Conakry : à la rencontre de Dacky M’bor Camara, 1er capitaine de l’équipe de Guinée de football

Dacky M'bor Camara soulevant un trophée

Juste après le 02 octobre 1958, alors que l’indépendance du pays venait à peine d’être proclamée, la République Guinée mettait sur pied sa première sélection nationale de football. Elle était composée de joueurs minutieusement choisis parmi un lot de joueurs venus de différentes préfectures du pays. Dacky M’bor Camara est choisi comme capitaine de l’équipe nationale, faisant de lui le premier capitaine de l’histoire du Syli national de Guinée. Dans la journée de ce jeudi 18 janvier 2024, un reporter de Guineematin.com est allé à sa rencontre, à son domicile à Boulbinet, dans la commune de Kaloum, pour connaître le vécu de ce monument national.

Au lendemain des indépendances, les autorités vont constituer le Syli national de Guinée, équipe qui va briller quelques années plus tard sur le sol africain. Cette équipe nationale avait pour capitaine Dacky M’bor Camara, aujourd’hui âgé de 90 ans. Ce monument du football guinéen a connu a connu victoires, défaites et plusieurs moments remarquables durant ces années de sélection avec le brassard de capitaine.

Dacky M’bor Camara, premier capitaine du sylinational

Interrogé par notre reporter, il revient sur ses premiers moments en tant que capitaine de la première équipe nationale de Guinée. « Après la colonisation, au lendemain des indépendances, on a dissous toutes les équipes coloniales pour former une équipe nationale en 1959, pour aller représenter la Guinée à l’international. Le gouvernement en place parcourait les différentes préfectures pour avoir des éléments et venir, à travers un concours, constituer un bon groupe. Moi, j’ai été sélectionné à Conakry ici. Et j’ai été parmi le groupe qui est allé en Hongrie pour jouer. En ce temps-là, la Hongrie était une grande nation de football, c’était l’une des meilleures équipes du monde dans les années 1960. J’ai été choisi pour être capitaine lors d’un vote avec mon compagnon Camara Barack qui voulait aussi être capitaine. Le groupe a eu confiance en moi et m’a choisi comme capitaine. J’étais le plus âgé du groupe d’ailleurs. J’ai été sélectionné à l’âge de 25 ans. C’était le plus beau jour de ma vie, parce que je m’engageais à servir ma nation, à jouer pour elle », déclare-t-il.

Dacky M’bor Camara, premier capitaine du sylinational

 Poursuivant, Dacky M’bor Camara, qui continue aujourd’hui à suivre les matchs du Syli national en tant que doyen passionné de ce sport, explique la différence qui existe entre les générations d’hier et celles d’aujourd’hui. « À l’époque, il n’y avait pas une grande organisation pour organiser de grandes compétitions sur le continent, mais on jouait beaucoup, nous les guinéens, avec les pays de l’Afrique de l’ouest. Je ne sais pas si vous vous souvenez de la compétition Amilcar Cabral, j’ai été l’un des éléments qui ont joué à cette compétition deux fois et on a remporté deux coupes d’ailleurs. À l’époque, on travaillait dur. Je me rappelle qu’une fois, on a joué un match ici au stade, on nous a battus. C’était un match durement disputé contre le Liberia qui nous a vaincu au score de 5-0. Après la rencontre, on nous a tous emprisonnés. C’est pourquoi aujourd’hui, quand je vois les joueurs de maintenant qui sont logés dans des hôtels à Dubaï, je me dis un peu qu’ils sont gâtés. Mais c’est ainsi, le football évolue », a-t-il déclaré.

L’ancien capitaine du Syli national, en tant qu’admirateur du football guinéen actuel, conseille les instances du football de notre pays à ne pas négliger les joueurs évoluant sur le sol guinéen dans les sélections nationales. « Durant notre temps, on misait beaucoup sur le talent local, des jeunes qui respiraient le football guinéen, dans toute son authenticité et sa brutalité. Mais maintenant, on mise trop sur ceux qui sont en Occident. On les considère plus que ceux qui sont ici. C’est un peu ce qui cause notre chute avec cette génération. Il faut que les dirigeants essaient de mettre fin à la discrimination et miser sur les deux parties. Ils doivent être plus malins. Autant qu’on ne peut pas nier les capacités de ceux de l’extérieur, qui ont eu un environnement favorable, autant, on ne peut nier aussi la motivation et le talent des joueurs locaux », soutient-il.

Sékou Oumar Camara, neveu de Dacky M’bor Camara

Sékou Oumar Camara, neveu de Dacky M’bor Camara, présent aux côtés du vieil homme depuis 50 ans, déplore le manque de considération de l’État concernant son oncle. « On ne peut pas crier sur tous les toits qu’on a un monument national qu’il faut valoriser. Je ne sais pas si la nouvelle génération connaît son existence, mais l’État connaît quand-même qu’il vit toujours, mais il ne vient pas à sa rencontre, il ne le valorise pas, ni même les instances du football. Pourtant, c’est un homme dont l’histoire, ne serait-ce que pour les jeunes qui voudraient jouer au football, doit être enseignée. Mais vous, vous êtes là pour mettre de la lumière sur lui et on vous en remercie. Mon oncle est un homme très humble, qui ne cherche personne et qui vit tranquillement sa vie. Ça fait plus de 50 ans que je le connais et franchement, c’est un homme formidable », a dit l’ingénieur chimiste de formation.

Mamadou Baïlo Diallo pour Guineematin.com

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