Viol sur une fille de 13 ans : un maître coranique jugé au tribunal de Mafanco

Hamidou Diallo, maître coranique résidant à Dabompa, un quartier de la commune de Matoto (Conakry), a comparu ce mercredi, 04 janvier 2023, devant le Tribunal de première instance de Mafanco. Poursuivi pour viol sur mineur, l’accusé a plaidé non coupable, se disant victime d’un règlement de compte, a constaté Guineematin.com à travers un de ses journalistes.

Hamidou Diallo est sous mandat de dépôt depuis le 09 septembre 2021. Il est accusé d’avoir ligoté et violé une de ses élèves, âgée de 13 ans au moment des faits. Des accusations que le maître coranique a rejetées en bloc devant le tribunal criminel de Mafanco. Il dit être victime d’un règlement de compte pour n’avoir pas épousé la sœur aînée de M.H.D, la jeune fille qu’il est accusé d’avoir violée.

« On m’a mis en prison pour un règlement de compte, parce que Dieu n’a pas voulu que j’épouse leur fille. La maman m’a appelé pour me dire que sa fille (la sœur aînée de M.H.D, qui est également élève de Hamidou Diallo) a dit que c’est moi qui vais l’épouser. Je lui ai dit que je ne pouvais pas l’épouser parce que les moyens financiers me manquaient. Mais je leur ai dit que mes parents iraient les voir pour qu’ils en discutent.

Donc, j’ai continué mes études. Et quand j’ai fini, mon maître coranique m’a demandé d’aller à Labé. Quand j’y suis parti, il m’a donné une épouse là-bas, je suis revenu à Conakry. Après, M.H.D a dit à un de mes élèves que j’ai refusé d’épouser sa sœur, mais que ça allait me coûter de la quinine », a expliqué l’accusé, qui enseignait sa présumée victime et quatre autres membres de sa famille.

Il ajoute que ses problèmes avec la partie civile n’ont pas commencé aujourd’hui. La famille avait déjà porté plainte contre lui, l’accusant d’avoir fait un lavage de cerveau à sa victime présumée pour l’amener à porter le voile. Car la jeune fille s’était mise à fuguer après que sa mère, Fatoumata Diaraye Diallo, a refusé qu’elle porte le voile.

« Il y a eu des discussions entre M.H.D et sa maman autour du port du voile. Après, la fille a fugué. Sa maman m’a appelé pour me demander si elle était à l’école coranique, je lui ai dit non. Le soir encore, elle m’a rappelé une nouvelle fois pour demander si elle était là-bas, j’ai dit qu’elle n’y était pas. Après, elle a dit que sa fille est sortie de la maison à cause du port du voile qui les a opposées.

Le lendemain, une plainte a été déposée contre moi chez le chef de quartier, on m’a emmené à la Brigade de recherches de Kipé le 13 avril 2021, où on m’a parlé de lavage de cerveau. Ils ont dit que la fille avait quitté la maison, et que si elle n’était pas retrouvée dans 72 heures, ils allaient me déférer. Après la fille et sa tante sont venues à la Brigade de recherches là-bas, elle a été emmenée pour faire un examen. Le lieutenant-colonel Diogo Diallo qui suivait le dossier a dit qu’elle n’a pas été touchée selon le rapport (médico-légal).

Donc, j’ai été libéré. Et le 31 août 2021, une autre plainte a été déposée contre moi pour viol, mais M.H.D n’a pas dit que c’était moi qui l’ai violée. Son oncle, Abdoulaye Diallo, est entré dans une salle où on était avec deux agents de la gendarmerie de Kipé, il a crié en disant que ce n’est pas ce qu’ils avaient conclu à la maison. Donc, la fille a finalement dit que c’était moi », a soutenu Hamidou Diallo.

Après l’accusé, ce fut au tour de Fatoumata Diaraye Diallo, la mère de la présumée victime, de passer devant le tribunal pour livrer sa version des faits. « Je ne peux pas venir ici pour nuire à la réputation de ma fille, donc c’est la vérité que je vais vous dire », a-t-elle entamé. « Mon mari et moi avons décidé d’inscrire nos enfants pour étudier le coran. Après, elles (les deux filles) ont décidé de se voiler. Je leur ai dit que c’était une bonne chose, mais que c’était très tôt pour elles, surtout qu’elles étaient des élèves et que ça pouvait les empêcher de poursuivre les études.

Donc, je leur ai demandé d’attendre plus tard pour le faire. Mais un jour, j’ai trouvé M.H.D complètement voilée. J’ai retiré son voile, mais elle l’a remis. C’est suite à cela qu’elle a commencé à fuguer. Pour la première fois, on est allés la chercher chez l’imam, la deuxième chez le chef de quartier, mais la troisième fois, c’est à Dubréka qu’elle a été retrouvée après plusieurs jours de recherches. C’est un gendarme qui m’a appelé à 00h pour me dire qu’elle a été retrouvée là-bas. Le lendemain, à 6 heures du matin, on est partis la chercher », a-t-elle raconté.

Selon Fatoumata Diaraye Diallo, sa fille avait été gardée à la cimenterie chez une vieille qui se connaît avec Hamidou Diallo. Elle précise d’ailleurs que cette femme serait venue à la gendarmerie de Kipé pour reconnaître cela. Parlant des faits de viol, la plaignante soutient que le maître coranique en est effectivement l’auteur.

« Lorsque j’ai promis de tout faire pour qu’il (Hamidou Diallo) ne soit pas enfermé, ma fille a fini par me dire qu’un jour, elle n’avait pas pu lire le coran, que son maître coranique l’avait attachée les pieds, et ils ont entretenu des rapports sexuels », a-t-elle expliqué, ajoutant que cela se serait déroulé devant la copine de M.H.D.

Après ces différentes dépositions, les avocats de la partie civile ont demandé la comparution de la vieille femme qui aurait hébergé la présumée victime lors de sa troisième fugue et du chef du quartier de Dabompa, où elle avait été emmenée lorsqu’elle avait fui la maison familiale pour la deuxième fois. Le procureur a soutenu cette demande.

Mais l’avocat de la défense, lui, a estimé qu’il n’y a pas lieu de faire comparaître le chef de quartier puisque son client a confirmé être allé chez ce dernier en compagnie de la victime. Ce qui selon lui constitue un aveu judiciaire. La présumée victime a été entendue à huis clos pendant plus d’une heure dans le bureau du président du tribunal criminel en présence du procureur, des avocats des deux parties et de l’accusé.

À leur sortie, le tribunal a renvoyé l’affaire au 17 janvier 2023 pour la comparution de l’amie de la victime devant qui les faits se seraient déroulés et du lieutenant Diogo Diallo qui a instruit l’affaire à la Brigade de recherches de Kipé.

Mamadou Yahya Petel Diallo pour Guineematin.com

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