Future constitution : voici les propositions phares du Président de la HAC

Boubacar Yacine Diallo, Président de la Haute autorité de la communication

Comme indiqué dans nos précédentes dépêches, le débat d’orientation constitutionnelle, dans son avant-dernière journée, a enregistré le passage au CNT hier, jeudi 1er juin 2023, du premier Président de la Cour des comptes, Sâa Josèphe Kadouno, du Secrétaire général de la Grande chancellerie nationale, Maître Amara Camara, du Président de la Haute autorité de la communication, Boubacar Yacine Diallo et du Président de la Chambre des notaires de Guinée, Kandé Oumar Camara.

Boubacar Yacine Yacine Diallo, l’un des plus anciens des présidents des institutions républicaines, sinon le plus ancien, a formulé aux membres du CNT, des propositions parmi les plus pertinentes pour la réécriture de la Constitution.

L’ancien Président de l’Union des télévisions et radios libres de Guinée (UTERLGUI) a fait des recommandations articulées en 14 points allant du renforcement de la séparation des pouvoirs au durcissement de sanctions contre les auteurs de viols et violences aux femmes, en passant entre autres par le renforcement de l’indépendance de la HAC et la dépénalisation totale des délits de presse. Guineematin.com, vous propose l’intégralité de cette intervention…

Jeudi, le 1 er juin 2023

Communication du Président de la Haute autorité de la communication au Débat d’orientation constitutionnel (DOC),

Monsieur le Président du CNT,

Mesdames et messieurs les Conseillers nationaux,

Messieurs les Présidents des institutions républicaines,

Mesdames et messieurs, chers invités,

Je voudrais à la suite des explications données par le président du CNT, dire que la HAC n’a pas reçu les documents cités, seule la lettre d’invitation nous a été envoyée. C’est dans cette salle donc, que nous apprenons qu’il y’a eu un canevas à travers lequel, nos propositions devraient s’articuler.

Néanmoins, nous nous sommes concertés et nous avons pu donner un lot de recommandations. Pour faire un peu l’historique de la haute autorité de la communication, puisse que j’ai cru comprendre qu’il fallait le faire.

Il faut savoir que l’ancêtre de la HAC, c’est le Conseil national de la communication (CNC) créé en octobre 1992 et ce conseil-là a veillé sur la campagne médiatique des élections présidentielles de 1993, des élections législatives de 1995. Il était chargé en particulier de l’élaboration des conditions d’accès des parties politiques en service, de déterminer également le temps d’antenne  et par la suite, d’écouter, de visionner les éléments de campagne pour éviter que des dérapages ne soient diffusés à l’antenne et de censurer des propos de nature à ébranler l’unité nationale et à troubler l’ordre public. Des recours étaient aussi possibles à l’encontre de ces censures devant la Cour suprême. Ce conseil était aussi habilité à délivrer la carte de journaliste professionnel.

Plus tard, cette autorité a été remplacée par la Haute autorité de la communication dans la Constitution de 2010.

En tant qu’instance de régulation dans cette constitution-là, la Haute autorité de la communication, avait entre autres comme prérogatives, de veiller à la liberté de la presse dans la responsabilité, ensuite, les pouvoirs qui appartenaient au ministère de l’information ont été transférés à la HAC notamment en matière de délivrance de la licence et d’agrément. Ce qui lui donnait le pouvoir de contrôle sur les médias. En 2020, avec la Constitution qui a été amandée, le droit de l’agrément lui a été retiré et retourné au ministère de l’information et de la communication.

Ce qui entrave un peu cette question de neutralité au niveau des médias. Donc, je disais que c’est un honneur pour moi, en tant que représentant de la Haute autorité de la communication de prendre la parole devant votre auguste assemblée pour participer au débat d’orientation constitutionnelle.

Ainsi, pour répondre à la deuxième exigence, naturellement, Oui ! Il faut maintenir dans la nouvelle Constitution la Haute autorité de la communication en renforçant ses attributions pour qu’elle soit indépendante dans sa gestion des médias, en confortant la liberté de la presse, mais aussi en faisant respecter les principes d’éthique, de déontologie et de respect du journalisme.

Maintenant, concernant la Constitution, elle-même, nous avons beaucoup écouté et nous pensons que la HAC ne devrait pas s’immiscer dans ce débat politique mais puisqu’elle est conviée, elle va tout de même livrer ses recommandations qui, il faut le souligner, ne sont pas contraignantes.

