Détournement de quatre-cent-trente-deux milliards francs guinéens : un couple jugé au tribunal de Kaloum

Mamadou Daye Kébé et Bintou Kaba sont poursuivis par le parquet de Kaloum pour « faux et usage de faux et abus de confiance » au préjudice des cohéritiers de la famille de feu Mamadi Kébé. L’audience d’hier, lundi 05 juin 2023, était consacrée aux réquisitions et plaidoiries. Après cette phase, le tribunal a mis l’affaire en délibéré le 26 juin prochain, rapporte Guineematin.com à travers son reporter dépêché sur place.

Alpha Kébé, Sékou Kébé et M’Balou Kébé accusent leur frère Mamadou Daye Kébé et son épouse d’avoir détourné la coquette somme de 432 000 000 000 GNF qui sont issus des différents biens immobiliers laissés par leur père. Après le décès de ce dernier en 2005, la famille se serait réunie pour confier la gestion des biens, dont au moins 25 magasins qui se trouvent à Kaloum, Matam et ailleurs, à Mamadou Daye Kébé et Mamadou Djéné Kébé. Le loyer de chacun des magasins est estimé à 80 000 000 GNF par an. Selon les parties civiles qui vivent notamment en Europe mais qui sont venus pour le procès, depuis que les 2 hommes ont été désignés administrateurs desdits biens, ils n’ont jamais rendu compte.

En 2012, les 2 administrateurs ont été condamnés par le tribunal de Kaloum pour abus de confiance. Dès après cela, Mamadou Djéné Kébé a jeté l’éponge, la gestion exclusive est revenue au prévenu, qui malgré sa condamnation a continué de faire la même chose malgré qu’il soit même révoqué en 2017 par le tribunal de Mafanco. Alors l’année derrière, les parties civiles ont porté l’affaire devant le tribunal de Kaloum où elle est jugée en ce moment.

Lors de la dernière audience, le dossier a été renvoyé à aujourd’hui, lundi, pour réquisitions et plaidoiries. Mais au début de l’audience, les différentes parties n’étaient pas sur la même longueur, car si les avocats de la partie civile et de la défense étaient d’accord sur le motif du renvoi, le parquet lui croyait que cela avait été fait pour la suite des débats, du coup il n’était pas prêt à requérir. C’est ainsi qu’une longue discussion a eu lieu devant le tribunal avant finalement que celui-ci ne décide d’accorder une demie-heure au procureur pour qu’il puisse se remettre dans le bain de l’affaire.

Au retour de la suspension de l’audience, naturellement les avocats d’Alpha Kébé, Sékou Kébé et M’Balou Kébé ont eu la parole afin de plaider. Mais pour eux les choses sont claires : « Mamadou Daye Kébé a profité pendant 18 ans des biens, je trouve ça injuste. Cela doit cesser et pour que ça change, vous devez prendre une décision forte », a lancé au tribunal l’un des conseils de la partie civile. Il ajoute que ce prévenu a utilisé plusieurs prénoms mais également de dates de naissance différentes pour signer des contrats sur les biens. Donc, selon lui, le délit de faux et usage de faux est établi.

Parlant de Bintou Kaba l’autre prévenue, ils assurent qu’elle a signé un bail sur un des magasins avec quelqu’un sans en avoir le droit. Alors, les avocats ont demandé que les deux mis en cause soient condamnés solidairement à payer le montant incriminé. En outre, ils ont demandé au tribunal de suivre les réquisitions du procureur « s’il a la même compréhension de l’affaire que nous », ont-ils dit.

Le ministère public est effectivement allé dans ce sens en ce qui concerne le fait qu’il y a eu abus de confiance, faux et usage de faux, mais il estime que Bintou Kaba ne peut être reconnu coupable que dernier délit. « Il n’y a pas eu de preuves que des fonds lui ont été remis et qu’elle a accepté d’en faire un usage déterminé ou de les rendre », a-t-il soutenu. Alors il a requis que Mamadou Daye Kébé soit condamné au paiement de 25 000 000 GNF d’amende et Bintou Kaba à 2 000 000 GNF d’amende et 6 mois d’emprisonnement.

Mais selon l’avocat de la défense, les faits allégués contre ses clients ne sont pas établis. Il va jusqu’à remettre en cause les documents présentés par la partie civile comme preuves. « Les pièces sur lesquelles se fonde la partie civile ont été soustraites suite à une agression (de son client), c’est le fruit de ce qu’on appelle vol. Ils ont été pris de force dans le bureau de Mamadou Daye Kébé. Les parties civiles ont été entendues et elles ont reconnu les faits », a-t-il lâché. Ce qui a visiblement étonné les parties civiles dans la salle, elles se sont mises à se regarder et à se tenir la bouche.

Par ailleurs, il a affirme que le nom Bintou Kaba trouvé sur les documents n’est pas celui de sa clientèle, donc que ce serait une autre personne. Convaincu de l’innocence de ses clients, l’avocat a demandé que Mamadou Daye Kébé et son épouse Bintou Kaba soient « purement et simplement » renvoyés des fins de la poursuite pour délit non-constitué.

Mais, le tribunal a mis l’affaire en délibéré le 26 juin prochain pour rendre sa décision.

Mamadou Yahya Petel Diallo pour Guineematin.com

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