L’actualité reste dominée par la tenue des élections locales du 04 février 2018. L’on a malheureusement noté des actes de violences au lendemain du scrutin, avec des morts et des dégâts matériels, aussi bien à Conakry qu’à l’intérieur du pays. C’est Dans cette atmosphère tendue qu’une nouvelle grève est aussitôt lancée par Aboubacar Soumah, secrétaire général du Syndicat Libre des Enseignants et Chercheurs de Guinée (SLECG).
Ces deux sujets polarisent les débats des citoyens et chacun y va de son commentaire. Dans une interview accordée ce mercredi 21 février 2018 à Guineematin, Mohamed Fofana, membre de la cellule de communication du RPG Arc-en-ciel, a donné son avis sur cette actualité brulante.
Guineematin : nous avons suivi le scrutin pour les élections locales du 04 février 2018. Comment avez-vous passé cette date ?
Mohamed Fofana : tout d’abord, en tant que citoyen, cette date était attendue depuis très longtemps. Parce qu’il faut rappeler que, depuis 2005 ce scrutin n’avait pas été organisé. Les régimes d’alors n’ont pas pu, à eux de nous avancer les raisons. Mais, c’est avec plaisir que sous le règne du professeur Alpha Condé, que cette élection a été organisée. Je crois bien que les guinéens à leur manière se sont mobilisés sur l’ensemble du territoire pour aller à ce vote. Donc, nous sommes maintenant en attente des résultats. J’espère bien que comme cela fait partie du processus électoral, c’est-à-dire après le vote, il y’a la proclamation provisoire des résultats et en suite la proclamation définitive. Mais avant ça, il y’a aussi une autre étape qui permet aux partis engagés de faire des recours. J’espère que, si nous sommes des républicains, nous devons vraiment respecter ces étapes là pour non seulement faire asseoir l’esprit démocratique dans notre pays mais aussi la culture démocratique dans l’esprit des guinéens.
Guineematin.com : justement les résultats provisoires ont été proclamés, comment jugez-vous la prestation du RPG Arc-en-ciel ?
Mohamed Fofana : il faut avoir le courage de l’avouer, c’est un cataclysme politique pour la classe politique guinéenne. Parce que, quand tu prends d’abord le taux de participation qui tourne autour de 37%, c’est vraiment un refus de la part des citoyens à se déplacer pour aller à ce vote. Maintenant, en ce qui concerne les résultats, je pense que sur le plan de la démocratie, il y’a une avancée parce que c’est intéressant de voir que les zones qui étaient considérées dans le passé comme des fiefs traditionnels ont vu percer d’autres partis politiques. Quand vous prenez la Haute Guinée qui était vraiment considérée comme imprenable, aujourd’hui il y’a pour des raisons internes des listes indépendantes qui ont même raflé la vedette au RPG dans ces zones de la Haute Guinée. C’est le même cas aussi pour la Moyenne Guinée et on a surtout vu le RPG percer dans des préfectures où vraiment des scores ont été améliorés et le RPG a même gagné dans des villes et sous-préfectures de la Moyenne Guinée. C’est vraiment un acquis et je pense que nous devons mettre tout cela au compte des acquis et voir, en tant que formation politique, ce qui n’a pas marché. Un parti politique vit comme un être humain, on doit voir ce qui n’a pas marché cette fois ci et qu’est ce qu’il faut faire pour les prochaines échéances pour que nous puissions les parfaire. Je pense que c’est à cela que nos différents responsables doivent s’atteler, pour tirer les leçons et essayer de capitaliser ce qui a marché et parfaire ce qui n’a pas marché. Encore je dis une fois que c’est un cataclysme politique pour toutes les formations politiques en Guinée.
Guineematin.com : pourquoi le RPG Arc-en-ciel s’est retrouvé dos à dos avec l’UFDG dans la commune de Matoto, considérée être votre fief traditionnel ?
Mohamed Fofana : les raisons sont internes et les responsables vont se réunir et tirer les leçons et je pense que Matoto reste le fief du RPG. Comme je le disais, les citoyens n’ont pas fait le déplacement.