1- Renforcer la séparation des pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire pour éviter la mainmise de l’exécutif sur les autres institutions comme, c’est souvent le cas. Et nous estimons que la justice doit être renforcée notamment en c’qui concerne son indépendance ;

2- Réduire le nombre d’institutions constitutionnelles au strict nécessaire pour permettre entre autres la réduction des dépenses de l’État ; et il n’est exclu de voir certaines institutions constitutionnelle aujourd’hui de revêtir le titre d’autorité administrative indépendante comme c’est le cas dans certains pays voisins ;

3-Il y’a un point qui focalise beaucoup le débat, c’est celui du multipartisme, nous,  nous pensons qu’il faut maintenir ce multipartisme intégral à la condition que des mesures contraignantes soient prises pour la création et le fonctionnement des parties politiques. Ces mesures permettront le dépérissement des formations politiques qui ne répondent pas aux exigences de la loi. Cela permettra aussi à l’extinction des parties politiques, qui à notre avis ne méritent pas d’exister. L’accès aux médias est proportionnel à la représentativité à l’Assemblée nationale  pour chaque parti dans certains pays, il faut instaurer cette réalité aussi chez nous ici comme ça l’est en France.

4- Introduire la candidature indépendante  au scrutin uninominal pour les élections législatives. Nous estimons qu’il faut donner la chance à des candidatures indépendantes dans les circonscriptions électorales pour ne pas embrigader le vote par les parties politiques. Et donc, comme pour les mairies, que quiconque pouvant voter puisse candidater et naturellement avec des exigences pour tous ceux qui prétendront à cette élection.

5- Introduire la candidature indépendante à l’élection présidentielle avec un nombre important de parrainage exigé pour tout type de candidature. Cela pourrait permettre de faire disparaitre les parties qui ne représentent absolument rien ici. Il faut avoir le courage de le dire. La plupart sont créés dans le désordre donc, la loi à travers le parrainage doit s’en occuper. Les législateurs peuvent mieux élucider la chose.

6- Renoncer à l’idée d’une loi d’habilitation du président de la république entre les sessions de l’Assemblée nationale pour empêcher la prise de décision fantaisiste, à défaut, renforcer son caractère exceptionnel. On a vécu des moments pareils ici. Lorsque l’Assemblée était absente, le président ayant reçu une loi d’habilitation de cette dernière, faisait tout ce qu’il voulait que les députés peut-être n’auraient pas accepté. J’attire votre attention la dessus…

7- Maintenir le mandat présidentiel de 5 ans renouvelable une seule fois comme c’est mentionné dans la constitution de 2010.

8- Ce point fait polémique, nous avons longuement réfléchi et nous avons donné notre point de vue. Ne pas limiter l’âge pour la candidature au poste de président. Il faut simplement envisager des mesures draconiennes concernant la santé physique et mentale des candidats.

9- Fixer l’âge minimum pour être éligible à l’Assemblée nationale à 23 ans au lieu de 25 comme c’est mentionné dans la Constitution de 2010. Nous estimons avec les réseaux sociaux et l’environnement, les jeunes peuvent bien être députés. Cela permettra de mettre en synergie la fraîcheur des jeunes et l’expérience des vieux. Dans certains pays, c’est moins que ça, mais puisque c’est une expérience, il faut aller doucement.

10- Mettre en place un organe de gestion des élections essentiellement technique pour éviter que certaines parties politiques soient à la fois juges et parties prenantes comme ce fût le cas dans les années précédentes où des parties politiques ne reconnaissant pas les résultats de la CENI, demandaient à ses représentants de simplement se retirer. Cela est un vrai handicap. Lorsqu’elle serait technique, elle pourra mieux jouir de son pouvoir, de son impartialité.

11- Mentionner la dépénalisation totale des organes de presse. La Guinée doit être un exemple. Aujourd’hui d’ailleurs, elle est citée comme un exemple de dépénalisation partielle des délits de presse dans la sous-région.

Dans les pays où les journalistes ont commis des dérapages, le pouvoir exécutif et les autres se sont réunis pour réintroduire la pénalisation des délits de presse. La Guinée doit montrer de leadership dans ce domaine en dépénalisant totalement les délits de presse.

12- Intégrer la régulation des réseaux sociaux, des Web radios et Web télés dans les instances de régulation parce que nous avons une loi aujourd’hui sur la liberté de la presse et une loi sur la cybercriminalité. Nous pensons qu’il faut revoir ça et instaurer dans les attributions de la Haute Autorité de la Communication, puisque nous militons pour qu’elle soit maintenue afin que les réseaux sociaux, les Web radios et Web télés soient encadrés.

13- Harmoniser les lois organiques sur les organes de régulation des médias et sur la presse en matière d’autorisation pour les radios et télévisions privées.

14- J’espère que ce dernier n’est pas hors-jeu à la lumière de tout ce que j’ai dit. Nous estimons que la Constitution devrait durcir les peines et sanctions contre les auteurs de viols et de violences contre les femmes pour permettre d’éviter les récidives.

Monsieur le Président du conseil national de la transition,

Messieurs les présidents de commission,

Honorables conseillers, 

Distinguées invités,

Chers invités,

Voici les principales propositions de la Haute Autorité de la Communication, nous espérons que nous aurons une autre occasion pour explorer de plus les détails en ce qui concerne la réglementation dans le secteur de la communication qui viserait la promotion de la presse et la protection du journaliste.

Je vous remercie

Propos recueillis et décryptés par Mamadou Baïlo Diallo pour Guineematin.com

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