposition des nouvelles autorités du pays. Ce sera le début d’une brillante carrière au cours de laquelle il gravira les différents échelons de la hiérarchie militaire.
En 1962 titulaire du brevet de section en artillerie il sortira de l’école des officiers du camp Alpha Yaya avec le grade d’aspirant. Le 15 janvier 1962, il est muté au centre d’instruction d’artillerie du 2ebataillon de Kindia. Le 1er juillet 1963, il accède au grade de sous lieutenant et est promu 2 ans plus tard lieutenant. Il servira alors au sous groupement tactique numéro 2 de Koundara avant de devenir le 1er mai 1968 commandant de la compagnie de Gaoual. Six mois plus tard le 12 octobre 1968, le lieutenant Lansana Conté part de Gaoual pour N’zérékoré dans les fonctions d’officier adjoint du 4e bataillon militaire. Le 26 novembre 1969 il quitte N’Zérékoré pour le 2e bataillon militaire de Kindia avant de servir à Télimélé. En Mai 1970, il rejoint l’Etat major général des armées à Conakry.
Au cours de l’agression du 22 Novembre 1970, le lieutenant Conté s’est particulièrement distingué, illustre dans les opérations de défense de la capitale à partir de l’ile de Tamara au large de Conakry. A titre exceptionnel et pour services rendus à la nation, il est promu capitaine le 27 février 1971. Le 8 juin de la même année, il est nommé dans les fonctions de commandant de la zone opérationnelle de Boké et participe activement à la libération de la Guinée Bissau du joug portugais. Ses grandes qualités de combattant et son sens élevé du commandement lui valent le respect et l’admiration des officiers et surtout des hommes de troupe.
Le 19 Mai 1975, ses mérites sont récompensés par sa nomination en qualité de chef d’Etat major adjoint de l’armée de terre, fonctions qu’il exercera jusqu’au 3 avril 1984 en passant successivement au grade de commandant le 28 septembre 1977 et à celui de colonel le 1er mars 1982.
A la disparition du Président Ahmed Sékou Touré le 26 mars 1984 suite aux graves dissensions entre les membres du BPN, les forces armées prennent le pouvoir et le Colonel Lansana Conté est porté à la tête du C.M.R.N et devient le 2e Président de la République de Guinée. Il prononcera son discours programme le 22 Décembre 1984 engageant le pays sur la voie du libéralisme. Le 4 juillet 1985 le Colonel Diarra tente un coup d’Etat qui échoue et renforce du coup le pouvoir de Lansana qui connaitra aussi une mutinerie les 2 et 3 février 1996. Marié et père de plusieurs enfants, Lansana Conté devenu Général est le père du multipartisme, de la liberté de la presse et de la décentralisation en Guinée. Il organisera et remportera toutes les élections dont celles Présidentielles de 93, 98 et 2001 largement contestées par l’opposition. Plusieurs chantiers de développement notamment les routes seront réalisées mais la gabegie financière et la violente répression des douloureux évènements de 2007 2008 ont fortement entame le pouvoir de celui dont les guinéens considèrent comme un patriarche un paysan plus à l’aise dans un champ que devant les ors et lambris des palais et leurs souverainetés excessives. Malade pendant de longues années, il décédera le 22 décembre 2008. L’armée continuera à garder les rennes du pouvoir par un autre coup de force le lendemain même de sa mort avec le CNDD dirigé par le capitaine Moussa Dadis Camara puis la transition avec le général Sékouba Konaté qui organisera les élections présidentielles en
2010. Elections remportées par Alpha Conde dans des conditions que beaucoup d’observateurs continuent de qualifier de Hold up. Au terme d’une vie qui a comme toute vie ses ombres et ses lumières, Lansana Conté parait mériter ce jugement que portait le général De Gaulle lorsque, évoquant 1916, il écrivait dans la France et son armée au sujet du maréchal Philippe Pétain citation: « Excellent à saisir en tout l’essentiel, le pratique, il domine sa tâche par l’esprit. En outre par le caractère, il l’a marque de son empreinte. Entre ce personnage lucide et l’action sans surenchères que requièrent le combat et les combattants, l’harmonie est si complète qu’elle semble un décret de la nature. Puissance de l’esprit critique sauvegarde des faveurs banales. Grandeur de l’indépendance qui reçoit l’ordre, capte le conseil, mais se ferme aux influences. Prestige du secret ménage par la froideur voulue, l’ironie vigilante et juste par l’orgueil dont s’enveloppe cette solitude », fin de citation.
Amadou Diouldé Diallo depuis New York pour Guineematin.com