Prolongement du mandat de Macky Sall : «Ils ont mis le feu à ce qui nous restait de la démocratie »

Senegalese deputies take part in the first parliamentary session since the July 2022 legislative elections, in Dakar on September 12, 2022. (Photo by CARMEN ABD ALI / AFP)

Au terme d’une plénière houleuse qui a occasionnée l’expulsion des députés de l’opposition de la salle, l’Assemblée nationale sénégalaise a adopté la nuit dernière (05 février 2024),  le projet de loi prorogeant le mandat de Macky Sall pour 10 mois. Ainsi, le président pourra rester au pouvoir jusqu’au 15 décembre 2024 alors que son second mandat devait s’achever le 02 avril prochain. Cette prolongation vient acter le report de l’élection présidentielle qui était prévue le 25 février 2024, mais que Macky Sall avait reporté sine die le week-end passé. Pour l’opposition, ce prolongement n’est autre qu’une forfaiture.

Les débats ont été tendus à l’Hémicycle entre députés de la coalition au pouvoir (Benno Bokk Yakaar) et ceux de l’opposition (Yewwi Askane Wi et autres) lors de l’examen du controversé projet de loi qui a rallongé le bail du président Sall à la tête du Sénégal. Il a fallu l’intervention des gendarmes pour expulser les opposants qui ont refusé l’idée du président de l’Assemblée de passer au vote du texte directement sans débats préalables. La loi émanant du Parti démocratique sénégalais (PDS) de Karim Wade a donc été adoptée par ses députés et ceux de Benno Bokk Yakaar.

 « Énième forfaiture de Macky Sall… »

Mais de son côté, l’opposition sénégalaise dénonce un coup d’Etat constitutionnel du président sortant, qui sera « illégitime » à partir du 02 avril 2024.

Bougane Guéye Dani, president du Mouvement Gueum Sa Bopp Tekki Jotna.

« Énième forfaiture de Macky Sall, soutenue par des députés soumis et opportunistes, applaudie par des institutions inutiles telles que la Cedeao et l’Union Africaine, devant une majorité populaire qui a toujours respecté l’élégance républicaine envers le vote. Macky Sall s’agrippe à son malheur en refusant de respecter le serment qu’il avait convenu avec le peuple sénégalais. Encore 10 mois pour des élections, ce qui est sûr dans l’esprit de chacun de nous est qu’à partir du 2 Avril 2024 Macky Sall deviendra un Président illégitime. Je condamne fermement cet abus de pouvoir et j’appelle la Magistrature et les forces vives à prendre leurs responsabilités », réagit Bougane Guéye Dani, president du Mouvement Gueum Sa Bopp Tekki Jotna.

Birame Souleye Diop, président du groupe parlementaire Yewwi, abonde dans le même sens, regrettant l’extinction de la démocratie au Sénégal après l’adoption de cette loi.

Birame Souleye Diop, président du groupe parlementaire Yewwi

 « Ils (députés) ont mis le feu à ce qui nous restait de la démocratie. Ils n’ont même pas laissé le soin aux députés de se prononcer. Une chose aussi grande qu’une modification, qu’une suspension de la Constitution. Ils ont refusé le débat, amenant la gendarmerie qui a à nouveau violé l’Hémicycle. Vous comprenez maintenant qui sont les traitres du peuple,  qui sont ceux qui gèrent leurs propres intérêts… Nous avons tenu ensemble, les députés de l’opposition, les vrais député de l’opposition, qui pensent qu’on ne peut pas proroger le mandat du président de la République, au-delà des délais prévus. Mais voilà le visage que nous offre la démocratie sénégalaise », a-t-il confié dans la presse.

Cette crise démocratique se passe dans un contexte où la liberté d’expression est fortement menacée au Sénégal avec des manifestations réprimées, la coupure d’internet par les autorités sénégalaises, mais aussi du retrait de la licence du groupe Walfadjri annoncé hier.

Mamadou Yahya Petel Diallo pour Guineematin.com

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