Axe Hamdalla-Bambéto : des citoyens se plaignent des exactions des forces de l’ordre

A la suite de l’inhumation du jeune Alpha Oumar Barry, à Bambéto, le mercredi 7 septembre 2022 et  des heurts qui ont éclaté entre des protestataires et les forces de l’ordre, plusieurs familles longeant la route Le prince, notamment celles de Hamdallaye (Diakitéya), ont fait l’objet d’exaction.

Des gaz lacrymogènes, des portes cassées, des violences physiques, des vitres de véhicules brisés, voilà entre autres, le lot de désolation enregistré dans plusieurs familles visitées par les forces de l’ordre.

Rencontré ce jeudi 8 septembre 2022, par un des journalistes de Guineematin.com, Elhadj Boubacar Diakité, 60 ans, ancien employé de Rio Tinto, très remonté, raconte sa mésaventure.

« Moi je ne veux pas qu’on prenne mon image puisque ce que j’ai vu hier ici, je ne l’ai pas vécu depuis du temps du régime Lansana Conté jusqu’à celui d’Alpha Condé en passant par le Capitaine Moussa Dadis et Sékouba Konaté. Et je suis sûr que ces gens là sont capables de tout. C’est du temps du Colonel Mamadi Doumbouya, qu’on lance du gaz dans notre mosquée… Nous étions à la mosquée, après la prière de 17 heures, lorsque nous avons entendu une femme veuve crier subitement. Je suis sorti et j’ai demandé. La victime qui portait ses habits de veuvage me dit qu’elle a été giflée par un policier. Le policier se retourne et me demande de rentrer à la mosquée. J’ai dit non. Il m’a dit que si je ne rentre pas, il va tirer sur moi. J’ai dit qu’il est libre de tirer sur moi. Il a visé et tiré une bombe lacrymogène sur moi. C’est tombé sur mon bras. Deux de ses amis ont menacé de me faire embarquer dans leur pick-up comme je refuse de quitter les lieux. Après cela, c’était des salves de tirs en direction de la mosquée et sur toutes les issues, empêchant les fidèles de venir faire la prière. Hier, nous n’étions que 5 fidèles à faire la prière. Même la prière du crépuscule, nous avons été obligés de jumeler les deux, alors qu’il ne pleut pas. Les gens qui habitaient aux environs, ont été empêchés de traverser et de rejoindre leurs maisons. Les agents étaient postés de part et d’autre et se mettaient à fouiller et dépouiller les gens de leurs biens, de leur argent… Sur place, j’ai constaté que ce sont les policiers de la CMIS n°20 qui sont  les auteurs de ces tirs et de cette violence contre nous. C’est un groupe de 7 agents qui parlaient français, poular, soussou, et des langues forestières. Celui qui a tiré sur moi, est un forestier », a dit le vieil homme, qui n’entend pas baisser les bras.

« Si je vois mon agresseur, je peux l’identifier physiquement. C’est pourquoi d’ailleurs, j’ai appelé mon avocat qui m’a demandé d’aller me faire consulter et d’avoir un rapport médical. Ce document sera joint à une plainte contre X que nous allons déposer à la justice. Nous irons jusqu’au bout. Et si cette justice d’ici-bas ne fait rien, nous allons faire face à celle du Créateur. Dieu n’accuse pas et il est impartial », a promis Elhadj Diakité, très remonté contre les agents des forces de l’ordre.

Non loin de la mosquée, ce sont au moins cinq concessions qui ont reçu la vite des forces de l’ordre.

Chez le doyen Mamadou Diallo, le portail a été défoncé et plusieurs bombes lacrymogènes lancées. Des étuis et  des cailloux, encore visibles dans la cour, montrent l’acharnement des agents contre famille pendant cette journée du 7 septembre.

« Nous étions tous enfermés dans la maison. Il y avait même un bébé de 3 semaines avec nous. Derrière notre cour, on dirait que c’était un champ de tirs. Des détonations venaient de tous les côtés. Et à l’intérieur de la maison, on ne pouvait pas respirer à cause du gaz lacrymogène. J’ai eu peur que le bébé de 3 semaines et mon épouse malade, ne meurent avec nous. Le bébé d’ailleurs a toujours les yeux gonflés et il le corps est chaud. C’est vraiment dommage et nous implorons Dieu de nous aider. Nous demandons aux autorités de faire arrêter ces exactions contre de paisibles citoyens », a lancé ce sage de la mosquée de Diakitéya.

A quelques mètres de là, c’est la famille de Mamadou Bobo Diallo, 38 ans, étudiant diplômé. Là, les ouvriers et les maçons sont à pied d’œuvre pour remettre le portail défoncé par les agents.

Mamadou Bobo Diallo, victime d’exactions policières à Hamdallaye

« Hier vers 16 heures, il y avait l’enterrement du jeune Alpha Oumar Barry au cimetière de Ndantari Bambéto, conformément à la volonté de sa famille. Après cela, les enfants sont venus trouvés un pick-up des forces de l’ordre et ils ont commencé les histoires. Avec les réseaux sociaux, les gens ont appris qu’il y a la pagaille à Bambéto. Les échauffourées ont commencé entre agents et jeunes protestataires. Les forces de l’ordre sont venues en nombre, lancer du gaz lacrymogène et parfois même des cailloux sur les maisons avant d’utiliser leurs pick-up pour défoncer les portails des cours. C’est le cas chez moi. C’est un pick-up qu’ils ont utilisé pour briser notre portail. Dans notre cour, ils ont lancé plus de 14 bombes lacrymogènes. Nous étions tous embêtés à l’intérieur de la maison. D’ailleurs, après la manifestation du 28 juillet dernier, le bébé de mon grand frère qui n’avait que quelques semaines, a rendu l’âme. Certainement c’est à cause de ces gaz lacrymogènes. Normalement, si une cour est fermée, il n’y a pas lieu de créer des histoires là-bas. Mais dans notre zone ici, ce genre d’exactions est récurrent. Les agents viennent faire du n’importe quoi, puisqu’on est impuissant. Mais Dieu est Grand, Lui il est fort. Il va juger et les auteurs vont en payer un jour », a lancé cette autre victime.

Le muezzin de la mosquée de Diakitéya, Elhadj Ibrahima Diallo, n’a pas échappé à la fureur des agents.

Elhadj Ibrahima Diallo, muezzin, victime d’exactions policières à Hamdallaye

« Moi, je ne peux pas marcher. Depuis leur passage chez moi, je suis là. Déjà j’étais malade. Ils sont venus briser les vitres des véhicules qui sont garés derrière la cour avant d’éventrer le portail et jeter une énorme quantité de gaz lacrymogène dans la maison. Jusqu’ici, je n’ai pas pu aller à la mosquée. On ne sait plus ce qu’il faut faire. Moi je n’ai même pas de jeunes dans mon foyer. La cour était fermée, la maison également fermée et personne n’était au dehors. Mais malgré tout, nous n’avons pas échappé. C’est très préoccupant. Nous demandons à Dieu de nous protéger et aux autorités de nous aider contre de tels comportements des agents de l’Etat », a conclu ce vieil homme de 83 ans.

Abdallah BALDE pour Guineematin.com

Tél. : 628 08 98 45

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