Les Maladies tropicales négligées (MTN) sont des maladies qui ne préoccupent pas beaucoup de monde alors qu’elles peuvent avoir de graves conséquences sur la santé humaine. Généralement, rencontrées dans les pays à faible revenu, comme l’Afrique et l’Amérique latine, ces pathologies font des ravages « de manière insidieuse ».
Dans une interview accordée récemment à un reporter de Guineematin.com, Dr Ben Youssouf Keita, médecin généraliste, pense que ces maladies sont souvent négligées à cause de leur rareté dans le monde. Pour cet ancien président de la commission santé à l’assemblée nationale sous la 8ème législature, l’État doit tout faire pour lutter contre ces maladies, combattre la pauvreté et pulvériser le long des marigots.
Guineematin.com : qu’appelle-t-on les Maladies tropicales négligées (MTN) ?
Dr Ben Youssouf Keita : comme le nom l’indique, les maladies tropicales négligées, c’est-à-dire les maladies qu’on ne trouve pas en Europe, qu’on ne trouve que sous les Tropiques, en Afrique et en Amérique latine, qui à cause de leur rareté, deviennent négligées, parce qu’elles sont rares et on les trouve seulement dans les pays du tiers monde. Mais pour ne pas qu’elles continuent à tuer silencieusement, l’OMS (Organisation Mondiale de la Santé) a voulu donner une appellation pour attirer l’attention des scientifiques mais aussi des gouvernants qu’il existe des maladies qui peuvent faire des ravages de manière insidieuse tant sur la santé que sur l’économie des pays en voie de développement. D’où l’appellation maladies tropicales négligées.
Quelles sont ces maladies tropicales négligées ?
Il y a 13 maladies classifiées par l’OMS dont beaucoup se trouvent ailleurs comme en Amérique latine. C’est comme la maladie du Chaka, de la Dengue… ça, c’est vers l’Amérique. Mais chez nous en Guinée, ce qui est fréquent, c’est la schistosomiase, la maladie qui attrape les enfants qui se lavent dans les marigots et qui urinent du sang. Il y a la maladie qu’on appelle Onchocercose qui est aussi attrapée dans les marigots et qui, généralement, provoque la cécité. Quand vous remarquez vers la Haute Guinée, il y a beaucoup de gens qui sont aveugles. Généralement, ça vient de l’onchocercose qui n’est pas prise en considération. Il y a également la lèpre. Il y a l’éléphantiasis qui est provoqué par la piqûre de la mouche tsé-tsé. Il y a les trachomes, vous voyez souvent chez nous des jeunes qui ont les yeux comme si c’est des blessures, il y a la maladie du sommeil aussi et la rage… qui sont fréquentes chez nous et qu’on appelle négligées.
Où peut-on contracter ces maladies négligées et est-ce qu’elles ont un lien les maladies hydriques ?
Par exemple, la Schistosomiase, vous ne la trouverez nulle part si ce n’est dans les marigots. Il faut que vous alliez vous baigner dans le marigot pour que les schistosomes qui sont souvent gardés dans les coquilles des escargots viennent dans le nid, vous piquent ou entrent par les pieds et ça se développe. La mouche tsé-tsé, là on la trouve un peu partout. C’est pour cette raison que, normalement, dans les zones où il y a les rivières, surtout en Haute Guinée, il doit y avoir un service de pulvérisateur pour tuer les réservoirs. Ça, c’est au niveau des marigots. Si les enfants ne vont pas vers les marigots où ils sont piqués par les vecteurs qui transmettent la filariose, ils n’auront ni Onchocercose ni Schistosomiase. En plus ces maladies n’ont pas de lien avec la saison pluvieuse. Par contre, quand il y a une forte pluie, ça draine plus facilement l’eau et les gens n’y vont pas pour éviter la noyade. Pendant la saison sèche, quand les marigots tarissent, les enfants peuvent aller se baigner ou laver les ustensiles de cuisine qu’ils peuvent attraper la Schistosomiase ou la filariose. Ce qui est en lien avec la saison pluvieuse, c’est d’autres maladies qui ne sont pas négligées comme : le choléra qui est une maladie des mains sales et qui peut apparaître pendant la saison pluvieuse ; et le paludisme, provoqué par les moustiques, qui ne sont pas des maladies négligées. Au contraire, elles sont considérées parce qu’il y a un programme national qui prend en compte le paludisme et le choléra ; parce que le palu est la première cause de mortalité en Afrique. Mais, les maladies tropicales négligées n’ont pas de rapport avec la saison pluvieuse.
Qu’est-ce qu’il faut pour lutter efficacement contre ces maladies tropicales négligées ?
Il faut combattre la pauvreté, faire la prévention à travers le ministère de la santé publique en désinfectant le long des marigots parce que l’onchocercose et la Schistosomiase sont au niveau des marigots et généralement, les mouches tsé-tsé c’est vers là-bas également. Si c’est pulvérisé, nettoyé et désinfecté, les enfants peuvent aller se baigner sans problème. Il faut que les gouvernants prennent conscience de cela pour que ceux qui sont affectés par ces maladies soient pris en compte. Ça, c’est au niveau du gouvernement. Au niveau de la population, il suffit de venir se faire consulter à l’hôpital dès que vous constatez un premier symptôme. Par exemple, un enfant ou un adulte qui fait pipi avec du sang, il faut venir voir le médecin qui va vous situer sur le type de maladie. Quand vous constatez la démangeaison ou les galles qui apparaissent sur le corps, venez chez un médecin, il va faire un prélèvement et faire le traitement qui va vous empêcher de développer la maladie.
Est-ce qu’il y a aujourd’hui un traitement possible pour ces maladies ?
Quand le diagnostic est posé, le traitement existe pour ces maladies tropicales négligées. Quand vous partez dans les centres épidémiologiques, on va vous donner des produits nécessaires.
Propos recueillis par Malick Diakité pour Guineematin.com
Tél. : 626-66-29-27
