Possible fédération entre la Guinée, le Mali et le Burkina Faso : quelles conséquences pour la Guinée ?

Ibrahima Mubarak Bah, Doctorant en Droit

Par Ibrahima Mubarak Bah, Doctorant en Droit : Étant dans la même situation socio-politique, la Guinée, le Mali et le Burkina Faso sont tous suspendus des instances de la Communauté Economique des Etats de l’Afrique de l’Ouest dû aux différents coups d’Etats intervenus dans ces trois pays.

L’idée de ce projet de fédération est apparue au Burkina Faso à travers son chef du gouvernement, Me Apollinaire Joachimson Kyelem de Tambela dans la soirée du jeudi 09 février 2023. A cette occasion, il a levé un verre à la future fédération Burkina-Mali-Guinée, devant les ministres malien et guinéen des affaires étrangères.

Ayant la volonté de voir ces trois pays vers un destin commun, le Premier ministre Burkinabè, est sans équivoque : le Burkina Faso, le Mali et la Guinée, doivent impérativement aller vers le fédéralisme.

Selon lui, cela va en droite ligne des aspirations de nos populations. C’est ainsi qu’il déclare : « Il n’y a pas longtemps, Ibrahim Cissé a fait le trajet à pied, de Bamako à Ouagadougou, pour nous appeler à la fédération. Nous devons mesurer la détermination de ce citoyen malien. Allons-nous laisser cela sans suite ? Nous devons prendre conscience et nous mettre ensemble pour réaliser le rêve de nos populations. Ce que nous voulons tout simplement, c’est répondre aux aspirations de nos peuples qui ne demandent qu’à vivre en paix et en sécurité, à vivre dans une vraie démocratie et non dans une démocratie tronquée, à vivre en harmonie avec leurs voisins. C’est tout ce que nous cherchons ».

Pour la Guinée, adhérer a cette fédération voudra dire qu’elle devra passer par un long processus qui obligera au CNT (Conseil National de transition) qui fait d’office de parlement de mettre en place une commission d’experts afin de pouvoir travailler sur des questions techniques, avant que les autorités n’organisent  un referendum pour consulter le peuple et valider le projet.

Ce processus,  s’il aboutit, verra la Guinée renoncer à sa souveraineté au profit de la fédération, créera une nouvelle capitale ; une possible sortie de L’institution régionale qu’est la CEDEAO (qui donnera un coup à la libre circulation des biens et des personnes pour la fédération et surtout avec la réapparition des cartes de séjour en Côte d’Ivoire tout récemment), Une réelle menace sécuritaire par rapport à la lutte terroriste au Mali et au Burkina Faso, également une monnaie commune sera créée et enfin un gouvernement unique.

Il est évident que le Mali et le Burkina Faso n’ont pas accès à la mer, il pourront en cas de fédération compter sur le port de Conakry pour des exportations et importations ce qui permettrait à ce port d’avoir une affluence, d’accroitre sa performance et être beaucoup plus compétitif ; de mettre en place des infrastructures (routières et ferroviaires) afin de faciliter les échanges commerciaux.

C’est ainsi que Lucien Romaric Badoussi, spécialiste de la CEDEAO, et enseignant à l’université de Parakou craint qu’il y ait désormais une « coopération à double vitesse » au sein de l’institution sous régionale, au cas où ce projet est mené à terme. Une initiative qui pourrait aussi perturber l’intégration, puisque la Guinée pourrait leur accorder des taux préférentiels sur leurs importations. Ce qui pourrait par exemple estime-t-il, aboutir à la sortie de ses trois pays du pacte de la CEDEAO, à l’exemple de la Mauritanie autre fois membre mais qui a décidé de se retirer.

En tout état de cause, après l’échec de la fédération du Mali, cette fédération a peu de chance d’aboutir au vue des situations politiques que traversent ces trois pays qui sont en transition, des délais de transitions courts et doivent céder la main aux civiles à l’issue de ces transitions respectivement en février 2024 au Mali, Juillet 2024 au Burkina Faso et au plus tard le 1er janvier 2025 pour la Guinée.

  Ibrahima Mubarak Bah, Doctorant en Droit

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