Comparution de Dadis Camara : réactions croisées de Me Lancinet Sylla et Me Pépé Lama

Capitaine Moussa Dadis Camara, ex président de la junte militaire guinéenne

Alors que l’audience du jour venait d’être suspendue dans l’après-midi de ce jeudi, 11 janvier 2023, les avocats d’Aboubacar Toumba Diakité, dit Toumba, et ceux du Capitaine Moussa Camara se sont exprimés aux micros des journalistes, dont un de Guineematin.com pour apporter leur analyse sur ce 35ème jour d’audience. À la barre, c’est le capitaine Moussa Dadis Camara qui comparaît pour la 9ème fois. Il continue de nier les accusations portées contre lui dans le dossier du massacre du 28 septembre.

Face aux questions de l’un des avocats de Toumba Diakité, le Capitaine Moussa Dadis s’est mis en colère, refusant de répondre à de nombreuses questions. Une chose qui n’a pas plu à Me Lancinet Sylla qui a déploré le système de défense adopté par l’ancien président du CNDD entre 2008 et 2009.

Me Lancinet Sylla, un des avocats d’Aboubacar Toumba Diakité

Me Lancinet Sylla, un des avocats de Toumba Diakité

 « Vous l’avez vu, il s’est montré désagréable. Alors, il n’a pas voulu répondre aux questions qui lui collent à la peau, qui établissent sa culpabilité dans cette affaire. Et lorsqu’on parle de complicité, ce n’est pas seulement les instructions. Les preuves ont été établies qu’il a donné des instructions à Moussa Tiégboro. Dans le dossier de la procédure, le procès-verbal de déposition de Moussa Keïta, qui est l’ex secrétaire permanent du CNDD, qui a affirmé que c’est Dadis qui a donné des ordres, sans oublier les déclarations de Pivi. Donc, je suis désolé, mais Dadis ne peut plus continuer à dire qu’il n’y a pas de preuve en ce qui concerne les instructions. C’est pourquoi la dernière fois, je vous disais qu’il existe des preuves, qui sont surabondantes. Vous avez constaté également que Dadis a eu à faire charger des armes, dans un camion militaire, ce sont ces mêmes armes qui ont été utilisées pour commettre ces meurtres au stade du 28 septembre. Çà aussi, c’est un élément qui établit la complicité et cette complicité s’établit par voie de fourniture de moyens, qui ont servi à la perpétuation de ces infractions. Vous avez enfin Moussa Dadis Camara, qui a eu à entretenir au domicile de Gono Sangaré, des civils qui étaient armés de flèches, d’armes et de cauris. Ces civils ont été vus. J’ai donné des procès-verbaux de quelques témoins et parties civiles. Donc dans cette affaire, la complicité est établie à l’égard de Dadis Camara. Raison pour laquelle, il n’a pas voulu répondre à mes questions, parce que ce sont des questions gênantes pour lui. C’est un Monsieur qui pense être au-dessus de tout, qui veut imposer sa vision et ça, ça ne marche pas avec moi… »

Me Pépé Antoine Lamah, un des avocats du Capitaine Moussa Dadis :

Me Pépé Antoine Lamah, avocat

« Le président Dadis ne peut pas répondre à des questions qui n’ont rien à voir avec les faits. Il est de son droit, de ne pas répondre aux comportements discourtois venant de qui que ce soit, il est même de son droit de garder le silence. Alors, si au départ, il a décidé de se prêter à toutes les questions, y compris des questions impertinentes, des questions qui manquent de substance, qui n’ont rien à voir avec le débat, il ne faudrait pas quand-même qu’on se permette d’en abuser, de se servir de sa position actuelle pour régler des comptes personnels. Je vous rappelle que nous sommes quand-même très déçus et choqués par certains propos dissipés dans la presse par la défense de Toumba. À la limite, c’est de l’injure, de la diffamation, et nous nous réservons le droit de saisir le bâtonnier, et éventuellement à qui de droit, pour obtenir la sanction de ce genre de comportement. L’article 68 de la loi L014 portant sur l’organisation de la profession d’avocat impose à tout avocat de s’exprimer avec mesure et modération. Ce n’est malheureusement pas le cas de la défense du commandant Toumba, qui se sert de ce dossier comme d’une tribune pour exposer une haine contre notre client. Quand je prends le cas particulier de Maître Paul Yomba Kourouma, après enquête, nous avons finalement compris qu’il y’a eu des antécédents entre le doyen Paul et Dadis ; cela, depuis que Dadis était président. Il est frustré pour la simple raison qu’il n’a pas bénéficié de décret… Nous avons conclu que ce dernier profite de ce procès pour régler les comptes avec Dadis. Ça ne devrait pas être la bonne manière de faire. Nous devons nous départir de la passion et rester professionnel, en posant des questions en lien avec le procès et rester dans le cadre de la manifestation de la vérité…Quand moi j’interrogeais Toumba, il refusait de répondre à des questions qui l’embarrassaient ; c’était son droit le plus absolu, on ne l’a pas forcé, ni le manqué de respect. Mais malheureusement, la défense n’a pas retourné cette monnaie au président Dadis. Aujourd’hui, on fait tout pour l’agacer, ils font tout pour le provoquer, et pour l’énerver. Mais croyez-moi, Dadis va prendre de la hauteur, et se mettre au-dessus de la mêlée, il va continuer à se prêter à des questions et coopérer avec tous les acteurs qui resteront professionnels dans le déroulement de ce procès ».

Propos recueillis et décryptés par Mohamed Guéasso DORÉ pour Guineematin.com

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