Conakry : une étudiante administre des coups de couteau à sa copine et risque 10 ans de prison

Un malentendu entre deux étudiantes partageant la même chambre au quartier Cobayah, dans la commune de Ratoma, a failli tourner au drame. Emmanuelle Cynthia Agama est accusée d’avoir administré des coups de couteau à Elisabeth Guilavogui alors que cette dernière dormait nuitamment. Accusée de tentative d’assassinat, la jeune étudiante a nié les faits, parlant de coups et blessures volontaires. Le parquet du tribunal criminel de Dixinn a demandé sa condamnation à 10 ans de réclusion criminelle ce lundi, 10 juillet 2023, a constaté sur place Guineematin.com à travers un de ses reporters.

A la barre, Emmanuelle Cynthia Agama a expliqué ce qui, selon elle, s’est passé dans cette affaire. « J’étais couchée comme d’habitude. Dans les bandes de 3 heures du matin, Elizabeth s’est réveillée pour aller se mettre à l’aise. Je me suis poussée pour lui céder le passage, c’est là que j’ai vu qu’elle avait un couteau. On s’est bagarrés et je lui ai administré trois coups, mais c’était pour me défendre. Comme elle n’avait pas d’emprise sur moi, elle a fui. Je l’ai poursuivie, mais cette fois pas pour lui faire du mal. C’était parce que je me suis sentie mal après. Quand elle est partie appeler le propriétaire et nos tuteurs pour dire qu’il y a bagarre entre nous qu’elle s’est blessée… mais, il y avait des antécédents entre nous : d’abord l’affaire de téléphone volé, l’argent, l’acide. Elle disait qu’elle avait perdu son téléphone et son argent dans la chambre. L’acide, j’ai acheté pour laver les carreaux et non pour l’empoisonner. J’ai même expliqué tout ça au propriétaire quand on m’a demandé. J’ai reconnu avoir donné des coups à Elizabeth, mais je n’ai jamais tenté de la tuer. J’ai acheté de l’acide pour les carreaux alors qu’elle n’était pas là-bas. Je ne lui ai rien dit quand elle est revenue parce qu’on ne s’adressait plus la parole. Un jour, je quittais l’école, je me suis rencontrée avec un ancien voisin. Quand nous sommes venus à la maison, j’ai trouvé Elizabeth assise avec un gars qu’elle m’a présenté comme étant son fiancé. Vers le soir, ils sont rentrés dans la chambre. Je n’ai pas aimé l’acte parce que cela donnait une mauvaise image pour nous. Je lui ai fait savoir que ce n’était pas bien ce qu’elle avait fait et depuis lors, nos liens se sont détériorés », a déclaré Cynthia, demandant sans cesse pardon pour son acte, les larmes aux yeux.

Appelée à son tour à la barre, la victime Elizabeth Guilavogui, remise physiquement de ses blessures, a donné sa version des faits. « Ce jour-là, c’était un lundi. Je n’avais pas cours. Quand elle est revenue, elle m’a trouvé assise avec mon petit ami dehors et elle est rentrée dans la maison. Vers 22 heures comme ça, je suis rentrée aussi. Avant, elle laissait l’ampoule allumée et difficilement j’arrivais à dormir. Ce jour-là, dès que je me suis couchée, elle a éteint l’ampoule. Je me suis endormie. Vers 3 heures, j’ai reçu un coup au dos, mais je ne m’en suis pas rendue compte immédiatement. Quand je me suis réveillée, Emmanuelle était assise sur mon dos, couteau à la main. Je lui ai demandé ce que j’avais fait. Elle n’a pas répondu. Je lui ai demandé pardon. Mais à chaque fois que je demande pardon, elle me poignarde. J’ai compris qu’elle ne voulait pas en entendre parler. Là, c’est Dieu qui m’a sauvée. Je ne sais pas comment j’ai réussi à soustraire du lit, comment elle s’est levée et j’ai pu me retourner et tenir le couteau qu’elle détenait tout en me dirigeant vers la porte. Mais à chaque fois que je tirai le couteau, elle le tirait de son côté, et ma main se déchirait. Une fois à la porte j’ai réussi à ouvrir. J’ai laissé le couteau et je me suis enfuie. Je criai à l’aide, mais personne n’est sorti. C’était le mois de ramadan. Mon petit ami habite dans le quartier. Je suis allée chez lui. J’ai demandé à ce qu’on vérifie mon dos pour voir ce qu’il y avait. Ça me démangeait. Après avoir vérifié, on m’a conduit directement à l’hôpital », a expliqué la victime Elizabeth Guilavogui.

Les débats clos, la parole a été donnée à l’avocat de la partie civile pour ses plaidoiries. L’avocat d’Elisabeth Guilavogui, après avoir fustigé les agissements de l’accusée, s’est dit s’en remettre à la sagesse du tribunal.

Dans ses réquisitions, le représentant du Ministère Public, Alpha Bacar Cissé a qualifié l’acte de « crapuleux et d’ignobles ». « Lorsque vous serez dans le secret de la délibération, vous voudrez bien tenir compte des faits de tentative d’assassinat, d’écarter les déclarations  » j’ai demandé pardon ». Ce sont des remords tardifs. De tenir compte de son courage, du mode opératoire pour arriver à ses fins. Nous vous demandons de retenir mademoiselle Emmanuelle Cynthia Agama dans les liens de la culpabilité. Pour la répression, de la condamner à dix (10) ans de réclusion criminelle. C’est la seule façon de la dissuader… »

La défense s’est dite étonné des réquisitions du parquet tout en rejetant les accusations de tentative d’assassinat. « Il y a eu une bagarre qui s’est mal soldée. Il y a eu des coups. Elle n’a jamais nié les coups et blessures volontaires. Par rapport à la tentative d’assassinat, il faut des preuves. L’intention Criminelle n’était pas là, elle n’a jamais prémédité cela. Ce qui est arrivé, elle n’a jamais su maîtriser sa colère. Et ce qui est arrivé, elle a regretté les faits. À l’enquête préliminaire, elle s’est jetée aux pieds de son amie pour demander pardon. Lorsque vous serez dans le secret de votre délibération, nous demandons monsieur le président de tenir compte des dispositions de l’article 957 du code pénal.  Nous plaidons non coupable par rapport aux faits de tentative d’assassinat. Nous vous demandons de la renvoyer des fins de la poursuite en application des dispositions de l’article 544. Pour les coups et blessures volontaires, nous plaidons coupable et demandons clémence du tribunal », a plaidé, l’avocat de la défense qui demande une condamnation avec sursis pour sa cliente qui a déjà fait 11 mois de détention provisoire.

Pour sa propre défense, Emmanuelle Cynthia Agama va réitérer sa demande de pardon à Elizabeth, à sa famille et au tribunal…

Le Tribunal a renvoyé l’affaire au 24 juillet 2023 pour rendre sa décision.

Kadiatou Barry pour Guineematin.com

Tél : 628 28 61 19

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