Assainissement de la ville de Conakry : la décharge de Dar-Es-Salam saturée et presqu’à l’arrêt

La décharge de Dar-Es-Salam, située dans la commune de Ratoma, en plein cœur de Conakry, l’unique décharge de la capitale et la plus grande du pays, est totalement saturée. Sans compter les ennuies causées aux dizaines, voire centaines de milliers de ses riverains, elle présente de sérieux problèmes aux manutentionnaires chargés de déverser les milliers de tonnes de déchets journaliers produits par les ménages de la capitale, a constaté un reporter que Guineematin.com a dépêché sur les lieux hier, mercredi 13 juillet 2022.

A en croire des manutentionnaires trouvés sur place, si rien n’est fait d’ici 24 heures, il n’y aura plus de place pour déverser les 1 500 tonnes de déchets journaliers produits par les habitants de la capitale.

D’ailleurs, les 11 et 12 juillet (lundi et mardi) 2022, un mouvement de colère avait éclaté à cet endroit. Les travailleurs recrutés par l’Agence nationale d’assainissement et de la salubrité publique (ANASP), mis en congé technique depuis le début de l’année, ont voulu se faire entendre. Mécontents, ces travailleurs sont venus barricader l’entrée de la décharge avant de se faire déloger par les forces de sécurité.

Mais, le mal le plus profond se trouve ailleurs. Il s’agit du non aménagement de la décharge par la société Piccini, de l’ancienne mairesse de Kaloum Aminata Touré, décédée le 12 janvier 2022 au Maroc.

Selon un travailleur de cette structure qui a exigé l’anonymat, deux sociétés ont été associées dans l’assainissement de la capitale guinéenne. Il s’agit de Piccini qui a la charge d’aménager la décharge et Albayrak qui ramasse et transporte les déchets.

« Depuis janvier 2022, le rythme du travail a considérablement baissé au niveau de la décharge. Avant, on recevait 800 litres de carburant par jour pour faire tourner les machines au niveau de la décharge. Mais depuis janvier, le ministre de l’Administration du territoire et de la décentralisation, Mory Condé, a réduit cette dotation à 300 litres. Ce qui nous a amenés à travailler avec deux bulldozers au lieu de quatre machines et laisser les deux poklens de côté. Et  ces bulldozers aussi travaillent par rotation. Alors qu’avant, les 4 machines travaillaient en même temps. Mais pire, notre société a présenté au département 9 factures  dont j’ignore le montant. Mais qui n’ont pas été payées. Ce qui a même obligé le patron, Antonio de repartir chez lui en Italie depuis 2 mois, puisque le retard de paiement nous fait énormément de problèmes. Beaucoup parmi les travailleurs ont fait trois mois, d’autres plus, sans salaire. C’est très difficile. Heureusement, nous avons appris que Mory Condé a signé un chèque de paiement pour nous hier mardi 12 juillet, vers 19 heures. Mais je vous le dis, malgré qu’on a mis en marche deux bulldozers et un poklen aujourd’hui, on ne pourra pas créer de l’espace suffisant pour recevoir l’énorme quantité d’ordures qu’on nous envoie », a averti ce travailleur, totalement dépassé.

A la décharge, de part et d’autre, les ordures sont entachées en formant une grosse montagne culminant de près de 20 mètres de haut.

De son côté, Ecevit Erkan, Directeur du protocole et de l’information à Albayrak, contacté au téléphone par  Guineematin.com, dit être toujours prêt à accomplir sa tâche.

Ecevit Erkan, Directeur du protocole et de l’information à Albayrak

« Nous à Albayrak, on n’a pas ce problème. Ce que vous avez appris ne nous concerne pas. S’il y a eu des perturbations du travail, ce n’est pas à notre niveau. Nous, nous avons la logistique suffisante, le personnel suffisant et la motivation nécessaire pour remplir la part de notre contrat. Selon le programme, Albayrak est chargé du ramassage et du transport des déchets. C’est ce que nous faisons. Mais s’il y a une petite perturbation, même d’une journée, cela entraîne de gros efforts pour assurer le suivi. Pour ce cas-ci, il était question de verser les déchets à la décharge. Mais pour des problèmes qui ne dépendent pas de nous et dont nous ignorons d’ailleurs, la décharge a été fermée aux camions. C’est ce qui a fait qu’on n’a pas pu travailler correctement ces deux jours. Mais bon, nous espérons que les choses vont rentrer dans l’ordre très rapidement », a souligné ce responsable d’Albayrak, qui a évité tout au long de l’entretien de parler ou de mettre en cause l’administration.

Contacté au téléphone par Guineematin.com, le responsable de la Communication de l’Agence nationale d’assainissement et de salubrité publique (ANASP), Ibrahima Kalil Kéïta, n’a pas voulu faire de commentaire.

Pourtant, selon des informations confiées à Guineematin.com, l’ANASP, à travers le département de l’administration du territoire et de la décentralisation doit des montants importants à la fois à Piccini et à Albayrak, pour solder le travail effectué depuis plusieurs mois.

En attendant que l’ANASP régularise la situation de ses anciens employés et solde ses arriérés, la décharge de Dar-es-Salam présente une situation à la fois préoccupante et volatile.

L’éboulement qui avait coûté la vie à 9 personnes à la déchetterie de Dar-Es-Salam le 22 août 2017 hante encore l’esprit de plus d’un Guinéen.

Abdallah BALDE pour Guineematin.com

Tél. : 628 08 98 45

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