Pourquoi est-ce que les citoyens ne se sont pas déplacés ? C’est à cela que les leaders politiques devraient travailler pour que, les prochaines échéances, nous puissions envoyer les citoyens à effectuer le déplacement et à voter massivement. Mais, je dis et je réitère que le RPG, c’est vrai qu’à des endroits, on n’a pas eu la majorité absolue, mais si vous prenez le scrutin direct, nous sommes arrivés en tête dans plusieurs localités. Cette élection a ses spécificités qui font qu’il faut forcément avoir la majorité absolue. Mais, puis que nous n’avons pas la majorité absolue, nos responsables sont en train de travailler maintenant par rapport aux jeux d’alliances et je suis confiant qu’avec nos amis politiques nous allons parvenir à mettre nos forces ensemble pour gérer ces différentes communes.
Guineematin.com : après le vote, nous avons connu des violences post-électorales. Comment avez-vous perçu ces soubresauts à Conakry tout comme à l’intérieur du pays ?
Mohamed Fofana : c’est regrettable, parce qu’on ne devait pas en arriver là. Les gens tiennent des discours et c’est là encore je dois interpeller l’Etat. Dans un pays civilisé, c’est d’abord le respect de la loi, l’application de la loi. Mais, quand on doit tordre le cou à la loi pour faire plaisir à des individus, ça nous amène tout droit vers ce que nous sommes en train de vivre aujourd’hui. Ceux qui sont dans la rue aujourd’hui ne connaissent pas militants de l’UFDG ou du RPG, tout ce qui les intéresse, c’est vraiment arrêter les citoyens, les brutaliser, les dépouiller de leurs biens et prendre leur argent et autres matériels. C’est ce que ces jeunes-là sont en train de faire aujourd’hui dans la rue. Maintenant, si un parti politique est fier de dire que ce sont ses militants, je pense qu’il revient à l’Etat, selon les textes de loi, d’amener ce parti politique à la raison. Je demande au ministère de l’administration du territoire, qui gère les partis politiques, de prendre sa responsabilité. Si un parti politique ne peut pas communiquer avec les citoyens que nous sommes et qui s’adonne aux propos haineux, c’est à ce département ministériel de prendre ses responsabilités, soit lui retirer son agrément ou l’amener à changer de ton. Mais, ce que nous constatons vraiment en Guinée, c’est regrettable, c’est un abandon, c’est un silence coupable de la part de nos autorités qui refusent aujourd’hui d’appliquer la loi et préfèrent laisser les gens faire tout ce qu’ils ont envie de faire et c’est nous les pauvres populations qui en souffrons.
Guineematin.com : une nouvelle crise mine le secteur éducatif guinéen, quel est votre regard sur la grève lancée par Aboubacar Soumah ?
Mohamed Fofana : aujourd’hui, les gens ont laissé Aboubacar Soumah qui n’a aucune légitimité, aux yeux de la loi, il n’a aucun outil lui permettant de déclencher une grève. Les gens l’ont laissé et aujourd’hui nous sommes à la deuxième semaine de la grève et cela prend de l’ampleur. A Conakry comme à l’intérieur du pays, ça prend de l’ampleur. Si l’Etat, au début, avait pris ses responsabilités pour mettre fin à de telles choses, je pense qu’on n’allait pas être là aujourd’hui. Nos autorités du ministère de l’éducation nationale et du ministère de la sécurité ont laissé faire. Aboubacar Soumah, malgré tout le désordre qu’il est en train de mettre sur le dos des guinéens, circule librement à Conakry. Il a le temps d’aller dans les locaux des medias pour tenir des interviews et rentrer chez lui tranquillement, pendant ce temps, nous savons que tout ce qu’il fait c’est hors la loi. Qu’est ce qu’il faut aujourd’hui pour amener Aboubacar Soumah à se sentir dans une République ? C’est de mettre la main sur lui et faire appliquer la loi. Mais, on le laisse faire ce qu’il est en train de faire.
Interview réalisée par Siba Guilavogui pour Guineematin.com