Mise en garde du Mali et du Burkina contre la CEDEAO : « Ce sont des déclarations de bravade », dit Bah Oury

Bah Oury, président de l'UDRG

Mercredi dernier, le Niger a basculé dans une instabilité socio-politique à cause du coup d’État militaire perpétré contre le régime de Mohamed Bazoum. Depuis, des voix s’élèvent aussi bien sur le continent qu’à l’échelle internationale pour condamner cet énième coups d’Etat dans la sous-région ouest-africaine. La CEDEAO (communauté économique des Etats de l’Afrique de l’ouest) a même menacé de faire « usage de la force » pour chasser les militaires putschistes du pouvoir et rétablir l’ordre constitutionnel au Niger.

Dans entretien accordé à Guineematin.com ce mardi, 1er août 2023, le président de l’Union des démocrates pour la renaissance de la Guinée (UDRG), Bah Oury, a exprimé son soutien au président déchu, Mohamed Bazoum, et a qualifié la situation au Niger de « préoccupante ». Cet homme politique guinéen a dit que ce putsch du CNSP dirigé par le Général Abdourahamane Tchiani est une déception pour tous les démocrates de la région et du continent.

« J’avoue que cette actualité est très préoccupante et a fait ressortir une situation qui est une profonde déception pour tous les démocrates et tous ceux qui aspirent à voir l’Afrique évoluer dans la stabilité, dans la démocratie et dans la bonne gouvernance. C’est la raison pour laquelle très tôt nous avons exprimé notre soutien au président Bazoum et au parti PNDS avec lequel l’UDRG est en très bonne relation », a-t-il indiqué.

Pour Bah Oury, ce coup d’Etat au Niger est incompréhensible, d’autant plus que ce pays est caractérisé ces dernières années par « l’évolution et le renforcement du processus démocratique ». Il cite notamment l’exemple du président Mahamadou Issoufou qui a fait deux mandats et a cédé le fauteuil présidentiel à l’issue d’une élection à laquelle il n’a pas pris part. C’est cette élection d’ailleurs qui a permis au président Mohamed Bazoum d’accéder à la magistrature suprême du Niger.

« Le président Bazoum, dans les règles de l’alternance démocratique, a pris le pouvoir. Le lendemain de son élection, il y a eu une tentative avortée de remise en cause de l’ordre constitutionnel avant même qu’il ne s’asseye sur le fauteuil présidentiel. Deux ans plus tard, pour des raisons de convenance personnelle, le chef de la garde présidentielle séquestre le président et sa famille au sein du palais présidentiel, et par la suite proclame la prise du pouvoir par une junte militaire. Et, cela met en doute leur volonté d’aller dans le sens des affirmations qu’ils ont indiquées à savoir : la détérioration des conditions sécuritaires au Niger et la mauvaise gouvernance.

Or, tous les observateurs nationaux et internationaux savent que le Niger, au sein du Sahel, est le plus haut sur lequel toute la communauté internationale s’appuie aujourd’hui pour endiguer l’évolution du tourisme et la propagation des actes de déstabilisation que l’Afrique de l’ouest connaît. Et par conséquent, remettre en cause cette dynamique, c’est affecter de manière profonde et durable la stabilité du Niger et par conséquent remet en cause les possibilités pour le Sahel et l’Afrique de l’ouest d’endiguer et de contenir l’évolution du djihadisme. Donc, c’est toute l’Afrique qui est menacée dans ce genre de circonstance.

Raison de plus que ce qui se passe au Niger, ce n’est pas simplement pour le Niger, c’est pour l’ensemble de l’Afrique. En plus de cela, cette logique de prise de pouvoir pour des questions de convenance personnelle remet en cause la croyance et la conviction que les urnes peuvent installer quelqu’un démocratiquement au pouvoir et que des institutions démocratiques, fragiles au début, puissent se consolider dans le temps. Si telle est la perception, alors partout ce seront des guerres, ce seront des gens qui ont des armes qui vont tenter de confisquer le pouvoir politique », a déploré Bah Oury.

Au terme d’un sommet extraordinaire dimanche dernier à Abuja, la CEDEAO a imposé un embargo financier au Niger et a menacé de faire usage de la force (une intervention militaire) pour y rétablir l’ordre constitutionnel. Mais, ces mesures ont été vivement critiquées par certains pays membres de l’organisation ouest-africaine. C’est notamment le cas du Mali et du Burkina Faso.

Dans un communiqué conjoint hier (lundi), les gouvernements de Transition du Burkina Faso et du Mali ont averti que « toute intervention militaire contre le Niger s’assimilerait à une déclaration de guerre contre le Burkina Faso et le Mali ». Ils ont aussi prévenu que « toute intervention militaire contre le Niger entraînerait un retrait du Burkina Faso et du Mali de la CEDEAO, ainsi que l’adoption de mesures de légitime défense en soutien aux forces armées et au peuple du Niger ».

De son côté, avec un ton un peu plus diplomatique, la junte militaire guinéenne a prévenu « qu’une intervention militaire contre le Niger entraînerait de facto la dislocation de la CEDEAO ». Le CNRD a dit que « les mesures de sanctions préconisées par la CEDEAO incluant une intervention militaire, est une option qui ne saurait être une solution au problème actuel, mais entraînerait un désastre humain dont les conséquences pourraient aller au- delà des frontières du Niger ».

« Ce sont les déclarations de bravade à mon avis. Puisque aussi bien Bamako que Ouagadougou ont du mal à assurer leur sécurité. Les forces militaires du Mali et du Burkina qui sont en conflit avec les djihadistes à l’heure actuelle. Et, le Mali est allé jusqu’à demander l’apport des mercenaires étrangers pour assurer la sécurité du pouvoir de Bamako. Donc, c’est une bravade. Je ne les vois pas aller au-delà d’une simple déclaration de type populiste. Les juntes du Mali et du Burkina Faso doivent savoir que la déstabilisation du Niger, ce sera la victoire des djihadistes au Mali et au Burkina Faso.

Puisque ce sont ces deux pays qui sont les plus fragiles et qu’une bonne partie de leur territoire aujourd’hui échappe au contrôle de l’État officiel de Ouagadougou et de Bamako. Donc, leur sécurité et l’existence même de leurs États peuvent être impactées négativement par la situation qui prévaut au Niger actuellement. Donc, ils devraient faire preuve de prudence et de responsabilité pour prendre en compte la dimension globale et régionale des faits qui sont en train de se passer à Niamey », a martelé Bah Oury.

Malick Diakité pour Guineematin.com

Tel : 626-66-29-27

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