Foniké Mengué sur la gouvernance CNRD : « ma plus grande déception sous cette transition, c’est la justice »

Oumar Sylla, alias Foniké Mengué, coordinateur du FNDC

Comme indiqué précédemment, le procès des leaders du Front national pour la défense de la constitution (FNDC) s’est ouvert au tribunal de première instance de Dixinn, délocalisé dans l’enceinte de la Cour d’appel de Conakry, commune de Kaloum jeudi, 08 juin 2023. Oumar Sylla alias Foniké Mengué et Ibrahima Diallo qui ont comparu devant le tribunal correctionnel, contrairement à Saïkou Yaya Barry en dehors du pays, rejettent les faits mis à leur charge. Ils qualifient le procès de « politique » de « mise en scène » et la justice guinéenne de « malade ».

Après leurs dépositions respectives suivies des questions du parquet et de la partie civile, l’affaire a été renvoyée à demain vendredi (09 juin 2023), rapporte Guineematin.com à travers son reporter déployé au tribunal.

Poursuivis pour « participation délictueuse à un attroupement, complicité de destruction d’édifices publics et privés et complicité de coups et blessures volontaires », les deux responsables du FNDC déterminés encore à défendre leur conviction ont saisi la tribune qui leur est offerte lors de cette audience pour faire le procès de la justice guinéenne en pointant du doigt son dysfonctionnement.

Lors de son passage à la barre, Ibrahima Diallo, responsable des opérations du Front, après avoir réfuté les accusations mis à sa charge, a estimé que le procès dont lui et son camarade font l’objet est un procès politique.

Oumar Sylla, alias Foniké Mengué, coordinateur du FNDC au Tribunal de Dixinn

« Je ne reconnais absolument rien de ces faits-là. Je suis un acteur de la société civile qui mène un combat avec mes collègues pour le retour à l’ordre constitutionnel dans notre pays, contre l’injustice, contre la confiscation du pouvoir par la junte, parce que nous nous considérons que nous sommes des otages du CNRD. La junte a décidé de confisquer le pouvoir, de confisquer les libertés publiques, de nous priver de notre liberté pendant plus de 9 mois à la maison centrale de Conakry. Vous vous rappelez que ce n’est pas la justice qui nous a libéré, donc c’est le CNRD dans son bon vouloir après la pression de la rue qui a décidé de nous libérer, donc ce procès est un procès politique », a-t-il dit avant d’être interrompu par le président du tribunal, Kabinet Keïta, qui lui a demandé de rester dans le cadre des faits pour lesquels il est poursuivi.

 Par ailleurs, le responsable des opérations du FNDC a rappelé que la manifestation est un droit constitutionnel en Guinée. Il a ensuite répondu aux questions du tribunal et du parquet alors que ses nombreux avocats ont fait savoir qu’ils n’avaient pas de questions pour lui.

Quant à Me Koné Aimé Christophe Labiale, avocat de l’agent judiciaire de l’État, il a expliqué avoir pris connaissance de la tenue du procès au dernier moment, alors il a demandé qu’il soit renvoyé à une autre date. Mais le tribunal s’y est opposé et à ordonné la poursuite de l’audience rejoignant ainsi la position des conseils de la défense.

Ce fut donc au tour du coordinateur national du FNDC, Oumar Sylla alias Foniké Mengué d’être appelé à la barre. Contrairement à son camarade, il va s’asseoir sur une chaise après avoir accepté la proposition faite par le tribunal pour faire sa déposition.

Après son identification, Foniké rejette les préventions mises à sa charge, et lance : « Monsieur le président, ce procès est un théâtre! Une mise en scène totale, un déshonneur pour notre démocratie ». Le président du tribunal réplique « ce procès que moi je tiens n’est pas un théâtre. Je tiens ce procès pour des faits prévus et punis par les dispositions du code pénal », a rappelé Kabinet Keïta, invitant le prévenu à raconter les circonstances dans lesquelles il a été arrêté et ceux pourquoi il a été arrêté.

Poursuivant sa narration, Oumar Sylla rappelle que le FNDC a appelé à des manifestations pacifiques et que le CNRD dans sa charte a consacré ce droit. Et de réitérer : « s’il faut organiser des manifestations, nous le ferons. Et croyez-moi ce n’est pas la prison qui nous fera reculer face à cette volonté que nous avons toujours eu ».

Malgré le désir du président du tribunal de ne pas faire de son audience une tribune politique, Foniké est régulièrement allé sur ce terrain pour clouer au pilori la justice guinéenne.

« Après le coup d’État du 05 septembre (2021), nous avons vu les magistrats devant le colonel Doumbouya au Palais du peuple s’autoflageller en disant qu’ils n’agissaient pas par conviction, qu’ils n’agissaient pas par la volonté de la loi. Ils ont dit qu’ils étaient instrumentalisés… Alors ça me fait mal aujourd’hui quand je vois la justice fonctionner aux ordres. Mon combat à toujours été la justice pour tous les guinéens, la liberté pour tous les guinéens. Donc quand je vois cette justice, je me dis qu’on n’est pas sortis de l’auberge. Le plus grand mal aujourd’hui de ce pays c’est la justice, ça me fait mal de le dire. J’ai souhaité que sous cette transition qu’on puisse rectifier le tir, mais c’est tout le contraire qui se passe aujourd’hui. Le ministre de la Justice pense aujourd’hui que la justice c’est lui », a-t-il asséné avant d’être interrompu par le procureur.

Plus loin, le leader du FNDC ajoute que sa plus grande déception sous le CNRD reste la justice. « Ma plus grande déception sous cette transition c’est la justice. Je veux qu’ensemble, puisque c’est un combat de tout le monde, que ce soit les magistrats, la société civile, on va se donner la main pour aider cette justice. Cette justice aujourd’hui, elle est malade, on a pas besoin de le dire vous le savez déjà », a-t-il soutenu avant de répondre aux questions du procureur et de l’avocat de la partie civile.

Ensuite, le procureur a demandé le renvoi pour la comparution d’une partie civile, M. Kalo, qu’il n’a pas pu joindre avant la présente audience, argumente-t-il.

Sa demande a provoqué l’ire des avocats de la défense qui ont dit être prêts à en finir avec le dossier. Mais l’un d’entre proposera finalement au bout de plusieurs minutes de débats que l’affaire soit renvoyée sine die si toutefois le tribunal décide de passer outre leur objection par rapport à la demande de renvoi.

Après de très longs échanges avec le parquet et le tribunal, ce dernier décide de renvoyer l’affaire à ce vendredi pour la comparution de ladite partie civile.

Mamadou Yahya Petel Diallo pour Guineematin.com 

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